Il etait une fois le Maroc-David Bensoussan-La conférence de Madrid en 1880

LA CONFÉRENCE DE MADRID

La conférence de Madrid en 1880 visa à statuer la question des « protégés» consulaires.

Onze pays européens, les États-Unis et le Maroc participèrent à cette conférence. La France y défendit le droit de conserver tel quel le statut de la protection consulaire. Il y avait alors 7 à 800 protégés consulaires dont 75% étaient juifs. De fait, la protection s'étendait à la famille des protégés, leurs employés et leurs associés, ce qui portait en fait leur nombre à plusieurs milliers.

Au terme de cette conférence, il fut statué que le nombre de protégés consulaires serait limité à douze par pays. Les consuls avaient le droit d'engager des sujets marocains : un interprète, un soldat et deux serviteurs lesquels seraient exemptés d'impôt. La protection consulaire s'appliquait à la famille vivant sous leur toit. Leur charge n'était pas héréditaire à l'exception de celle de la famille Benchimol de Tanger. Les étrangers et les protégés consulaires pouvaient acquérir des propriétés, mais la taxe agricole et la taxe sur le cheptel étaient maintenues. Tout sujet marocain naturalisé à l'étranger, devait à son retour au Maroc décider de renoncer sa nouvelle citoyenneté ou émigrer au terme d'un séjour équivalent à celui qui aura été nécessaire pour obtenir sa naturalisation. La conférence approuva également un texte relatif au libre exercice de tous les cultes au Maroc, bien que le délégué marocain Barguash affirmât tout haut l'inutilité d'un tel décret.

Pour les Juifs, la protection consulaire était une garantie contre les abus de la population ou des autorités locales. Ceux qui bénéficiaient de la protection consulaire ou ceux qui y aspiraient craignaient de retomber sous le statut institutionnalisé d'humilié. Il n'y avait eu que l'intervention des puissances étrangères pour freiner les abus dont ils faisaient l'objet, les doléances aux autorités musulmanes ayant peu de chances d'être suivies d'actions correctives. Les commerçants juifs soutenaient que dans les régions de l'intérieur, le recouvrement des dettes n'était possible que par l'intervention des puissances étrangères.

Le Maroc n'était plus en position de force

Les Européens et les États-Unis s'octroyaient le droit de commercer librement. Bien que l'on préservât en principe l'intégrité du gouvernement marocain (cet aspect sera confirmé à nouveau à la Conférence de Berlin en 1885 où l'on traita de la « Question marocaine»), le Maroc qui participait à cette conférence internationale était un Maroc affaibli par les défaites militaires infligées par la France à Isly en 1844 et par l'Espagne à Tétouan en 1860. L'état marocain n'était pas en mesure de faire concurrence à l'expansion industrielle en Europe, d'autant plus que les lourdes indemnités qu'il payait après la guerre d'Espagne de 1860 le privaient d'une source de revenus douaniers importants : L'indemnité de guerre espagnole équivalait aux dépenses de l'état marocain entre deux ans et trois ans; elle fut acquittée au bout de vingt ans.

Comment les décisions de la Conférence de Madrid furent-elles appliquées?

Dans la pratique, les choses changèrent peu. Un grand nombre de Juifs et de Musulmans cherchèrent à obtenir le statut de protégé consulaire et les Consuls n'appliquèrent pas toujours à la lettre les décisions de la Conférence de Madrid. Un grand nombre de plaintes de spoliation fut émis par ces protégés qui demandaient des redressements et des compensations. Qui plus est, certains Juifs allèrent demeurer quelques semaines en Algérie et revinrent au Maroc avec la citoyenneté française pour échapper à la justice marocaine et les Consulats durent parfois annuler le statut de citoyenneté de certains protégés lorsqu'il avait été obtenu par des moyens détournés. Une trentaine de ces nouveaux protégés s'associèrent parfois à des caïds peu scrupuleux pour se faire usuriers – le prêt à intérêt est interdit dans la religion musulmane – ce qui se traduisit parfois par des mesures draconiennes envers les endettés. Il est possible que la misère de ceux qui avaient tout perdu des suites de prêts usuraires se soit traduite par une animosité accrue à l'égard de l'ensemble des Juifs de la part du petit peuple, ces derniers servant traditionnellement de bouc émissaire de service.

Précisons enfin qu'au terme d'une autre conférence internationale tenue à Berlin deux ans avant la Conférence de Madrid, les puissances européennes reconnurent le droit des états de disposer de zones d'influence pour autant que d'autres états n'en contestassent pas l'appartenance totale ou partielle.

LES DEBUTS DE LA PRESSE AU MAROC : LA PRESSE ÉMANCIPÉE DE TANGER

Quel fut le rôle de la presse tangéroise?

Les premiers journaux au Maroc apparurent au XIXe siècle. Ils furent publiés en langue espagnole, anglaise ou française et eurent un grand impact sur Tanger essentiellement, mais aussi dans le monde. La liberté de presse fut totale et les premiers journaux en profitèrent pour demander une solution aux problèmes de l'eau et à ceux de la voirie dans la ville. Ces mêmes journaux dénoncèrent l'esclavage et les ventes publiques d'esclaves. Ils exigèrent l'amélioration des conditions des prisonniers dans les geôles marocaines. Ils lancèrent des campagnes de levées de fonds pour venir en aide aux victimes du choléra au Maroc ou d'un tremblement de terre en Espagne. Ils n'hésitèrent pas à condamner le despotisme du Makhzen ou même l'inaction des légations consulaires devant les injustices. De façon générale, les légations étrangères importantes avaient leur journal. Nombreux furent les Israélites naturalisés britanniques qui œuvrèrent dans le journalisme tangérois. Ils se firent les ardents défenseurs de la modernisation du Maroc et de sa communauté israélite.

Le Liberal Africano parut à Ceuta en 1820, mais cessa d'être édité après six numéros. El Eco de Tetuan parut en 1860, puis fut remplacé la même année par El Noticerio qui tint pendant un an et compta quatre-vingt-neuf numéros. Ces journaux hispanophones se préoccupèrent essentiellement des nouvelles militaires ou défendirent les politiques de l'Espagne. D'autres feuillets parurent, mais eurent une existence brève : El Berberisco en 1881, Eco de Ceuta et La Africana en 1885. Il y eut également les revues El Eco Mauritano, La Duda del Progresso, La Lintema, El Dario de Tanger, El Emperio de Marruecos et La Cronica de Tanger. En 1870, il fut fait mention d'un journal tangérois publié sous l'égide de l'Alliance Israélite Universelle, critiquant le gouvernement local et les consuls d'Espagne et de France. Toutefois, sa parution semble avoir été éphémère.

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