Il etait une fois le Maroc-D. B.


Il etait une fois le Maroc david bensoussanTemoignage du passe judeo-marocain David Bensoussan

Il etait une fois le Maroc

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David Bensoussan

Être au service du Souverain pouvait comporter des risques

Romanelli fut un voyageur italien qui vécut au Maroc à la fin du XVIIIe siècle. Dans son ouvrage Massa' Be'arav, il décrivit ainsi la dépendance à l'égard du sultan des célèbres Négociants du Roi qui furent en charge du commerce portuaire à Mogador : « Tant que le sultan s'en sert, ils sont pareils à ces rares ustensiles auxquels le vulgaire qui ne sait pas les manier se brûle dès qu'il y touche, mais il suffit que le sultan les écarte pour qu'ils soient perdus pour toujours… Si haute que soit leur situation, l'abîme reste toujours sous leurs pieds; ils savent qu'il suffit d'une parole du souverain pour qu'ils y soient engouffrés… L'exécution, l'exil, l'expropriation, les châtiments de toutes sortes, tel est le sort ordinaire de cette classe de gens qu'on appelle communément au Maghreb Shab es-Soultan.» Le sociologue Michaux-Bellaire a pu retracer la fin tragique de nombreux représentants et employés juifs du sultan dans son étude Le Gharb Al Ksar. Ainsi, Salomon Nahmias qui servit d'interprète en 1733 à l'envoyé britannique John Sollicoffe fut exécuté. Sur ordre de Moulay Ismaïl, son conseiller de longue date Yossef Maïmaran, celui-là même que Georges Mouette décrivit en son temps en ces termes : « Ledit Maïmaran, jouit auprès du roi d'un crédit égal à celui de Colbert en France » fut écrasé par un cheval. Aux dires du captif anglais François Brooks, le sultan aurait feint l'affliction et demandé au fils Abraham de remplacer le père Yossef. Un second, Moshé Ben Attar fut condamné au bûcher puis gracié et ruiné. Le sultan Mohamed III fit empoisonner son conseiller Samuel Sumbel et couper en morceaux et brûler son conseiller Itshak Cardozo. De telles condamnations étaient courantes. Les intrigues de cour étaient, il va sans dire, non étrangères à ces rétrogradations. Fait intéressant, au début du XIXe siècle, le rabbin Raphaël Berdugo de Meknès soutenait que les Juifs proches du pouvoir avaient tendance à être moins observants du point de vue religieux

Les sultans ont su jouer la carte de la compétition entre les leaders _juifs désireux d'avoir la charge de Naguid, c'est-à-dire dirigeant de la  communauté. Ainsi, sous Moulay Ismail, lorsque Moses ben Attar offrit de doubler la somme proposée par Maïmaran pour la charge de Naguid, le sultan encaissa les deux sommes et, « pour éviter les rancœurs » ordonna au second d'offrir sa fille en mariage au premier. Lorsqu'un pretendant à la charge de Naguid du nom de Yahia Cohen voulut prendre la place de R. Isaac Serfaty, ce dernier, avec l'appui de la communauté, proposa de conserver la charge pour une somme de 5 000 pièces d'argent. Or, il se trouva qu'un troisième candidat du nom d'Ibn Ramokh surenchérit et R. Isaac Serfaty renonça à la charge. Le sultan relama néanmoins de R. Isaac Serfaty la somme de 5000 pièces d'argent car ce dernier aurait osé refuser la nomination que le souverain se serait apprêté à faire. R. Isaac Serfaty tenta de quitter la ville avec son frère, mais ils furent appréhendés et emprisonnés; leurs biens furent saisis.

Le fait que les caïds avaient également des hommes de confiance juifs merite d'être souligné. Ainsi, jusqu'à l'avènement du Protectorat, les Juifs jouaient un rôle d'intermédiaires de premier plan.

Les Juifs de cour représentèrent une infime minorité

C'est vrai. La quasi totalité de la communauté juive vivait dans des conditions misérables. Les Juifs de cour, privilégiés, furent recrutés au sein d'un nombre de familles triées sur le volet. Dans le contexte du XIXe siecle, les Négociants du roi bénéficiaient de la confiance pleine et entière du souverain. Dans l'ouvrage collectif sous la responsabilité d'Ezra Mendelsohn, ]ews and the state, Daniel Schroeter fait état du message envoyé par le sultan Moulay Slimane au gouverneur de Mogador à propos du négociant Meir Macnin dont le titre officiel était Consul et ambassadeur du sultan auprès des puissances chrétiennes : « Tu veilleras a ce que le marchand fils de Macnin jouisse de sa position de traitement preferentiel sur tous les dhimmis, de façon à ce qu'il puisse accomplir sa mission au service chérifien. Accorde-lui tout ce qui lui est nécessaire et ne laisse personne l'humilier.» Le sultan Abderrahmane proclama un edit soulignant la contribution de Jacob et Abraham Corcos au trésor marocain. Toutefois, souligne Daniel Schroeter, l'amitié des souverains envers les négociants juifs n'était pas fondée sur leur rentabilité au trésor marocain. Les descendants de Macnin perçurent une pension royale en souvenir de leur ancêtre. Tout au long du XIXe siècle et au début du XXe, les souverains entretinrent avec les Corcos des relations d'amitié. Ces derniers agirent souvent comme confidents et conseillers. Il semble bien  que cette confiance ait été également partagée avec de nombreux autres notables dont les Toujar Al-Soultane, les Négociants du roi de Mogador. Ces derniers étaient en charge du commerce portuaire par lequel transitaient les marchandises du Sud Marocain et de l'Afrique noire avec l'Europe et principalement l'Angleterre. Ces négociants du roi constituaient une minorité anglicisée.

TÉMOIGNAGES SUR LA CONDITION DES JUIFS AU MAROC

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TÉMOIGNAGES SUR LA CONDITION DES JUIFS AU MAROC

Évoquons le statut de dhimmi qui fut celui des Juifs et des Chrétiens au Maroc

Le statut des Juifs et des Chrétiens est régi par le Pacte d'Omar : Ces Peuples du livre ont droit de cité à la condition de payer une taxe spéciale : la jiziya. Leur témoignage n'est pas valide par-devant les cours de justice musulmanes. Ils doivent porter des vêtements spéciaux et se déchausser en passant devant une mosquée. Enfin, ils doivent faire preuve d'un grand respect envers les Musulmans. Il faut noter que la taxe spéciale doit être payée en faisant preuve d'humilité, ce qui s'est historiquement traduit par une gifle donnée au représentant de la communauté juive alors qu'il en remettait le montant. L'orientaliste Bernard Lewis rapporte dans son ouvrage The Jews of Islam l'opinion d'un juriste médiéval sur la jiziya : « Quand le dhimmi paye, il doit être debout alors que le percepteur est assis. Le collecteur doit le saisir par la peau du cou, le secouer et lui dire: « Paye la Jiziya ! » et quand il paye il doit être giflé.» Par ailleurs, durant les fêtes musulmanes, les communautés juives offraient des présents de très grande valeur au monarque. Les Juifs étaient cantonnés dans des quartiers spéciaux : les Mellahs. Ils y vivaient dans une densité inouïe : Dans L'histoire des Juifs d'Afrique du Nord, André Chouraqui précise qu'encore en 1940, la densité de la population par kilomètre carré s'élevait à 215 000 à Casablanca, 128 000 à Marrakech, 110 000 à Fès, 62 000 à Mogador etc. Les Juifs ne pouvaient pas, en théorie, posséder de terres hors du Mellah. Il arrivait que les Juifs fussent contraints de rester enfermés au Mellah jusqu'à paiement de la totalité de la jiziya

