Alliance Israelite Universelle


Alliance Israelite Universelle..Joseph Chetrit..Les Juifs de Taroudant, leurs metiers et leurs saints

Brit

La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo 

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

3.1. Premier texte : metiers juifs a Taroudant

Dans ce rapport, le seul qu'elle a envoye de Taroudant meme, l'auteure decrit ou plutot evoque les metiers qui etaient pratiques par les Juifs a Taroudant. A de rares exceptions pres, ils ont ete exerces par eux probablement depuis des siecles, comme ils l'ont ete jusqu'a leur depart definitif en Israel en 1962 et 1963

La "misere noire" qu'elle decrit ne concernait cependant qu'une partie de la communaute. D'autre part, ne decrivant que ce dont elle pouvait se rendre compte directement, elle ne s'est interessee qu'aux metiers visibles ; elle ne se doutait pas des autres liens economiques qui associaient des Juifs et des Musulmans dans l'elevage du betail et dans d'autres produits agricoles.

 De meme, sa description des besognes des femmes juives ne prend pas en compte les couturieres qui travaillaient chez elles, equipees de leurs machines a coudre Singer. Par ailleurs, les effets de !'instruction moderne n'ont commence a se manifester pour quelques jeunes gens qu'apresla Seconde GuerreMondiale, quand ils ont pu acceder a des emplois de bureau en particulier.

Taroudant Mme Benozillo

Taroudant, ce 20 mars 1931

Madame Benozillo a Monsieur le President de 1'Alliance Israelite Universelle, Paris

Monsieur le President,

J'ai l'honneur de vous parler des metiers qu'exercent nos coreligionnaires de Taroudant. Dernierement, en faisant a mes eleves une lecon sur la profession de leur pere, j'ai ete frappee par les reponses tres peu variees que j'obtenais. Des mots marchand d'etoffes, marchand de sucre et de the, mercier, sellier et tamisier revenaient sans cesse au cours de ma lecon. Un peu curieuse de connaitre quels autres metiers exercent encore les Israelites de Taroudant, je suis allee cette semaine voir le souk.

La plupart des commercants et artisans juifs avaient des echoppes en dehors du mellah, dans des marches et fondouks, parmi les marchands musulmans. Seules quelques epiceries et une boucherie kasher etaient tenues au mellah meme.

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Premier texte : metiers juifs a Taroudant

 

Les Israelites eparpilles un peu partout dansla Medina(quartier indigene) ont choisi toutefois leurs boutiques dans des fondouks, dans des places a proximite du Mellah 

Les grands commercants sont des marchands d'etoffes, de sucre et de the. Ils sont installes dans un vaste fondouk. Leurs boutiques [????] sont entourees de [???]. Le client [passe?] [???]' et s'arrete, examine un article, en discute le prix ; en bas, il choisit la marchandise qui lui a paru la plus avantageuse 

Aux portes des fondouks, les merciers s'installent humblement par terre. Sur un sac de chanvre, ils etalent boites d'allumettes, echeveaux de fil, epingles, aiguilles, savons, colliers de perles, bougies, bonbons et epices. Les passants sont nombreux. Ils demandent un sou d'allumettes, deux sous de sel, cinq sous de fil. Le marchand sert ses clients avec patience. II voit avec plaisir les modestes petites pieces d'argent remplir petit a petit son ecuelle cachee sous le sac de chanvre. Pendant deux ou trois jours, il aura de quoi nourrir sa grande famille. Un sourire eclaire son visage de vieux qui incarne, avec sa barbe blanche et longue, ses cheveux ebouriffes sortant de sa calotte toute crasseuse, le type du Juif du Sous. 

 Je le regarde un bon moment. Je m'approche de lui et lui demande des bougies, il m'en tend une et me dit: "Gib tlata soldi", apporte 3 sous. II me sert avec empressement et me comble de benedictions parce que je lui en achete une dizaine a la fois. Je m'engage ensuite dans la ruelle qui conduit au Mellah. La, assis dans la poussiere, une vingtaine de savetiers travaillent au seuil de leurs boutiques tres obscures et fort petites. Certains [d'entre eux?] sont borgnes. Ils raccommodent peniblement les babouches. Ils ont pour tous instruments une grosse aiguille, une alene de [???], un couteau ou plutot un rasoir. Le cuir dont ils se servent pour les reparations n'est autre que la peau de n'importe quelle bete qu'ils ont fait secher au soleil et ensuite raclee pour en enlever les poils. Tout ce qu'il y a de plus simple, de plus primitif. Nous vivons au milieu des gens surement en arriere de quelques siecles. 

Les selliers plus loin manient leur grosse aiguille et discutent entre eux. Ils ne sont pas nombreux. II y a la des peres de famille qui travaillent a la journee pour un salaire mediocre, de pauvres malheureux comme la plupart des Juifs de Taroudant : comme ces orfevres qui s'aveuglent a graver des poignards indigenes et autres bijoux en argent ; comme ces ferblantiers qui fabriquent en serie des lanternes et des cafetieres et qui sont tres heureux lorsque la journee leur rapporte deux ou trois francs

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Les rapports trimestriels des instituteurs de l'Alliance comme source ethnographique sur le Judaisme marocain.

