Meknes-portrait d'une communaute juive marocaine-Joseph Toledano-ed Ramtol 2017- LA FIN TRAGIQUE DE LA FAMILLE MAIMRAN

LA FIN TRAGIQUE DE LA FAMILLE MAIMRAN

En 1697, alors qu'Abraham était à Tanger pour conclure l'affaire hollandaise, il apprit l'assassinat par un des fils du sultan, de son frère qui représentait l'affaire familiale à Salé, dans d'horribles circonstances que rapporte le consul de France Estelle :

" Moulay Ahmed Edehbi vint chez Maymoran, le frère du chef des Juifs et le pria d'aller à un jardin avec lui. Ce Juif ne put lui refuser. Y étant, le prince voulut jouir de lui, ce qui surprit ce Juif qui ayant fait résistance, il le tua lui -même d'un coup de fusil. Ce Juif avait quatre coreligionnaires qui l'ac­compagnaient, lesquels il fit forcer par les Maures en sa présence – ce qu'il fallut qu'ils souffrent pour épargner leur misérable vie : cruauté et malice presque inouïes. Cette mort a causé bien des désordres. Ce Juif était l'homme le mieux fait qu'il y eut dans ce pays et de beaucoup d'esprit; fort ami du Roy de Maroc. Ce Juif était mon ami intime, le protecteur de notre nation, la France, et je puis dire que notre commerce perd là un bon patron …" L'affaire fit grand bruit et le sultan qui estimait et aimait sincèrement la vic­time, dut sévir avec sa sévérité habituelle, mais cette fois fort sélective. Il fit décapiter les quatre soldats qui accompagnaient le prince pour ne pas être in­tervenus pour éviter le crime. Quant à l'auteur lui -même, il était intouchable, car fils de la reine Aïcha, l'épouse préférée du sultan qui avait sur lui un as­cendant presque magique. Abraham ne put de ce fait obtenir réparation, mais il garda sa place à la Cour. Son influence devait rester telle que le gouverneur de ville jaloux de sa position, soudoya son médecin pour l’empoisonner en 1723. Pour la communauté juive c'était une perte irréparable. Une fin aus­si tragique comme celle de son père avant lui, frappa de stupeur toutes les communautés bien au -delà de Meknès.

Loin d'abuser de sa fonction de Naguid comme d'autres avant et après lui, il avait toujours usé de son immense influence en faveur de sa communauté. "Grand Chef des Juifs, uniquement préoccupé par le bien de son peuple". Le grand maître de Halakha de Fès qui le connaissait personnellement, rabbi Yaacob Abensour, lui consacra une élégie en hébreu restée célèbre. A preuve que grandeur matérielle n'est pas incompatible avec l'élévation spirituelle. Après sa mort, le sultan désigna pour lui succéder comme Naguid de la com­munauté un proche de la famille, Mimoun Maimran.

Sans jamais égaler sa renommée, d'autres membres de sa famille remplirent de hautes fonctions à la Cour et dans le commerce avec la France.

A propos de Meyer Maimran, les chroniqueurs juifs disent qu'il fut un "grand notable aux yeux de son peuple et du gouvernement, il usa de son influence pour améliorer le sort de ses malheureux coreligionnaires".

D'un autre membre de cette vénérable famille, rabbi Yaacob Abensour, écrit dans son livre Michpat outsédaka Béyaacob :

" Quant à ce qu'ont prétendu les rabbins de Meknès, qu'ils avaient vu dans leur génération un notable acquitter intégralement sa quotepart (des taxes et impôts), je l'ai effectivement connu : c'était Shmouel fils de Yaacob Maimran. S'il l'avait voulu, il n'aurait jamais eu à payer le moindre impôt comme l'ont toujours fait ses semblables et Naguidim proches du pouvoir et qui aurait pu alors le lui en faire reproche ? Mais lui dans sa générosité, ne lésinait pas dans sa contribution à la caisse publique. Sa notoriété était grande et l'éten­due de ses relations commerciales avec les Chrétiens et les Juifs bien connue de tous. Il entretenait les meilleures relations avec les grands et les ministres à Meknès, Salé, Fès, Tétouan, Taza, Marrakech, les pays du Maghreb et d'Eu­rope. Ses agents étaient présents dans toutes les villes, au point de susciter des convoitises et d'attirer sur lui le mauvais œil…"

Le fils d'Abraham Maimran, Itshak, fut à son tour assassiné par des brigands en 1728. Le sort s'était acharne sur cette famille qui pendant un demi siècle avait dominé la vie de la communauté de Meknès et après la mort de Moulay Ismaël, elle disparut du devant de la scène pour retomber dans l'obscurité de l'anonymat. Deux siècles plus tard; en 1931, le reporter du bimensuel de Casa­blanca; L'Avenir Illustré, Jacob Ohayon écrivait : "Je cherche à savoir quelles traces a laissées ce Maimran dans la tradition des Juifs de Meknès; personne ne connaît cette histoire; les quelques Maimran qui restent à Meknès vivent très obscurément."

Entre temps une autre famille devait également connaître son heure de gloire.

Meknes-portrait d'une communaute juive marocaine-Joseph Toledano-ed Ramtol 2017 LA FIN TRAGIQUE DE LA FAMILLE MAIMRAN-page63-64

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