À titre indicatif, en 1847, la jiziya en francs français de l'époque s'élevait à 10 000 francs à Mogador, 25 000 francs à Meknès, 9 000 francs à Tétouan, 15 000 francs à Meknès, 12 000 francs à Marrakech, 15 000 Francs à Salé, 5 000 francs à Tanger, etc

De façon générale, les conditions de vie pouvaient varier. Les Juifs de cour jouissaient d'un statut particulier mais devaient malgré tout porter une attention extrême, car l'attitude du souverain envers eux pouvait changer suite à un simple caprice. Le petit peuple pouvait être soumis à des vexations et des razzias. De façon générale, les périodes de désordres politiques se sont souvent accompagnées de persécutions : il en allait unsi lors de la mort d'un souverain, par exemple. Toutefois et genéralement parlant, le mode de vie commun aux Musulmans et aux _Juifs a permis de tisser malgré tout des liens durables qui furent soumis  l'épreuve de façon intermittente

Comment ces limitations se traduisaient-elles en pratique ?

Les voyageurs qui traversaient le Maroc étaient offusqués par la condition des Juifs. Il y aurait de quoi remplir un ouvrage entier de descriptions horrifiantes. Il faut prendre en considération que les voyageurs européens avaient tendance à mettre en évidence une image negative des pays non chrétiens et que certains reportaient peut-être l'image des Juifs de leur pays sur celle des Juifs du Maroc. Il n'en demeure pas moins que la description qu'on en fit en différentes epoques et émanant de voyageurs de nationalités diverses, montre des constantes reflétant un état des choses alarmant: au XVIIe siècle, Germain Mouette qui passa onze ans au Maroc, écrivit : « Les Juifs sont grand nombre dans la Barbarie, et n'y sont pas plus estimés qu' ailleurs; au contraire, s'il y a quelques immondices à jeter dehors, ils y Sont les premiers employés. Ils sont obligés de travailler de leurs métiers pour leur nourriture seulement, et sujets à souffrir les coups et les injures de tout le monde, sans oser dire une parole à un enfant de six ans qui leur jettera quelques pierres.» Toutefois, vus de l'intérieur, leur portrait est tout autre. Dans l'ouvrage The present state of the Jews in Barbary publié en 1675, Lancelot Addison qui fut l'aumônier de la garnison britannique a Tanger observait que « la condition des Juifs du Maroc n'était rien d'autre qu'une meilleure forme d'esclavage… Leur conduite est droite, conforme aux lois d'une vie très civilisée. On ne peut leur reprocher aucune des débauches qui ont si grande réputation parmi toutes les nations chrétiennes, en scandale et en contradiction avec leur nom et leur profession, fornication, adultère, ivrognerie, gloutonnerie, vanité, sont si loin d'être leur lot, que leur pratique, fréquente parmi les Chrétiens, les scandalise

TÉMOIGNAGES SUR LA CONDITION DES JUIFS AU MAROC

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TÉMOIGNAGES SUR LA CONDITION DES JUIFS AU MAROC

Évoquons le statut de dhimmi qui fut celui des Juifs et des Chrétiens au Maroc

Georg Hast occupa la fonction de vice-consul du Danemark à Mogador. Il vécut au Maroc de 1760 à 1767 et rédigea ses mémoires dans 1 ouvrage Nachrichten von Marokos und Fes : « Il est certain que les Juifs, extrêmement nombreux et répandus même dans les vallées du Mont Atlas, sont traités avec l'inhumanité la plus révoltante. Leur situation civile et morale est un phénomène très singulier. D'un côté, leur industrie, leur adresse, leur connaissance les rendent maîtres du commerce et des manufactures; ils dirigent la monnaie royale, perçoivent les droits d'entrée et de sortie, et servent comme interprètes et comme chargés d'affaires; d'un autre côté, ils sont soumis aux vexations les plus odieuses, et même aux traitements les plus épouvantables. Il leur est interdit d'écrire en arabe et même de connaître les caractères arabes, attendu qu'ils ne sont pas dignes d'écrire le Coran. Leurs femmes ont ordre de ne point porter des habits verts et doivent se voiler le visage qu'à demi. Un Maure entre librement dans les synagogues et peut aller jusqu'à maltraiter les rabbins même. Les Juifs ne peuvent pas passer devant une mosquée autrement que nu-pieds. Ils sont tenus d'ôter leurs pantoufles alors qu'ils en sont encore loin. Ils ne doivent pas monter à cheval ni s'asseoir même les jambes en tailleur en présence des Maures occupant un certain rang dans la hiérarchie. Souvent, les Juifs sont attaqués par des polissons lors de promenades publiques; on les couvre de boue, on leur crache au visage, on les assomme de coups; ils sont forcés de dire sidi ou seigneur à celui-là même qui vient de les outrager. Si le Juif, pour se défendre, lève la main contre un Maure, il encourt le risque d'être condamné à mort

Le colonel anglais Maurice Keatinge rapporta dans Travels in Europe and Africa ce témoignage du voyage qu'il fit en 1785 : » Si un Maure entre dans une maison de Juif, trouble sa famille, insulte sa femme, le Juif n'ose murmurer. Un Maure peut battre un Juif aussi longtemps que cela lui fait plaisir. » En 1801, le médecin anglais William Lemprière rapporta en 1801 dans l'ouvrage Voyage dans l'Empire du Maroc : « Malgré tous les services qu'ils rendent aux Maures, ils en sont traités avec plus de dédain qu'ils ne le feraient à des animaux. J'en ai vu battre au point de me faire craindre qu'ils ne périssent sous les coups. Les plaintes de ces malheureux étaient inutiles, ils n'obtenaient aucune justice

Au début du XIXe siècle, le voyageur Ali Bey écrivit : « Les Juifs du Royaume du Maroc vivent dans l'esclavage le plus affreux… Si le Juif a tort, le Maure se rend justice lui-même; et si le Juif a raison, s'il va se plaindre au juge, celui-ci penche toujours du côté musulman. Cette horrible inégalité de droit… remonte jusqu'au berceau; en sorte qu'un très jeune Musulman insulte et frappe un Juif, quelque soit son âge et ses infirmités, sans que celui-ci ait pour ainsi dire le droit de se plaindre, et encore moins celui de se défendre. Les enfants des deux religions ont parmi eux la même inégalité, en sorte que j'ai vu mille fois des enfants musulmans frapper des enfants juifs, sans que ceux-ci ne fissent jamais le plus léger acte de défense… S'ils rencontrent un Musulman d'un rang élevé, ils doivent se précipiter à une certaine distance sur la gauche du chemin du Musulman, laisser à terre leurs sandales à la distance d'un pas ou deux, et se mettre en humble posture, le corps entièrement courbé en avant, jusqu'à ce que le musulman ait passé et qu'il soit déjà à une grande distance. S'ils ne se soumettent pas sur le champ à cette mesure humiliante… ils sont punis sévèrement. J'ai plusieurs fois été obligé de retenir mes soldats et mes domestiques, qui se jetaient sur ces malheureux pour les frapper, quand ils n'étaient pas assez lestes et qu'ils avaient tardé à se mettre dans l'attitude prescrite par le despotisme musulman. Malgré cela, les Juifs font un commerce assez considérable au Maroc; et à plusieurs reprises, ils ont pris les douanes à ferme. Mais il arrive presque toujours qu'ils finissent par être pillés, soit par les Maures, soit par le gouvernement.» Le sultan Moulay Slimane exempta les femmes juives de se déchausser devant les mosquées, car « cela était indécent et la vue de leurs mollets pouvait distraire les dévots