Les Juifs de Taroudant, leurs metiers et leurs saints

Joseph Chetrit

Premier texte : metiers juifs a Taroudant

Les femmes juives, poussees par la misere, quittent leur mellah pendant les jours de souk. Enveloppees entierement du hai'k blanc qui les distingue des mauresques, elles s'installent a l'entree d'un fondouk et attendent que les Indigenes leur proposent du travail. Elles confectionnent des djellabas et des faragias qui doivent etre rendues dans la journee meme. Elles sont pliees sur leur ouvrage. L'endroit est obscur. Et ce labeur qui est certes une des causes [des maladies] d'yeux est tres peu remunere. Parmi cette foule qui s'agite et qui travaille courageusement, on remarque avec tristesse de nombreux mendiants. De pauvres Juifs, jeunes gens ou vieillards, qui n'ont pas de metier vont de boutique en boutique, de fondouk en fondouk, en tendant la main. Ils demandent un peu de sel, un morceau de sucre, une bougie, une carotte, une pomme de terre, un sou que leurs coreligionnaires et les Arabes ne leur refusent jamais. Nous avons le grand espoir que la nouvelle generation qui frequente notre ecole saura tirer profit de l'enseignement que nous lui donnons et pourra enrayer la misere noire qui regne au Mellah.M. Benozillo

Deuxieme texte : une haute figure de Taroudant

          Rabbi David ben Baroukh Cohen Azogh, appele affectueusement Baba Doudou, est ne dans le dernier quart du XIXeme siecle dans une famille de kabbalistes, qui etaient veneres a Taroudant comme dans les autres communautes du Sous. Ils etaient consideres comme des saints et des faiseurs de miracles de leur vie comme apres leur mort. Le fondateur de la lignee fut semble-t-il le kabbaliste Rabbi Yishaq Hacohen, qui a vecu dans la seconde moitie du XVIeme siecle et au debut du XVIIeme et dont une oeuvre kabbalistique a ete recemment publiee.

L'auteure du rapport trace ici un portrait personnel emouvant de Baba Doudou, dont la belle figure et le haut prestige dont il jouissait a Taroudant l'ont profondement impressionnee. La veneration qu'on lui portait s'est accrue encore plus dans les dernieres annees de sa vie, et les ceremonies qu'il presidait etaient empreintes d'une grave solennite. Son deces le 12  mars1953  a ete ressenti comme une veritable catastrophe par les Juifs de Taroudant.

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Premier texte : metiers juifs a Taroudant

Mme Benozillo

Sale, le12  Decembre 1932

Madame Benozillo a Monsieur le President de l'Alliance Israelite I Universelle, Paris

Souvenir de Taroudant

J'ai quitte Taroudant. J'en suis heureuse. Je fremis toutes les fois que mes pensees me font revivre la vie douloureuse et primitive que j'ai vecue dans cette ville eloignee, perdue dans le Sous, au milieu des Indigenes qui m'aimaient certes beaucoup pourtant. Ce qui me revient seulement de ces annees avec un attendrissement veritable, c'est Monsieur Baba Dodou, le grand rabbin de Taroudant.

Baba Dodou est un surnom, un terme de caresse qu'a l'unanimite la population du Sous donne a un de ses fils adule. Son vrai nom est David Cohen. Baba Dodou signifie: David le cheri.

Baba Dodou est grand et beau, de caractere tres doux et d'une extreme gentillesse. II est adore a Taroudant. En le voyant passer, les Juifs s'inclinent devant lui et viennent toucher sa tunique noire qu'ils embrassent avec piete. Les Arabes le respectent et l'aiment, et les etrangers qui le connaissent l'estiment enormement. II est le petit fils de Rebbi Baruk le Saint de Taroudant, dont la tombe est un lieu de pelerinage venere pour tous les habitants du Sous. Les Roudanis racontent avec emerveillement et respect les nombreux miracles faits par Rebbi Baruk. Les Arabes emprisonnent trois Juifs, les depouillent et ils les ' maltraitent. Finalement, ils les tuent. Ils refusent de faire inhumer les cadavres qu'ils gardent avec vigilance. Rebbi Baruk intervient. Risquant ses jours, il va vers le lieu du crime, accompagne par une foule en delire. A sa seule vue, les bandits s'enfuient, disparaissent dans la montagne, les cadavres sont remis aux families.

Baba Dodou a dans sa maison une chambre qui etait celle dont se servaient son pere et son grand-pere toutes les fois qu'ils se livraient a l'etude. C'est la aussi que Baba Dodou se retire pour mediter comme l'ont deja fait ses nobles aieux. Obscure et poussiereuse, cette chambre est aussi le lieu ou les Juifs croyants, de passage a Taroudant, vont implorer le nom des grands saints qu'elle a abrites et ou encore Baba Dodou aujourd'hui, avec grace et simplicite, benit ceux qu'il aime.

Baba Dodou regoit de nombreux cadeaux. Chaque annee a Paque ou a Soucoth les Juifs d'Igly, de Ras-el-Oued, dAgadir ou de Mogador se font un devoir de lui envoyer, en temoignage de leur profond respect, des objets divers et precieux. Le puissant pacha de Taroudant, Hadj Hamed, revenant d'un voyage a Paris offre a Baba Dodou un merveilleux taleth. Baba Dodou regoit ces presents avec bonhomie et remercie avec grace.