Temoinages sur la condition des Juifs au Maroc

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David Bensoussan

Temoinages sur la condition des Juifs au Maroc

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Dans une lettre adressée au consul de France à Tanger en 1841, le sultan Abderrahmane caractérisa en ces termes le statut traditionnel des juifs  Notre foi glorieuse ne leur permet que des signes de bassesse et de dégradation. Aussi, le simple fait qu'un Juif élève sa voix contre un Musulman constitue une violation des conditions de protection

Dans l'ouvrage Le Maroc et ses tribus nomades paru en 1844, John Drummond Hay décrivit ainsi la condition des Juifs : « L'existence des "Juifs, est là, comme partout, un mystère. En butte aux plus ignominieux traitements dans tout l'Empire, plus ménagés, peut-être, par les habitants du Rif et par certaines tribus des montagnes qui tolèrent leur présence… Quoique les Juifs de cette contrée soient gouvernés par des despotes mahométans avec la dernière tyrannie et la plus criante injustice, l'on comprend bien de quelle importance ils sont pour la rrospérité de l'Etat.» Il ajouta en regard des processions de la secte des Aïssawas : « Lorsque les Aïssawas sont plongés dans l'ivresse que provoque cet excitant, plus violent que l'opium, ils parcourent les rues, enchaînés deux à deux et précédés de leur chef à cheval. Ils poussent les plus horribles hurlements, font les plus terribles sauts, et si les spectateurs leur jettent un mouton vivant, il est à l'instant même dévoré nu, tête, chair, entailles et tout. Si ces malheureux parviennent à briser les chaînes qui les retiennent, ils se jettent sur les Juifs, les Chrétiens, vaquant de préférence ceux qui portent des vêtements bruns ou noir couleur imposée aux Juifs et que les Maures ne peuvent souffrir); ils mordent, égratignent, dévorent tout ce qui se trouve à leur portée

Narcisse Cotte, attaché au consulat de France à Tanger, écrivit en 1857 dans La revue contemporaine: «Les Juifs, au Maroc, sont rangés rarmi les animaux immondes… La tolérance des princes musulmans consiste à laisser vivre les Juifs comme on laisse vivre un troupeau d'animaux utiles… Le fardeau de leur servitude est tel, que j'imagine à reine comment cette race étonnante peut le porter sans perdre jusqu'au souvenir de la foi antique qui leur vaut tant de persécutions

L'abbé Léon Goddard écrivit en 1858 dans l'ouvrage Le Maroc, notes d'un voyageur, 1858-59 : « On dit qu'à Rome ils (les Juifs) ne passent jamais sous l'Arc de Triomphe de Titus, mais, s'ils gardaient de pareilles rancunes en pays musulmans, je ne sais quels chemins ils devraient prendre

Dans L'Espagne et le Maroc en 1860, Achille Etienne Fillias écrivit : « Leur situation (des Juifs) est intolérable; il n'est point de pays au monde où ils soient plus maltraités que dans l’empire des Chérifs. La nomenclature des avanies qu'ils ont à subir serait trop longue à dresser… Les Juifs sont parqués hors de la ville, comme un bétail immonde; tous, depuis l'enfant au berceau jusqu'au vieillard, paient un droit de capitation fixé à huit francs par personne. Les riches paient pour les pauvres. On leur accorde huit jours pour acquitter l'impôt. Ce délai passé, le quartier qu'ils habitent (le Mellah) est mis au pillage. En dehors du Mellah, ils ne peuvent ni cultiver ni posséder d'immeubles; défense leur est faite de monter à cheval en ville ou en vue d'une ville; une ordonnance spéciale et rigoureusement observée règle la forme et la couleur de leurs vêtements. Lorsqu'ils passent devant une mosquée, devant le tombeau d'un marabout ou devant la demeure de certains personnages, ils sont tenus de quitter leurs chaussures et de marcher pieds nus… Leurs morts sont enterrés sans pompe : on les porte en courant au cimetière… Ainsi vivent les Juifs: rançonnés, battus, conspués à toute heure et par tous, mais opposant au mépris dont on les accable une indifférence stoïque, souriant à l'injure, courbant l'échiné sous la trique du Maure… Les Juifs de Tanger vivent dans l'état d'esclavage des plus affreux : ils n'ont pas de quartier séparé, comme dans toutes les autres villes barbaresques et cette circonstance est pour eux une cause de vexations continuelles de la part des autres classes de la population musulmane. Il n'est sorte d'humiliations qu'on ne leur fasse endurer… dans toutes les contestations et les querelles qu'ils ont avec les Maures, ils sont toujours condamnés et battus, quelle que soit la justice de leurs réclamations. Ainsi, pour se soustraire à cet état d'oppression, souvent intolérable, la plupart se font attacher en guise de domestiques aux consulats européens, qui seuls ont le pouvoir de les protéger

?Comment les Juifs ont-ils pu survivre dans de telles conditions

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En 1900, Victor Collin rapporta ce qui suivit dans Le Maroc et les intérêts belges : « Les Juifs sont les parias du pays. Honnis, pourchassés, parqués dans des ghettos, mis au ban, comme des animaux impurs, de certains endroits réputés saints, pressurés par le fisc, volés par les fonctionnaires, persécutés par la justice, ou plutôt l'injustice des cadis, ils n'en sont pas moins parvenus à monopoliser tout le commerce de l'intérieur… Il va sans dire que les Juifs sont fréquemment dévalisés et assassinés, malgré toutes les précautions qu'ils prennent…, dont, à force d'humiliations, ils sont parvenus à s'entourer.»

En 1902, Frances Macnab auteur de A ride in Barbary notait : « Le Juif de Barbarie ne combattra pas, il n'a pas suffisamment de fierté pour la décence, et ses nerfs sont simplement atrophiés…»

En regard de la condition des Juifs marocains, Edmond Doutte ecrivait en 1914 dans Mission au Maroc : « On reste confondu que sous une pareille tyrannie, un peuple ait pu conserver intacte la foi qui lui alait ce martyre. On conçoit encore la haine inspirée aux vainqueurs par la résistance de ces malheureux et les massacres périodiques qui les décimaient. » Henri de la Martinière écrivait en 1918 : « Les malheureux habitants (juifs) offraient de nombreux stigmates de dégénérescence et de cruelles maladies… De notre époque, les Juifs étaient obligés de marcher pieds nus dès qu'ils sortaient de leur quartier. On les voyait enlever leurs babouches noires (en dehors du Mellah) par distinction de celles des Musulmans qui seuls avaient le privilège de les porter jaunes…»

Le témoignage de Salomon Haï Knafo de Mogador (1905-1995) dont les mémoires retranscrites dans la revue israélienne Brit en 2009, traitent du statut de dhimmi en ces termes : « Les Arabes nous qualifiaient de dhimmi. C'est un mot qui n'a ni traduction ni équivalent dans la langue -française. C'est un état qui va de l'état d'esclave à celui de protégé, de tolere. Les Arabes voulaient bien jouir des bienfaits que nous leur procurions, mais cela ne les empêchait pas de nous considérer comme inférieurs.»

Comment les Juifs ont-ils pu survivre dans de telles conditions?

En acceptant l'humiliation et peut-être en rusant, en rusant enorormément, au pont même qu'on fit une légende de sa ruse. Dans In Morocco publié en 1920, Edith Wharton écrivit : « Nulle part ailleurs ne vivent-ils (les Juifs) dans des conditions de promiscuité aussi demoralisante que dans certaines villes du Maroc. Ils ont fait si longtemps l'objet d'extorsions sans réserve de la part des Musulmans que même les Juifs nantis (qui sont nombreux) ont sombré dans les habitudes et l'apparence des plus pauvres.» Dans l'ouvrage d'ethnographie de Joseph Goulven Les Mellahs de Rabat-Salé, qui étudie de bien plus près la condition des Juifs, l'aumônier militaire Farb décrivit ainsi les Mellahs : « Dans ces milieux ouvriers, la misère est effroyable, physique, psychologique et morale. Ce sont des déchets d'humanité que l'on rencontre dans l'enceinte comprimée, étouffante, ou végètent et pullulent 15 000 âmes.» Les mendiants étaient fort nombreux. Farb ajoutait : « Derrière la légende du Juif marocain exploiteur et trafiquant, il faut voir la vérité… La richesse des Juifs marocains, c'est là encore une légende qui s'évanouit lorsqu'on regarde la réalité en face… Les quelques Juifs riches, affichant leur richesse dans leur besoin de paraître, ne constituent qu'une brillante façade derrière laquelle s'agite la plus pitoyable souffrance humaine qui existe.»

? Comment les Juifs ont-ils pu survivre dans de telles conditions

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Le vicomte Charles de Foucauld qui a traversé le Maroc déguisé en Juif, ne s'attendrissait guère sur leur condition lorsqu'il écrivait dans Reconnaissance au Maroc : « Sans sécurité, ni pour les personnes ni pour les biens, ils (les Juifs de Bled es-Siba) sont les plus malheureux des hommes. Paresseux, avares, gourmands, ivrognes, menteurs, voleurs, haineux surtout sans foi ni bonté, ils ont tous les vices des Juifs de Bled Al-Makhzen, moins leur lâcheté. Les périls qui les menacent à toute heure leur ont donné une énergie de caractère inconnue à ceux-ci et qui dégénère parfois en sauvagerie sanguinaire… J'écris des Juifs du Maroc moins de mal que je n'en pense; parler d'eux favorablement serait altérer la vérité; mes observations s'appliquent à la masse du peuple : dans le mal général, il existe d'heureuses exceptions, mais ces modèles sont rares et on les imite peu

En 1892, l'écrivain britannique Budgett Meakin décrivit en ces termes la condition des Juifs de l'intérieur – et non ceux des familles marchandes des grands ports : « Depuis le jour de sa naissance jusqu'au jour ou la trace de sa dernière demeure a disparu, l'Hébreu du Maroc est méprisé et avili

Dans son ouvrage Travels in North Africa publié en 1927, Nahum Slouchz dépeignit la vie des Juifs montagnards de l'Atlas : « A Tasemsit… le bonheur et le confort ne valaient que pour le Musulman. Le Juif devait se contenter d'une misérable hutte et de guenilles, tout en étant soumis à toutes les humiliations que la malveillance et la méchanceté du Musulman parviennent à concevoir  Les Juifs étaient soumis à des extorsions et des exigences sans nom… Ainsi, lorsque le caïd d'Unila exigea un paiement important que les Juifs ne furent pas à même de percevoir, toute la population juive, incluant femmes, enfants et rabbins, furent envoyés couper du bois dans les forêts… A Tililit, tout ce que le Juif possédait appartenait au caïd qui avait droit de vie ou de mort sur ses sujets. Il pouvait les mettre à mort sans que pour autant il n'en soit châtié. Il pouvait s'il le désirait, les vendre même.» De bien plus d'une manière, le caïd était tout puissant envers ses sujets qu'ils soient Juifs ou Musulmans. Mais, ajouta Slouchz, « le plus méchant et le plus insignifiant des nègres traite le Juif comme s'il était un paria

Ajoutons toutefois que l'écrasante majorité des voyageurs admiraient la beauté des femmes juives. Même ceux qui avaient des idées préconçues sur les Juifs étaient tentés de dire, tout comme les officiers d'Holopherne dans le Livre de Judith : « Comment mépriser le peuple des Hébreux dont les femmes sont si belles 

La survie des Juifs du Maroc demeure un mystère. Il aurait suffi d'émettre une simple formule de foi pour devenir musulman et quitter l'opprobre. Il y eut des périodes de famine durant lesquelles les Juifs affamés furent incités à se convertir à l'islam en échange d'un morceau de pain. Durant la crise de famine de 1606, il y eut 2 000 apostasies; de même, en 1723, il y eut 1 000 apostasies. Il aura fallu une foi et une patience à toute épreuve pour espérer qu'un jour, la Rédemption viendrait pour continuer à vivre conformément aux Écritures hébraïques dans l'attente de la venue des temps messianiques. Dans son quartier, le Mellah, le Juif retrouvait toute sa dignité et baignait dans une vie culturelle et spirituelle riches. Pourtant, la surpopulation était grande et l' autorisation d'agrandir le Mellah était loin d'être automatique. Même la permission de construire un bain public dans le Mellah de Fès en 1837 et en 1898 fut refusée afin de maintenir un certain état d'infériorité. La Revue du monde musulman du mois de septembre 1909 contient une analyse des réponses des hommes de religion musulmane portant sur cette question, analyse fort révélatrice de leur état d'esprit

? Dans ce contexte, la situation des Juifs était-elle vivable

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 Dans ce contexte, la situation des Juifs était-elle vivable ?

Albert Memmi a écrit dans son ouvrage Juifs et Arabes : « La fameuse vie idyllique des Juifs dans les pays arabes, c'est un mythe !… Les communautés juives vivaient dans les ténèbres de l'histoire, l'arbitraire et la peur, sous des monarques tout-puissants, dont les décisions ne couvaient ni être abolies, ni être discutées… Jamais, je dis bien jamais – à rart deux ou trois époques circonstancielles, comme la période andalouse et encore – les Juifs n'ont vécu en pays arabe autrement qu'en diminués, exposés et périodiquement assommés, massacrés, pour qu'ils îe souviennent bien de leur condition

Faisons appel à deux citations que Joseph Tolédano a placées côte à cote dans son ouvrage L'Esprit du Mellah : celle d'André Chouraqui qui affirme que « Les Juifs furent en définitive plus heureux en terre d'Islam qu'en Europe » et celle du rabbin Habib Tolédano (XVIIIe siècle) pour lequel « L'exil est partout pénible, mais au Maroc, sept fois plus.» La complexité des relations judéo-musulmanes au Maroc est décrite dans le chapitre intitulé Eux et nous de L'Esprit du Mellah. Revenons à André Zhouraqui : Dans La saga des Juifs d'Afrique du Nord, il clarifie sa pensée : « Le plus souvent, le Juif était considéré non pas comme un étranger ennemi, mais comme un protégé méprisé et qui devait racheter son mépris par des fonctions indispensables qu'il remplissait dans la Cité musulmane. Si bien que les humiliations de la condition de dhimmi, la gifle annuelle qui accompagne la remise au caïd de la jiziya, les injures habituelles, les coups récoltés au passage, les bousculades, toute honte bue sont admis comme des réalités courantes dont on souffre à peine.» Tout est là : l'humiliation de la part de l'autre et l'humiliation institutionnalisée furent peut-être des réalités courantes auxquelles on feignit de s'habituer… tant qu'il n'y eut pas d'autre choix 

  Y a-t-il eu une botte secrète à la survivance juive ?