A la porte de la maison de Baba Dodou il y a une mezouza, une mezouza vieille, une mezouza toute crasseuse. Tous les Juifs qui passent par la posent respectueusement leur main sur elle et la portent ensuite sur leur bouche. Plus d'une fois, j'ai ete tres touchee de voir aussi des enfants, tout jeunes, courir vers cette mezouza et presque automatiquement faire le meme geste que les autres personnes, embrasser pieusement la mezouza benie du Saint de la ville. Les Juifs fetent le jeune marie a cote de cette mezouza. Ils se reunissent a la porte de Baba Dodou, embrassent la mezouza, chantent et reclament leur "ange". Baba Dodou apparait, majestueux. II regarde un instant la foule, sourit, benit le marie et se retire discretement.

Baba Dodou a deux jeunes enfants qui frequentent l'ecole. Doux et polis, ces enfants se font beaucoup aimer de leurs camarades. Ceux-ci vont meme jusqu'au sacrifice pour Baba Laziz (Laziz, le cheri) ou lala Rachel (Rachel l'aimee). Je me souviens qu'un jour une faute grave avait ete commise dans la classe. J'en demandais le coupable. Je devinais, c'etait le "petit cheri". Quelle ne fut ma stupefaction de voir une petite eleve, d'ordinaire tres calme, lever le doigt, et declarer resolument etre responsable de la faute. Comme je ne me laissais pas prendre dans le piege et lui demandais le motif de son acte genereux, elle me repondit: "Je ne veux pas Laziz pleure. Baba Dodou n'a que lui". C'etait par amour, par respect pour le grand rabbin que la petite innocente prenait la place du coupable.

Pendant mes deux annees de Taroudant, j'ai beaucoup frequente la famille de Baba Dodou. Je remarquais le consentement de tous, grands et petits, riches et pauvres, a ce respect pour Baba Dodou et je m'en emerveillais. Des le commencement de mon sejour a Taroudant, j'ai devine en Baba Dodou l'homme qui domine les autres hommes, celui qu'on consulte avec deference et qu'on ecoute avec conviction. Comme les autres, j'ai appris a l'estimer et a le respecter.Signe: Benozillo

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Les rapports trimestriels des instituteurs de l'Alliance comme source ethnographique sur le Judaisme marocain.


Les Juifs de Taroudant, leurs metiers et leurs saints

Joseph Chetrit 

3.3. Troisieme texte: Une dynastie de saints 

Ce troisieme rapport concerne la lignee des saints de Taroudant et de toute la region du Sous et le pelerinage que l'auteure a effectue a Aghzou n- I Bahamou, pres d'Oulad Berrhil, qu'elle situe a Ras-al-Wad. La description qu'elle donne de l'etat du cimetiere visite et des tombes qu'il renferme est saisissante, quand on connait l'etat actuel des lieux. Toutes les tombes ont ete restaurees et blanchies a la chaux ces trente dernieres annees ; des epitaphes en marbre ont ete apposees sur les tombes de Rabbi David Ben Baroukh et de son fils Rabbi Baroukh, et un sanctuaire leur a ete reserve. De plus, un complexe hotelier offrant les meilleures commodites a ete construit dans le perimetre du cimetiere qui permet de loger confortablement les nombreuses centaines de pelerins qui viennent chaque annee en decembre a la Hiloula du saint. Tous ces travaux de renovation et d'entretien sont l'oeuvre de Baba Laziz, fils de Baba Doudou, et de ses enfants, avec a leur tete David, qui continuent de s'y investir et de diriger les ceremonies des differentes hiloulot a Mentaga (le 9 Eloul), a Aghzou n-Bahamou (les 2 et 3 Tevet) et a Taroudant (25 Adar).'

Benozillo

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La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

Benozillo

Sale, le 2 janvier 1933

A Monsieur le President de l'Alliance Israelite Universelle, Paris

Monsieur le President,

Madame Benozillo, dans son rapport de Decembre, vous a raconte brievement quelques faits de la vie du grand Rabbin de Taroudant, Rebbi David Cohen. Je me fais un devoir de vous relater le pelerinage que j'ai fait sur la tombe de son grand-père ( En fait, c'est son arriere grand père ): Rebbi David ben Baruch.

Rebbi David ben Baruch est originaire de Ras-el-oued, situe a 60 kilometres de Taroudant.c'est la que se trouve sa tombe. On y accede tres difficilement. II faut obtenir au prealable une permission des affaires Indigenes de Taroudant pour pouvoir entrer a Ras-el-oued. II faut en outre y aller un jour de souk (marche), car un service regulier n'existe pas entre Taroudant et cette ville

Le voyage en est penible. Les pistes qu'il faut traverser sont horribles,1 et la voiture met plus de trois heures pour faire le trajet. Le chauffeur me fait descendre au souk. La tombe veneree en est a 5 kilometres. Moyennant un gros fabor, un petit israelite consent a m'y conduire.

 A la vue du cimetiere, j'eprouve une grande deception. Je pensais trouver une tombe grande, haute, une belle construction comme en ont quelques saints qui reposent au cimetiere de Fez. Je n'ai trouve qu'un tout petit monticule fait de quelques briques. Pas la moindre inscription qui puisse reveler au passant croyant les nobles traces du grand homme.