Encore une fois, les historiens ne peuvent expliquer la survivance du peuple juif au travers des âges et des continents. La condition de bouc émissaire de service n'a pas réussi à éteindre la flamme qui l'anime et il a su trouver des réponses à l'essentialité, réponses qui l'ont aidé à transcender une réalité douloureuse. Des réponses ont été trouvées dans l'exégèse qui, avec la création artistique, ont su faire vibrer les fibres de l'âme et faire résonner l'être dans la plénitude et la sérénité. À ce titre, les soirées nocturnes liturgiques des baqashot ont constitué une des facettes diamantées de l'élévation spirituelle. Le Juif a maintenu une aura qui a fait maintenir le respect auprès des autres. En dépit de tout. Qu'importent les ténèbres de la nuit? Le Juif invoque les lendemains qui chantent en joignant le psalmiste (57-9) : « Réveille-toi, ô mon âme, Réveillez-vous, ô luth et harpe, Je veux réveiller l'aurore

Après la description des massacres qui se tinrent en 1790 du temps de Moulay Yazid, le poète David Hassine dont l'œuvre Tehila LeDavid a été étudiée et traduite par Ephraïm Hazan et André Elbaz, concluait ainsi son poème : « Nous avons vu les tourments qui précèdent l'ère messianique, mais le Messie ne s'est pas empressé de venir à nous. Nous l'avons entendu tous les jours, avec amour, avec passion. Souviens-toi Dieu ! N'oublie pas ton alliance ! Sauve, sauve Ton peuple !… Que le Saint d'Israël, notre soutien, nous envoie Son Messie sans délai ! Les justes verront et se réjouiront, et les pervers auront la bouche close.»

LES MELLAHS

De quand datent les Mellahs ?

En 1276, le sultan mérinide Yakoub Ben Youssouf intervint personnellement pour faire cesser le massacre des Juifs de Fès qui fut déclenché par la rumeur selon laquelle un Juif aurait agi de façon incorrecte envers une Musulmane. Ce fut en 1438 que les Juifs furent transférés dans un quartier spécial près du palais royal, suite à des émeutes imputables à la rumeur selon laquelle les Juifs auraient versé du vin dans les lampes d'une mosquée. D'autres Mellahs furent construits à Marrakech en 1557 et à Meknès en 1682. Aux premiers symptômes de troubles ou d'instabilité politique, les Juifs se hâtaient de regagner le mellah et de s'y barricader.

Les Mellahs protégeaient donc la population juive en cas de debordements de la populace…

Ce fut le cas au tout début. Par la suite, les Mellahs furent créés pour assurer la ségrégation des Juifs plutôt que leur protection. Ainsi, Moulay romane obligea les Juifs des ports à vivre dans un quartier spécial. Les Juifs avaient des contacts commerciaux avec les Européens. Or, le souverain redoutait que de tels contacts avec des Infidèles ne finissent par influencer des Musulmans et par les éloigner de leur religion. Entre 1805 et 1808, des Mellahs furent créés à Mogador, à Tétouan, à Rabat et à Salé. Lorsque le Mellah de Mogador fut construit une quinzaine d'années plus tard, l'accès à partir du quartier musulman de la Médina se faisant par le biais d'une rue en Vé de façon à ce qu'en cas de razzia, les . ooquants ne puissent y pénétrer qu'un ou deux à la fois

Que sait-on sur la vie au Mellah

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David Bensoussan

Que sait-on sur la vie au Mellah

Plusieurs fois dans l'histoire, la demande d'augmentation du territoire du Mellah fut refusée. L'encombrement était extrême, les melles étroites et les maisons surélevées. Il y a régné des conditions de prorniscuité qui ont effaré les visiteurs venus d'Europe. Rares sont ceux qui ont voulu dépasser la visite superficielle de ces lieux. Joseph Goulven a transcrit ses observations durant les années 1913 à 1920 dans l'ouvrage Les Mellahs de Rabat-Salé. Joseph Benesh a tenté d'aller plus loin dans son ouvrage Essai d'explication d'un Mellah en 1949. D'autres visiteurs et ethnologues furent complètement ignorants de la richesse intelectuelle qui sommeillait au sein de cette communauté condamnée à l'exeguite. Ainsi, l'ouvrage de l'historien et fondateur de La revue de 1' occident musulman Roger Le Tourneau intitulé La vie quotidienne à Fès en 1900 se targue de décrire dans le détail les multiples facettes de la ville Fès. Toutefois, il fait abstraction de toute une génération d'illustres irudits juifs qui ont rayonné dans la capitale intellectuelle du Maroc. C' est d'ailleurs le cas de l'écrasante majorité des témoins européens qui n'ont pas eu la moindre idée de la puissance et de la vitalité intellectuelles du judaïsme marocain. Une étude fondée sur des sources documentaires a été faite dans l'œuvre de Shlomo Deshen Les gens du mellah. Elle donne une image assez précise de la gestion des structures communautaires et du vécu des Juifs au Mellah

On est tenté de dire que les yeux de l'étranger voient plus clair. Il faut. pour pouvoir apprécier les témoignages des voyageurs européens a leur juste valeur, retenir ceux qui ont pu pénétrer l'intimité des mellahs et connu leurs intérieurs ainsi que la joie de vivre d'une vie agrémentée de fêtes religieuses et de fêtes familiales. La perspective devient tout autre et l'on ne peut que s'étonner de l'entraide communautaire et de la survivance des traditions en dépit des conditions matérielles extrêmement difficiles et du sentiment d'insécurité qui régnait en dehors des murailles du Mellah

Que signifie le terme Mellah

Ce terme qui signifie sel, se référerait à la corvée imposée aux Juifs de saler les têtes décapitées par les Musulmans

Le rabbin Yossef Ben Naïm qui passa sa vie à collecter les manuscrits disséminés au Maroc et qui retraça la biographie des principaux rabbins du Maroc dans Séfer Malké Rabanan, rapporta : « Si je devais conter les abus contre les Juifs du Maroc, tous les parchemins n'y suffiraient pas. Ainsi, quand le sultan livrait bataille à une tribu en révolte contre ses ordres, les prisonniers que les soldats attrapaient étaient décapités et les têtes étaient amenées à une rue connue dans la ville pour y être accrochées deux ou trois jours à titre d'exemple. L'accrochage des têtes était confié à des Juifs pour humilier les défunts en cela qu'ils ont été accrochés par des personnes abjectes (les Juifs). Il y a également une coutume à confier aux Juifs le soin de traîner les charognes à leur lieu d'enterrement, car les goyim ne trouvent pas honorable que l'animal soit enseveli de leurs mains.    Que Dieu mette fin à la déchéance d'Israël

?À quand remontent les témoignages sur les razzias antijuives lors de la mort du souverain

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MORT DES MONARQUES ET RAZZIAS

?À quand remontent les témoignages sur les razzias antijuives lors de la mort du souverain

Le décès d'un souverain déclenchait souvent des émeutes et des pillages. Les témoignages à cet effet se trouvent tant dans les chroniques rabbiniques tout comme celles de Fès et de Meknès. Ils se trouvent aussi dans les descriptions de voyageurs. Ainsi, à la fin du XVIIIe siècle, le voyageur italien Romanelli auteur de Massa Be'arav raconte comment les Juifs de Mogador terrifiés s'enfermèrent à double tour, les armes à la main (il n'y avait pas encore de mellah dans la ville). Il demanda ce dont il retournait et on lui répondit : « Le souverain est décédé… Dans nos contrées de Berbérie, à l'annonce de la mort du souverain, le pillage et la rapine font loi. Ils (les envahisseurs) cherchent à tuer et font comme bon leur semble. Les femmes et les vierges sont violentées, les brigands s'en prennent aux passants, les vivres ne circulent plus et la famine règne. Et si vous demandez : « Jusqu'à quand? » Jusqu'à ce que les villes soient ruinées par la guerre et par la famine et jusqu'à ce qu'ils soient arrêtés par la force quand un des fils du sultan prendra le pouvoir et régnera d'une main de fer… Dieu nous protège et nous prenne en pitié 

  1. Aaron Bensimon qui anima la société Hévrat Dovévé Sifté Yésharim dont la vocation était de publier et de diffuser les écrits inédits du judaisme marocain écrivit en 1903 dans la préface de l'ouvrage Michpat outsedaka Beya'akov du rabbin Jacob Aben Tsour : « La sécurité de la vie et des biens, l'honneur, toutes les acquisitions et les valeurs de la société humaine, tout cela tient au Maroc, à un fil plus fin que celui d'une toile d'araignée… Partout ailleurs, à la mort d'un monarque, l'héritier presomptif ou tout autre prince digne de monter sur le trône, est couronné dans la joie et l'allégresse. Et l'avènement du nouveau roi s'acompagne de fêtes populaires. Au Maroc, dès que se répand la nouvelle de la maladie ou de la mort du souverain régnant, c'est la revolution; les institutions sont ébranlées. Les tribus berbères, sauvages et cruelles s'insurgent, coupent les routes, font des incursions dans les villes, pillent, assassinent… C'est ce qui arriva à la mort du roi pieux et misericordieux, Moulay Hassan… Pour notre malheur et notre détresse, qui_pensez-vous en fut la victime toute désignée, sinon Israël, le bouc emissaure perpétuel? Dans les villes et les villages, les populations juives furent pillées, les vierges volées, les hommes et les femmes massacrés en grand nombre

?Cela se perpétua-t-il tout le temps

Ajoutons que le réflexe qui consistait à se barricader au moindre signe d'instabilité se perpétua jusqu'au milieu du XXe siècle. Ainsi, beaucoup de jeunes ne comprirent pourquoi, à l'annonce de la mort du roi Mohamed V en 1961, leurs parents cloîtrèrent leur famille dans les maisons et fermèrent les volets. Il ne se produisit rien de fâcheux, mais le reflexe était là.

De fait, lorsque l'autorité gouvernementale était faible, les massacres et les pillages des communautés juives se déclenchaient. A titre indicatif, c'est ce qui se passa lors du bombardement de Mogador en 1844, lors de la chute de Tétouan en 1860, du bombardement de Casablanca en 1907 et meme, dans une moindre mesure, lors du débarquement américain à Casablanca en 1942. Il va sans dire que les scènes de pillage ne se limitèrent pas aux seuls quartiers juifs. Toutefois, comme le soulignait le chroniqueur Al-Naçiri à propos du bombardement de Mogador, « Les Juifs d'abord, les autres ensuite

Quelques mots sur le culte des saints des Juifs maghrébins

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LE CULTE DES SAINTS

Quelques mots sur le culte des saints des Juifs maghrébins

Chaque centre citadin vénérait un saint homme dont la tombe se trouvait généralement à une certaine distance de la ville. On y allumait des bougies et priait pour la réalisation de certains vœux. Ceci donnait lieu à des pèlerinages printaniers mais aussi en toute occasion propice. Les Saints étaient invoqués en toute occasion. Beaucoup de Juifs se rendaient aux tombeaux des Saints pour émettre un vœu : guérison de maladie, arrêt de la stérilité, etc. Ces tombaux auraient appartenu à des personnes auxquelles on attribuait des miracles que ce soit de leur vivant ou que ce soit suite à un vœu exaucé suite à une imploration. Ainsi, on vénérait à Rabat Rabbi Éliezer Davila qui aurait fait retourner les vagues de l'océan lors du raz de marée de Lisbonne de 1755 en plantant son bâton dans la mer. De nombreuses guérisons miraculeuses étaient attribuées à Rabbi 'Amram Ben Diwane dans la région d'Ouezzane, à Rabbi Raphaël Enkaoua de Salé, à Rabbi Israël Abouhatsira dit Baba Salé d'Erfoud et bien d'autres encore. Les tombeaux des émissaires de Terre Sainte trouvés assassinés sur les routes devenaient aussi des lieux de pèlerinage.

D'où provient cette tradition ?

C'est peut-être une coutume berbère qui remonte au temps des tribus berbères judaïsées avant l'invasion arabe. C'est peut-être aussi une tradition locale qui est née pour « concurrencer » les marabouts musulmans auxquels la population musulmane attribuait parfois des puissances surnaturelles. Car cette coutume n'est pas propre au judaïsme, bien que le tombeau des Patriarches à Hébron, celui de Rachel à Bethlehem et celui du roi David à Jérusalem aient attiré des pèlerir_- durant les siècles d'exil. Les rabbins érudits mettaient souvent un freir aux excès que cette croyance engendrait, mais il n'en demeure pas moins qu'elle était ancrée dans les mœurs et les croyances juives, tout comme elle l'était en parallèle chez les Musulmans qui avaient aussi leurs marabouts

On dit que certains saints étaient vénérés par les Juifs et les Musulmans

Il est vrai. C'est là un signe de syncrétisme. Louis Voinot auteur de Pèlerinages juifs au Maroc a recensé en 1948 quatorze observations de saints musulmans révérés par les Juifs et cinquante cas confirmés : saints juifs invoqués par les Musulmans. Issachar Ben-Ami s'est penche sur cette question dans l'ouvrage Saint Vénération among the ]ews in Morocco. Par ailleurs, au cours des périodes de sécheresse, les musulmans attachaient beaucoup d'importance aux prières faites par les Juifs ifs et permettaient des prières conjointes

? LES EVENEMENTS DE DEMNAT Que se passa-t-il à Demnat

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Il y eut de nombreuses croyances superstitieuses