 Le rabbin de Ras-el-oued vient au devant de moi. Je lui demande comment parmi ces monticules, tous pareils et qui representent des tombes, pouvait-il s'y reconnaitre ? Le Rabbin sourit. On aurait dit qu'il s'attendait a la question. II souleve alors une pierre et me montre une espece de cachette. II en retire un papier ou je lis le nom du defunt.

 Tandis que je cause avec le rabbin, des pelerins venus des alentours, s'agenouillent pres de la tombe et commencent leurs lamentations. Rebbi Baruch a le pouvoir de guerir les maux incurables. Une femme l'implore en faveur de son fils aveugle. Une autre lui demande de lui donner la joie d'etre maman. Le rabbin m'invite a me dechausser et a m'agenouiller egalement aupres de la tombe. Je me recueille un moment pendant lequel le rabbin recite le Kaddish. J’embrasse la tombe en collant mes levres contre la terre. J'allume quelques bougies ainsi que le veut l'habitude et je me retire respectueusement en marchant a reculons.

Le pelerinage m'a emue profondement. Unanime-ment, les Juifs du Sous venerent le saint de Ras-el-oued. Mais cette tombe si sacree pour nos coreligionnaires est profanee par les Arabes. Ceux-ci circulent a travers le cimetiere juif et foulent a leurs pieds les tombes, grandes ou petites, sans aucun scrupule. Les Juifs voient ces profanations avec resignation. Ils n'osent pas protester. Craignent-ils les Arabes ? II faut le croire. Quelques Israelites de Mogador proposerent d'elever un mausolee sur la tombe de Rebbi BaruchMais le petit fils, Baba Dodou, refusa cette initiative bien genereuse. D'apres lui, ce serait oflenser la memoire de son ai'eul : Rebbi Baruch a ete modeste de son vivant, il devra l'etre apres sa mort.

Signe: Benozillo

Vu et transmis le 5 janvier 1933

Le directeur.

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La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

Les nombreux rapports d'instituteurs et la multitude de lettres et de rapports adresses par les directeurs des ecoles au siege central de l'Alliance renferment une mine inepuisable d'informations, de commentaires et d'analyses sur les communautes juives durant le dernier siecle de leur presence au Maroc. A ce titre, ces archives forment une source ethnographique incontournable pour tous ceux qui s'interessent au devenir de ces communautes, a leurs formes de vie quotidienne, a leurs croyances et a leur habitus culturel dans de tres nombreuses communautes, urbaines, rurales ou semi-rurales.

Pour l'historien et l'ethnographe avises, il y a la une quantite innombrable et diversifiee de documents et d'analyses produits par des observateurs, qui se voulaient presque tous exterieurs tant humainement que culturellement aux communautes qu'ils decrivent. Cependant, ce reservoir archival ne saurait etre dechiffre et exploite au premier degre de !'argumentation qui y est developpee et des convictions qui y sont affirmees. Les voix profondes et multiseculaires de ces communautes qui ont survecu a la penurie, aux spoliations et aux humiliations, qui allaient avec le statut protecteur de dhimmis, y manquent cruellement.

Cela est du principalement aux partis- pris et au zele modernisateur et civilisateur des fondateurs et des enseignants de l'Alliance, qui se sont investis pleinement dans ce qu'ils consideraient comme une oeuvre ou une mission de regeneration sociale et de transformation culturelle et humaine de ces communautes.

 Mais cela est du aussi a la fragmentation et a l'autarcie communautaires, qui etaient de regie depuis le Moyen Age au moins et qui ont empeche les communautes judeo- marocaines de prendre en main leurs destinees et de gerer ensemble les bouleversements internes et externes, les transformations souhaitees et non souhaitees, ainsi que les amenagements et reorientations qu'il etait necessaire d'introduire dans leur habitus socioculturel en fonction de ces changements.

 Lorsque des conditions favorables se sont imposees d'elles- memes apres la Seconde Guerre Mondiale et ses terribles souffrances et a la suite de l'extenuation du pouvoir colonial de la France, ces communautes ont connu une renaissance culturelle et une action economique et sociale qui semblaient les remettre sur la voie de 1'auto-determination et de l'auto- gouvernance.

 Mais cette periode fut de tres courte duree, une dizaine d'annees a peine, de 1946 a 1956. L'independance du Maroc et l'appel obsessionnel d'Israel et de ses promesses messianiques ont fait de ces "dix glorieuses" une courte etape seulement dans la dispersion des centaines de communautes juives du pays et de leur regeneration ou leur extinction sous d'autres soleils et en d'autres continents

Alliance Israelite Universelle..Richard AYOUN

Brit – 30

La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo 

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

Richard Ayoun

Synthese du colloque : L'Alliance Israelite Universelle en Tunisie (1860-1967) et les transformations socioculturelles de la communau te juive.

Au nom de tous les participants, je tiens tout d'abord a remercier vivement pour leur accueil amical et pour l'excellente organisation de nos travaux, les organisateurs de ce grand colloque, la Societe d'Histoire des Juifs de Tunisie (la S.H.J.T.) creee en 1997, sous le regime de la loi de 1901, a l'initiative de responsables communautaires et d'universitaires juifs et non-juifs, tous originaires de Tunisie.