Il y avait un océan de superstitions dans le monde traditionnel. Pour éloigner les mauvais esprits, on faisait confiance à la vertu du sel ou des métaux – comme un fer à cheval en guise de porte-bonheur – placés sous l'oreiller. Ces habitudes sont tout à fait contraires à l'esprit de la Bible mais elles ont néanmoins accompagné le respect scrupuleux des ordonnances bibliques et talmudiques au sein du petit peuple. Des exemples de telles superstitions se retrouvent dans l'ouvrage de Joseph Goulven les Mellahs de Rabat-Salé ou dans celui d'Élie Malka, Essai de folklore des Israélites marocains. Les rabbins ont souvent visé à épurer le judaïsme ou à minimiser autant que faire se peut ces habitudes. L'élite rabbinique qui a laissé un immense héritage écrit dont on redécouvre l'ampleur aujourd'hui grâce par exemple à l'impression de nombreux manuscrits judéo-marocains par l'Institut Issachar à Jérusalem, a ignoré ces croyances. Les travaux d'exégèse (p. ex. Or Hahayim de R. Hayim Benattar), de mystique (p.ex. Hessed leAbraham d'Abraham Azoulay) et de jurisprudence talmudique (p. ex. Toqpo shel Yossef de R. Yossef Elmaleh), l'expression de la foi en tant que vecteur moral (p. ex. Israël et L'Humanité de R. Élie Benamozegh), la poésie liturgique (p. ex. Tehilah leDavid de R. David Hassine) ou même les travaux de philosophie (p. ex. Uns Al-Gharib (Consolation de l'expatrié) de R. Juda Ibn Nissim Ibn Malka) sont exempts de ces superstitions populaires. L'œuvre monumentale de Haïm Zafrani Les juifs du Maroc étudie de façon méthodique la littérature juridique des Juifs du Maroc et témoigne de la vitalité intellectuelle des Juifs du Maroc au cours des cinq derniers siècles. En outre, les personnalités rabbiniques furent des parangons de vertu. Leur sagesse était recherchée, leur moralité était légendaire et le public juif les avait en très haute estime. Les écrits qu'ils ont laissés font preuve d'une grande érudition et d'un bon sens éclairé.

Le culte des Saints était toléré, voire même encouragé, pour autant qu'il ait une influence morale positive. Les personnes qui allaient en pèlerinage à la tombe d'un saint avaient coutume de donner l'aumône, d'y allumer des bougies et de demander l'intercession du saint pour exaucer tous genres de vœux : de guérison ou personnels. Mais il y eut des dissidences. Le rabbin Yitshak Ben Ya'ish Halévi de Mogador n'hésita pas à secouer les fondations mêmes de la croyance populaire en s élevant contre la visite des tombeaux et des «Saints» qu'il trouvait contraire à la foi judaïque.

Dans cette ville du Sud du Maroc, la population juive fut attaquée et battue, et cela se serait produit avec l'accord du caïd local. Les représentants de la France et de l'Angleterre demandèrent au sultan la révocation de ce caïd, mais en vain. Ce dernier rétorqua que les Juifs avaient provoqué la situation, car ils auraient insulté des Musulmans et leur auraient jeté des pierres. Cette accusation semble étrange pour le moins, car elle fut faite moult fois par des Juifs qui en furent les victimes de la part des Musulmans. Drummond Hay dénonça la cruauté de ce caïd. Il dépêcha un assistant marocain du nom d'Abou Bakr pour soumettre un rapport sur l'état des choses dans la ville. Ce dernier confirma le mauvais traitement des Juifs et ajouta que la situation se serait détériorée parce que certains Juifs avaient refusé de faire des cadeaux traditionnels durant les fêtes musulmanes. L'annonce à l'effet que six Juifs auraient péri fut démentie après vérification de la part du consul français. Toutefois, les incidents ne cessèrent pas pour autant.

Les clauses de l'édit du sultan en 1884 nous renseignent sur la situation des Juifs de Demnat : « Par le présent édit, nous faisons connaître que nous avons supprimé toutes les vexations auxquelles les Juifs de Demnat ont été soumis par leur gouverneur, à savoir :

    • de les obliger à travailler le jour consacré au repos par leur religion;
    • de les occuper à nettoyer des lieux infects;
    • de leur faire porter des objets lourds sur le dos;
    • de les obliger à travailler sans rétribution;
    • de faire travailler les femmes sans le consentement des maris;
    • de céder leur marchandise pour la moitié de leur valeur;
    • de vendre des produits tels que l'huile au moment où ils sont en baisse pour se faire payer seulement au prix fort lorsqu'ils sont en hausse;
    • d’employer leurs bêtes de somme contre leur volonté et sans rétribution;
    • de les obliger à prendre de fausses pièces de monnaie contre la monnaie courante;
    • de recevoir les dirhams à raison de 13 ducas par douro;
  • de payer ensuite les douros à raison de 15 ducas;

 de leur prendre gratuitement les peaux tannées;

de les obliger à donner des peaux tannées en échange de peaux fraîches;

    • de les obliger à céder la laine de leurs troupeaux contre leur volonté;
  • de tenir leurs lits et leurs meubles à la disposition des hôtes du gouverneur…»

Un an après cet édit, la situation était encore si pénible que les rmistres de France, d'Angleterre et des États-Unis durent intervenir a. uprès du sultan. Finalement, sous la pression des légations consulaires, le sultan démit et emprisonna le caïd de Demnat et mit les Juifs de la ville sous la juridiction du caïd de Marrakech. Quelques années plus tard, les incidents reprirent et le sultan décida de faire construire un Mellah à Demnat. À la mort du sultan, le Mellah fut envahi. Deux Juifs trouvèrent la mort et plusieurs Juives furent enlevées. Une partie d'entre elles fut libérée après paiement de rançon.

Les evenements de Demnat

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David Bensoussan

Et pourtant : dans son ouvrage Reconnaissance au Maroc publié en 1883, le Vicomte Charles de Foucauld affirmait : « Demnat et Sefrou sont les deux endroits du Maroc où les Juifs sont les plus heureux…» Un lettré de la ville Mohamed Al-Ghujdami affirmait : « Les Juifs étaient, avant les bouleversements de la deuxième moitié du XXe siècle, mêlés aux Musulmans comme l'eau est mêlée au vin. » Que s'était-il donc passé?

Du temps du caïd Ali Demnati, les relations étaient excellentes. Son fils Jilali qui hérita de sa fonction était le plus gros commerçant de la région abusa de ses prérogatives, comme le montre la succession des événements suivants : En 1864, les notables de la ville demandèrent au sultan que les maisons des Juifs soient éloignées du cours d'eau alimentant la mosquée. L'année suivante, l'entrepôt de marchandise d'un commerçant juif de Mogador fut mis à feu. Les cordonniers juifs se plaignirent au sultan de ce que les cordonniers musulmans les boycottaient. A son retour d'audience, la délégation juive ne put revenir dans la ville dont l'entrée avait été bloquée par le frère de Jilali, ce qui contraignit la délégation à aller retrouver le sultan. En 1879, les Juifs de Demnat demandèrent au sultan d'instituer un tour de garde pour les protéger. La méfiance s'installa entre les communautés jusqu'à ce qu'il soit jugé nécessaire de déménager les Juifs au Mellah. Le caïd Jilali finit assassiné par un religieux musulman qui avait été emprisonné et bastonné et auquel il avait confisqué son lopin de terre. Selon Al- Ghujdami, le nouveau cheikh se tint personnellement devant la porte du Mellah pour empêcher les pillards d'y pénétrer.