Je remercie plus particulierement les membres du bureau de la S.H.J.T. notamment son president Monsieur Claude Nataf, les Vice-presidents Denis Cohen-Tannoudji, Claire Rubinstein, Sabine Labarthe, Roger Belhassen, Andre Adda et Jacques Taieb. 

La fondation de cette association part de plusieurs constats : en premier lieu, la place importante des Juifs originaires de Tunisie dans la communaute juive francaise, en second lieu, leur fldelite a leurs racines, en troisieme lieu, la relative pauvrete de la recherche scientifrque sur le Judai'sme tunisien, en quatrieme lieu, la publication de nombreux ouvrages romances qui tendent a deformer la realite soit en embellissant le passe soit en le noircissant, en cinquieme lieu, l'interet nouveau manifeste par l'universite tunisienne, sur le theme de l'histoire des Juifs de Tunisie, et enfin, l'ouverture recente des archives tunisiennes.

En partant de ces constats, la Societe d'Histoire des Juifs de Tunisie, societe a vocation savante s'est donnee pour tache de dresser 1'inventaire des sources archivistiques existantes, de rechercher les moyens de preserver le patrimoine juif tunisien, d'encourager des travaux d'universitaires sur l'histoire des Juifs de Tunisie, et d'organiser enfin des manifestations publiques centrees sur l'histoire des Juifs de Tunisie : colloques, conferences, tables rondes, etc..

Richard AYOUN, Maitre de Conferences a l'Institut National des Langues et Civilisations Orientales Paris.

Decede a Paris le 30 mai 2008, il était membre de la redaction de BRIT

La S.H.J.T., depuis sa fondation, organise pour un public de plus en plus nombreux, comprenant des etudiants, des chercheurs mais surtout des personnes originaires de Tunisie, avides de retrouver leur histoire, six a huit conferences chaque annee, dans les locaux de l'Alliance Israelite Universelle. Ces conferences sont donnees par des temoins d'un passe recent et principalement par des Historiens.

Depuis sa fondation, la S.H.J.T. a organise trente-huit conferences, deux tables rondes et trois colloques y compris celui-ci. Chaque annee, le 9 decembre est organise une ceremonie commemorative au Memorial du Martyr Juif Inconnu ou sont rappeles les noms des Juifs de Tunisie victimes du nazisme, en presence des ambassadeurs de Tunisie et d'Israel.

A l'occasion du 60eme anniversaire de la Rafle des Juifs de Tunis par les SS (Schutzstaffel), le 9 decembre 1942, la S.H.J.T. a organise en partenariat avec le Centre de Documentation Juive Contemporaine, une exposition de documents d'archives inedits et de photocopies sur « la vie des Juifs en Tunisie durant la seconde guerre mondiale ». En fevrier 1998, la S.H.J.T. a ete invitee a participer a un colloque organise par l'universite de Tunis I sur le theme : « Histoire communautaire, histoire plurielle : la communaute juive de Tunisie ». Ce colloque etait le premier du genre a se derouler dans un pays arabe.

Alliance Israelite Universelle

Brit – 30

ברית 30 - כל ישראל חבריםLa revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

L'originalite de ce colloque est que pour la premiere fois, des historiens israeliens et tunisiens ont dialogue et ont eu un echange d'idees. La richesse des communications, l'interet des debats ont permis une grande avancee des recherches sur l'histoire des Juifs de Tunisie.

En ce qui me concerne, je cotoie souvent les Tunisiens et je peux dire que la Tunisie demeure pour les Juifs tunisiens installes notamment aux Etats- Unis, au Canada, en Israel et en France, un foyer chaleureux. Ils les exhortent a renforcer avec leurs freres et soeurs musulmans, le prestige et le renom de la Tunisie. 

Prevoir et reunir un colloque sur le theme

 L'Alliance Israelite Universelle en Tunisie 1860 – 1967 et les transformations socioculturelles de la communaute juive etait une gageure. Pouvons-nous dire qu'elle a ete tenue ?

 La minceur de nos connaissances anterieures, qui contraste avec la richesse, poussee jusqu'au detail, des communications, fruit de recherches entierement nouvelles, suivies d'interventions apres les exposes. 

Rappelons brievement les significations du cadre chronologique, la date de 1860 est celle de la creation de l'Alliance Israelite Universelle (1'A.I.U.) par un groupe de six personnalites juives parmi les plus en vue a Paris

 Charles Netter, Elie-Aristide Astruc, Isidore Cahen, Eugene Manuel, Narcisse Leven et Jules Cavallo. Ils formerent la commission d'organisation avec le concours d'Adolphe Cremieux qui en prendra plus tard la presidence. Leur appel lance alors s'inscrit dans la lignee de la Declaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. 

  L'objectif etait d'organiser le Judai'sme sur une base universelle. Les fondateurs 'A.I.U. estimaient que  le progres moral des Juifs exigeait l'introduction et le developpement de  l'instruction et de l'education dans les territoires les plus recules. Les Juifs  emancipes avaient une responsabilite a assumer envers leurs   coreligionnaires defavorises. Au meme moment Adolphe Cremieux agissait pour l’emancipation politique et la reconnaissance des Juifs en ce domaine. Narcisse Leven devint le maitre d'oeuvre d'une importante action dans le  domaine educatif. Son but etait d'eveiller les esprits et de faciliter l,integration sociale des jeunes generations. Les objectifs de l'A.I.U. sont deflnis dans l'article ler des statuts 

            « L'Alliance Israelite Universelle a pour but :

                De travailler partout a !’emancipation et aux progres moraux des israelites.

            De preter un appui efficace a ceux qui souffrent pour leur qualite d'israelites.

            D'encourager toute publication propre a amener ces resultats 

            Une question se pose pourquoi la Tunisie est-elle le premier des pays  musulmans dont l'A.I.U. a eu a s'occuper ?

 La reponse est que le Bey Ahmed, monte sur le trone en 1837   devait rompre avec tout controle  politique du Grand Turc, pour resserrer les liens d'amitie de la Tunisie avec les puissances europeennes, notamment avec la France. Son attitude envers les Juifs est empreinte de liberalisme. Son successeur, Mohammed Be  proclama, en septembre 1857 le Pacte Fondamental qui garantissait une complete securite a tous les sujets, quelle que soit leur religion, leur nationalite ou leur race. II promettait aux Juifs le respect de leur religion, le libre exercice de leur culte et la protection de leurs synagogues.

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Redacteur : Asher Knafo

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Dans ce contexte, au cours de la premiere assemblee generale de l'A.I.U., Le 30 mai 1861 le president faisait savoir qu'il avait adresse une lettre de  remerciements au Bey de Tunis, a l'occasion de la promulgation de ce Pacte Fondamental

  II est a se rappeler que cet acte est la consequence d'incidents, notamment ceux provoques par l'affaire du juif de Tunis, Bato Sfez, qu'un  de mes etudiants, Armand Maarek a brillamment etudie. Bato Sfez a ete  accuse de blaspheme envers la religion musulmane il a ete condamne a mort et execute, malgre la demarche faite en sa faveur par les representants des Puissances etrangeres. 

Cette execution avait provoque en Europe une vive indignation, et le gouvernement francais avait envoye a Tunis une escadre pour obliger le Bey, en reparation, a instituer pour tous ses sujets, quels qu'ils fussent, une Constitution etablissant la liberte et l'egalite. 

           1866 En 1863 un Comite de l'A.I.U. est fonde a Tunis. II fut dissous en

 Mais le Comite Central explique au representant du Bey a Paris qu'il demandait simplement l'application de la Constitution qui garantissait les  memes droits a tous les citoyens sans distinction de culte. Le Comite de  1877 Tunis ne fut reorganise qu'en  l'A.I.U., avec le Board of Deputies de Londres ouvrit une souscription en faveur des Juifs de Tunisie qui souffraient de la famine et des epidemies.

La premiere ecole de PA.I.U. est inauguree le 7  juillet 1878  Tout ce que Tunis comptait de notables, les membres de la famille du Bey, les ministres, les representants des Puissances etrangeres, les membres les plus importants des communautes europeennes, assisterent a la fete d'inauguration. Le jour de l'ouverture de l'ecole, 750 eleves s'inscrivirent. Ils provenaient du Talmud Tor ah tunisien, 125 du Talmud Tor ah « livournais » et 150 enfants d'origines diverses, en tout 1025 eleves.

Quant au « terminus ad quem » du colloque, l'annee 1967, il est lie a la terrible epreuve subie par la population juive de Tunisie et par la meme l'A.I.U. II convient, en effet, de se souvenir que la population juive de Tunisie devait etre soumise a une nouvelle epreuve dans la journee du 5 juin, alors que commencait la guerre qui, pendant six jours, allait opposer l'Etat d'Israel aux nations arabes coalisees. Ce jour-la, a Tunis, des milliers de manifestants purent, sans rencontrer la moindre opposition des forces de l'ordre, se repandre dans les rues ou se trouvait concentree la population juive. lis detruisirent a coups de barres de fer les magasins appartenant a des Juifs, ils mirent le feu aux lieux de culte et, notamment a la Grande synagogue de l'avenue de Paris, dont les livres et les rouleaux de la Loi devinrent la proie des flammes.

Le soir meme, le President de la Republique, Habib Bourguiba, condamna la tournure qu'avait prise une manifestation de solidarite a l'egard des peuples arabes. II assura la population juive qu'elle n'avait pas a craindre de nouvelles violences. II lui promit meme quelle serait indemnisee pour tous les prejudices qu'elle avait subis et que les coupables seraient arretes et condamnes. II n'en reste pas moins que cette journee dramatique fut suivie d'une nouvelle vague de departs au sein de la population juive.

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Brit – 30

La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo

ALLIANCE 1Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

Les travaux de ce colloque se so'nt organises autour de huit axes. D'abord, il y a eu les allocutions de Jean-Robert Pitte, President de l'universite Paris-Sorbonne, de Jean-Jacques Wahl, directeur general de l'Alliance Israelite Universelle, representant Ady Steg, President de l'Alliance Israelite Universelle, Jacques Huntziger, representant le Ministre des Affaires etrangeres, Michel Barnier, et de Claude Nataf, President de la Societe d'Histoire des Juifs de Tunisie, qui a notamment rendu un brillant hommage a Paul Sebag, recemment disparu. Je m'associe a cet hommage. Paul Sebag m'a beaucoup appris sur le Judai'sme tunisien au cours de nos longues conversations. Puis nous avons entendu les lecons inaugurates de Klifa Chater, professeur emerite a la faculte des Sciences humaines et sociales de Tunis, « Sur la Tunisie a la veille du Protectorat francais », d'Aron Rodrigue, professeur a l'universite de Stanford aux U.S.A., sur « De l'instruction a l’emancipation : un modele francais et de Michel Abitbol, professeur a l'universite hebrai'que de Jerusalem sur Modernite et eclipse de l'histoire juive en Terre d'Islam

La premiere seance a evoque « L'Alliance Israelite Universelle et les debuts de l'education moderne en Tunisie ». Elle a ete presidee par Klifa Chater, professeur emerite a la faculte des Sciences humaines et sociales de Tunis.