On pourrait conclure de cet épisode que des mesures répressives envers les non-Musulmans pouvaient être invoquées au nom de l'islam pour pratiquer l'injustice et semer la discorde. Le bouc émissaire était tout désigné.

TÉMOIGNAGES DE L'ALLIANCE ISRAÉLITE UNIVERSELLE

Historiquement, l'Alliance intervint pour défendre les abus contre les Juifs

L'implication des écoles de l'Alliance confronta ses dirigeants à la dure réalité des injustices subies par les Juifs et l'Alliance. Ces derniers se portèrent à la défense des droits des minorités juives brimées bien avant l'avènement du Protectorat en 1912. Dans les faits, la présence de l'Alliance au Maroc remonte à 1862, date d'ouverture d'une première école à Tétouan. La mission éducatrice de l'Alliance visait à faire accéder à la culture française et à la modernité les communautés juives tout en combattant pour l'égalité des droits des minorités. Le réseau scolaire rayonna graduellement sur la quasi totalité du territoire marocain, en commençant par les grandes localités telles Tanger (1864), Mogador et Safi (1866), Larache (1873), Elksar (1879), Fès (1883), Casablanca (1897), Rabat, Mazagan, Meknès, Marrakech, Azemmour et Salé (de 1901 à 1912), puis dans des plus petites localités telles Ouezzane (1926), Ber- Rechid, Settat, Beni Mellal, Boujad (1927), Midelt (1928), Ben-Ahmed, Taroudant (1929), Demnat (1932), Kasba-Tadla (1933), Tiznit (1934), Oued-Zem, Agadir (1935), Taourirt etc. Le réseau qui comptait 5 240 étudiants en 1912, finira par en atteindre 32 000 étudiants en 1959.

L'Alliance intervint plusieurs fois en faveur des Juifs du Maroc. Dans son ouvrage L'Alliance Israélite Universelle et la renaissance juive contemporaine, André Chouraqui écrivit : « Année après année, Paris écoutait les douloureux échos des actes de cruauté qui se commettaient dans l'Empire du sultan : captifs torturés, jeunes filles enlevées, jeunes gens convertis de force, mellahs pillés, Juifs condamnés à abandonner leur résidence. » Les puissances européennes furent saisies de la nature de ces sévices afin qu'elles entreprennent des démarches diplomatiques nécessaires auprès du sultan. Ainsi, la communauté internationale qui s'émut de la situation des Juifs de Tétouan du temps de la guerre maroco-espagnole, manifesta ses préoccupations dans une note intitulée : Opinion collective des représentants des puissances étrangères au Maroc sur une mesure adoptée par le gouverneur de Tétouan vis-à- vis de certaines notabilités israélites de la ville. Conseils et vœux communiqués à ce sujet à Sidi Barguash, Ministre des Affaires étrangères du sultan.» De même, l'Alliance révéla au grand jour les injustices subies par les minorités juives du Maroc, tout comme dans le cas de Demnat.

?Les événements antijuifs de Demnat furent-ils une exception

    1. Il etait une fois le Maroc

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      David Bensoussan

    1. Les événements antijuifs de Demnat furent-ils une exception?
    1. Non, ils illustrent une condition de vie de minoritaires. La différence est que, les moyens de communication aidant, l'Occident fut au courant de ces exactions. On se souvient qu'après la visite de Sir Moses Montefiore, le sultan avait signé un dahir dans lequel il interdisait que l'on s'en prenne sans raison aux Juifs. L'euphorie qui régna dans les milieux juifs d'Angleterre fut toutefois prématurée. En effet, deux mois à peine après la promulgation du décret, le Vice-gouverneur (khalifa) de la ville de Mogador donna la bastonnade à un Juif qui ne s'était pas déchaussé en passant devant une mosquée. Un autre reçut 200 coups de bâton pour avoir osé demander à un administrateur combien il serait payé pour la confection d'un vêtement. Quand le Grand rabbin alla demander à commuer cette peine injuste, il lui fut rétorqué de ne pas insister, faute de quoi le châtiment passerait à 2000 coups de bâton. Six mois plus tard, le Juif Ben Eish mourut roué de coups pour avoir osé se plaindre au Khalifa d'avoir été l'objet d'un vol. Quarante et un petits commerçants juifs furent assassinés sur les routes de la région de Mogador entre 1865 et 1880. Ceci se passait à Mogador, ville réputée être la plus sécuritaire pour les Juifs du Maroc.
    1. Par ailleurs, les tailleurs juifs de Meknès reçurent la bastonnade pour ne pas avoir livré à temps un vêtement commandé par un haut fonctionnaire… La compilation des excès – connus – contre les Juifs ferait l'objet d'un volume en soi. Il en ressort que les protégés consulaires étaient pratiquement les seuls à pouvoir demander justice pour des méfaits commis contre eux. Les incidents qui suivent donnent une idée de leur teneur.
    1. En 1792, cinquante Juifs d'Oufrane dans le Sud marocain furent placés devant un bûcher en flammes pendant sept jours. On leur offrit le choix entre la conversion et le bûcher. Ils choisirent le bûcher.
    1. En 1811, il fut ordonné de détruire les synagogues de Meknès construites cette année-là.
    1. En 1820, le Mellah de Fès fut saccagé et des atrocités y furent commises suite à la fausse information selon laquelle le sultan Slimane était mort. Le saccage reprit de façon bien plus grave lorsqu'il mourut vraiment deux ans plus tard.
    1. En 1826, suite aux tueries de quinze des leurs, les Juifs du village d'Agouraï abandonnèrent leur village et déménagent en masse à Meknès.
    1. En 1834, un prince tomba follement amoureux d'une jeune juive tangéroise Sol Hachuel. Il se trouva deux musulmanes pour affirmer que Sol s'était converti à l'islam, ce qu'elle réfuta totalement. Elle fut emprisonnée mais refusa d'abjurer. Elle mourut décapitée sur la place publique. Des Juifs jetèrent des pièces en l'air pour pouvoir détourner l'attention de la foule et récupérer le corps avant que l'on en abuse. Sol ou Solika devint un symbole de résistance à l'oppression et sa tombe dans la ville de Fès, un lieu de pèlerinage.
    1. En 1837, les Juifs de Fès demandèrent la permission de construire un bain public dans l'enceinte du Mellah. Les oulémas consultés répondirent par la négative…
    1. En 1844, le Mellah de Mogador fut mis à sac par les tribus voisines lorsque la ville fut bombardée par la flotte française. Élie Benamozegh écrivit dans la préface de l'ouvrage d'Abraham Ben Judah Koriat Brith Avoth : « Comme les colombes des vallées, les navires français fondirent sur la ville, déversant sur elle une pluie de feu et de fer… De la campagne s'abattirent sur la cité les hordes sauvages des Bédouins semant la terreur, rançonnant, pillant et massacrant les populations juives innocentes.»
    1. Suite au départ de l'Espagne de Tétouan, conséquence de la fin de la guerre hispano-marocaine de 1860, la population musulmane s'attaqua violemment à la communauté juive de cette ville.
  1. En 1867, les Juifs de Tétouan furent attaqués par des pirates du Rif. Ces attaques se reproduisirent l'année suivante et la France et l'Angleterre intervinrent pour empêcher que la situation n’empirât. Le complice de l'assassinat de M. Pariente fut remis en liberté par le pacha, lequel interdit aux Juifs de passer par la porte qui mène au cimetière.

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