Yaron Tsur de l'universite de Tel-Aviv a evoque « Les campagnes sur la question de l'education juive moderne en Tunisie (1863-1897) ». II a distingue deux types de modernistes juifs. On trouve, d'une part, les maskilim, hebrai'sants et parfois aussi arabisants, qui prennent part a l'actualisation d'une des langues locales et tendent au proto-nationalisme juif ou local. D'autre part, on trouve les occidentalisms qui adoptent une langue europeenne comme l'italien ou le francais, comme langue principale de haute culture. Le premier recit de revolution de la reforme de l'education des Juifs tunisiens n'a pas ete celui bien connu de David Cazes, juif occidentalise, mais celui qu'on trouve dans differents ecrits d'Abraham Chemla, maskil local.

II raconte 1'histoire des tentatives de reformes de l'education en commcncant par les Grana en 1820, puis il decrit ensuite, la demarche de l'envoye de la famille de Rothschild, 20 a 30 ans plus tard, et poursuit avec 1'epoque qui suit la Constitution de 1860 et la creation de l'Alliance Israelite Universelle, pour clore son recit par la creation de l'ecole a Tunis en 1878. Dans un premier temps, les elites modernistes lutterent ensemble contre les ultra-conservateurs de la communaute juive qui refusaient toute reforme de l'education. L'arrivee au pouvoir du premier reformiste musulman, Khair ha Din, suscita l'espoir d'une reforme rapide, mais cet espoir fut defu, car les autorites ne voulaient pas voir augmenter la penetration imperialiste occidentale. Apres le limogeage de Khair ha Din, lorsque l'ecole fut fondee, il y eut un bref affrontement entre les pro-italiens et les pro-francais, ces derniers l’emporterent au moment de l'occupation. Les premieres annees du Protectorat ouvrent un nouveau chapitre avec la deception qu'eprouvent les maskilim a l'egard de l'A.I.U. De fagon generale, la tendance pro-frangaise des occidentalisms se renforca, mais en raison des rapides changements politiques et economiques, la situation des maskilim s'ameliora elle-aussi. En parallele a l'epanouissement de la presse et de la litterature en judeo- arabe, ils concevaient l'etude de l'Hebreu moderne comme langue principale et comme une alternative a la francisation partielle composee par l'A.I.U. Mais faire de l'hebreu l'axe de la culture moderne dans la Tunisie coloniale, n'avait pas beaucoup de sens et les maskilim perdirent leur cause avant la fin du siecle.

Abdelmajid BedouI dans « Le college Sadiki, consecration de la modernite » a montre que la creation de Sadiki est le produit d'une volonte et d'une histoire. II s'agit d'une serie de reformes entreprises dans le pays : tout d'abord, le pacte fondamental de 1857 avec ses onze principes axes essentiellement sur la notion de liberie : liberte civile, liberte du culte, liberte du commerce etc… ; Ensuite la constitution de 1881 L'institution d'un ordre nouveau dans l'histoire sociale et politique du pays. Le college Sadiki demeure un modele. Toutes les reformes de l'enseignement entreprises en Tunisie s'inspirent du modele sadikien. Le mouvement national etait dirige en majorite par des elites sadikiennes et l'Etat national est cree, il est dirige par les elites sadikiennes.

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Brit – 30

La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knaf 

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

Cent cinquante ans après la fondation de l'Alliance Israélite Universelle à Paris et un siècle et demi d'action éducative, culturelle et politique intense dans les communautés juives du Bassin Méditerranéen, est-il temps d'établir le bilan définitif de cette institution unique par son ampleur dans le monde juif? Ce serait aller trop vite en besogne, car l'AIU continue son action, les anciens auraient dit sa 'mission', et s'apprêterait même à la redéployer en créant de nouvelles écoles, en Israël notamment. 

Ridha Ben Rejeb, de la Faculte des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, a traite de « L'accueil du projet de l'A.I.U. par le pouvoir hussenite de 1864 a 1878 ». Partant des documents conserves aux archives nationales de Tunisie et en se fondant sur le chroniqueur reformiste tunisien Ahmad Ibn Abi Dhiyaf, Ridha Ben Rejeb reconstitue les moments de la mise en place de la premiere ecole de L'A.I.U. qui sera ouverte a Tunis en 1878. En effet, depuis 1864, date de la creation en Tunisie du premier comite de l'A.I.U. jusqu'a 1978, plusieurs emissaires de l'A.I.U. ont ete envoyes a Tunis pour etudier la possibilite de realiser ce projet, de meme qu'il y eut un echange de correspondance entre les dirigeants de l'A.I.U. et le pouvoir husseinite.

 II s'agissait d'etudier les objectifs annonces et les reactions du pouvoir en place qui, apres des hesitations, finira par autoriser l'A.I.U. a ouvrir une ecole a Tunis, rue Malta Sghira, dont le directeur fut David Cazes. 

Claude Nataf, president de la S.H.J.T. dans « Les premieres annees de l'ecole de l'Alliance Israelite Universelle a Tunis » a expose la specificite tunisienne avec une Ecole voulue par le Rabbinat et realisee grace au concours du Rabbinat. Elle se traduit par la scolarisation des jeunes Juifs avant l'A.I.U. Ensuite, le Baron de Castelnuovo, medecin livournais acquis aux idees nouvelles et president du comite regional de l'A.I.U. en 1877, comprend que la creation d'une ecole moderne ne peut se faire sans le concours du rabbinat qu'il s’emploie avec succes a gagner a ses idees. Enfin, c'est une convention que l'on peut qualifier de revolutionnaire qui est signee le 17  novembre 1877  entre le Grand rabbin et les principaux rabbins, d'une part, et le Baron de Castelnuovo es-qualite, d'autre part.

L'ecole est organisee par David Cazes qui a une vision de l'oeuvre a accomplir : ecole des filles, ecole technique, ecoles a l'interieur de la Tunisie, enseignement agricole. Les consequences sont que Machuel, nomme en 1883  directeur de !'Instruction Publique en Tunisie prend ses nouvelles fonctions, il admire l'ecole frangaisc en plein developpement. 

Abdelhamib Largueche, Directeur du Laboratoire Patri-moine de 1'universite de Manouba, s'est penche sur David Cazes un homme controverse a cause de sa juste cause .Avec David Cazes, ne a Tetouan au Maroc, sa langue maternelle etait la haketiya, L'ecole de l'A.I.U. allait devenir quelques annees plus tard le principal vecteur de la modernisation, de !’emancipation et de la promotion des Juifs de Tunisie, excepte les Juifs de Djerba, trop attaches a leurs vieilles traditions. La vie mouvementee de David Cazes a Tunis a ete etudiee a travers sa correspondance avec le Comite central de l'A.I.U. et avec les autorites beylicales lors des premieres annees qui suivirent l'ouverture de la premiere ecole moderne israelite a Tunis.

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La revue des juifs du Maroc

Redacteur : Asher Knafo

Les 150 ans de l'Alliance Israelite Universelle

La deuxieme seance de ce colloque a eu pour theme « Les Juifs de Tunisie a travers les Archives de 1'Alliance Israelite Universelle ». Elle a ete presidee par Ephra'im Riveline, Professeur a l'universite Vincennes-Saint- Denis (Paris VIII).

Robert Attal, bibliothecaire honoraire de l'lnstitut Ben Zvi, a Jerusalem, dans « Salomon Reinach, l'Alliance Israelite Universelle et les Juifs de Tunisie » indique que cet archeologue, philosophe et historien entreprit au cours des annees 1883-1884 , une mission archeologique en Tunisie et profita entre autres pour effectuer une savante mise au point epigraphique sur la synagogue d'Hammam-Lif, decouverte en 1883 . Dans ses rapports Salomon Reinach va ridiculiser le comportement et les moeurs des Juifs indigenes de l'epoque. II donne ses opinions politiques sur l'attitude des Juifs de Tunisie et meme il defendra le Cardinal Lavigerie, alors ennemi des Juifs, en n'hesitant pas a identifier les buts du Cardinal avec ceux de l'A.I.U.

Hammam Lif (حمام الأنف) est une ville côtière de la banlieue sud de Tunis, située à une dizaine de kilomètres du centre-ville.

Rattachée administrativement au gouvernorat de Ben Arous, elle constitue unemunicipalité de 38 401 habitants en 2004.

Elle tire son nom de deux sources thermales émergeant au pied du Djebel Boukornine

Histoire

Connue dans l'Antiquité sous le nom de Naro (d'origine punique) puis d'Aquae Persianae, cette localité est rebaptisée Hammamat El Jazira (bains de lapéninsule) après la conquête arabe. Elle prendra ensuite le nom de Hammam Lif formé des termes hammam et anf (nez) car les sources ont pour but principal de guérir les infections liées aux problèmes respiratoires.

Pendant la période arabe, le site n'est guère fréquenté et ce n'est que vers 1750 qu'Ali II Bey fait construire, pour son usage personnel, un pavillon au voisinage immédiat de l'une des sources qui prend le nom d'Aïn El Bey. Il fait aussi édifier des installations pour les voyageurs et les malades à proximité de la seconde source appelé Aïn El Ariane. En 1826Hussein II Bey fait construire, à côté du pavillon, une résidence pour y habiter avec sa famille et sa cour pendant une partie de l'année. Cette résidence assez modeste est à l'origine du palais beylical dont certains souverains régnants feront leur résidence d'hiver, tout en conservant l'usage des eaux d'Aïn El Bey. L'autre source sert donc à alimenter les établissements à usage public.

La municipalité de Hammam Lif est créée par le décret du 9 mars 1899.

En mai 1943, des violents combats entre les troupes alliées et celles de l'Axe, battant en retraite vers le cap Bon, éprouvent durement la population civile.

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