Langue et folklore.Pinhas Cohen


Langue et folklore des Juifs marocains.Pinhas Cohen

Entendues dans la bouche des Marocains, Juifs et Musulmans confondus, certaines expressions propres au parler des juifs marocains et à l'arabe dialectal en général, traduites littéralement dans une autre langue et en l'occurrence en français, aboutissent à des formulations pour le moins cocasses et beaucoup s'en amusent. Il faut les intérpréter pour en dégager le sens. Nous en avons relevé un certain nombre à titre d'exemples.

Cet exercice qui présente un aspect essentiellement linguistique n'en a pas pour autant un caractère ludique. C'était aussi notre intention.

s-sadeqa ioqef m 'ak

Que la sainte (Solika ) se tienne debout avec toi=qu'elle te vienne en aide !

Feqt beh / 'eqt beh

Je me suis réveillé de lui=j'ai tout de suite compris ce qu'il manigance

qllebni -t-tbeb

Le docteur m'a fouillé, m'a cherché =il m'a ausculté

t-terbya baqe raqda

L'éducation dort encore=le bébé dort encore

ka i-tt-rebba 'and-l-basa

On l'éduque chez le pacha=il est puni par le pacha

ka-iakel-lfalaqa

Il mange la fala'a=il subit le châtiment du carcan (falaqa)

ka itella ' li s-sem f-rasi

Il me fait monter le poison dans la tête = il me met en colère

nemsi sdaqa 'lik

Que je parte en charité pour toi= puissé -je te servir de rançon (pour que tu vives)

Masi n 'amlo s-sabon

Nous allons faire le savon=nous allons faire la lessive

Ka isemmes el-henna nhar kello

Il fait sécher le henné toute la journée=il ne fait rien

ma ka na'ref la Isso wala Bakor

Je ne connais ni Isso ni figue- (fleur) =Je n'en ai rien à faire

– Expression courante chez les juifs comme chez les musulmans de Fès pour dire qu'on n'accorde aucun intérêt à la chose ou à la personne dont parle l'interlocuteur

Tla'tlo roah se ' ara f-raso

Il lui est monté une tempête dans la tête= Il s'est mis dans une colère

bit-ha kkabod (heb.)

La maison du respect =les WC

s-sqarim la-beqarim

  termes hébraïques) mensonges pour le matin=ce ne sont que des mensonges)

el klaïm- el-qbah

Les mots méchants=les mots vulgaires

Langue et folklore.Pinhas Cohen

el-hwaiz l-qbah

Les choses méchantes = Les actes qui ont trait à la sexualité

ghzal berni

Beau, vernis =beau (comme un objet vernis) ( brni, déformation ici du mot français "verni")

mokh del hot

Tête de poisson=tête de linotte

ma kaîn lli ka irfed li hemmi

Il n'y a personne qui porte mon souci= (personne ne se soucie de moi)

iwa reqqedto f-el ghes Je l'ai fait dormir dans la boue =je l'ai bien roulé ! Je l'ai roulé dans la farine !

iwa qlito f- zito Je l'ai fait frire dans sa propre huile=je l'ai bien eu

medrob

Il est frappé=il est dérangé

derbo llah

Dieu l'a frappé=il est dérangé derbo r-reh /Le vent l'a frappé =11 a pris froid

ozho meghsola b-el bola

Son visage est lavé à l'urine =il n'a pas honte

dak-el mazghob d-el halq

Cette maudite gorge=cette vilaine voix

ka netqawwet beh

Je me sustente profondément de lui = Je suis conquis par son charme

Lahmi ka it-tgerred 'leh Ma viande se déchire en morceaux pour lui = J'éprouve une profonde tristesse pour lui

l-lah ihde odniya

Que Dieu protège mes oreilles= Puissé-je ne point entendre cela

hissi missi (ou encore hassoun-el- bared)—

Hassoun le froid =qui fait les choses en douce, sournois

wakel -d-dreqa

Il a consommé une boulette (une sorte de nougat ) ( Il est sous l'effet du hachich)

zebbala d-el-flos

Un dépotoir d'argent =une somme considérable

Ka-n-tkemma m 'a rase

Je fume avec ma tête= Je fume tranquillement

roh-t-tma

L'âme de l'impureté=qui tient de la bête

Ma tedkhel-s-f-soqe / N ' entre pas dans mon marché =Ne te mêle pas de mes affaires

as dak label ? (> heb.ebel/=deuil) Qu'est-que c'est que ce deuil ? =Qu'est-ce que c'est que cette mocheté ?

ma tqolli ma nqollek

Ne me dis pas, je ne te dis pas =Je ne veux rien savoir

qetta'na loraq

Nous avons déchiré les feuilles =Nous avons pris les billets

kherz 'liya / Sors sur moi=décampe !

ma t'abbis 'leh /Ne prends pas sur lui Ne tiens pas compte de lui

skon saba fhalek/Qm l'a trouvé comme toi ? Qui a pu avoir l'opportunité que tu as eue?

Hennini nhennik/Tranquillise-moi, je te tranquillise Ne nous cherchons pas noise

Iwa derbo 'la zoz/ frappe-le sur deux =eh bien multiplie-le par deux

iwa serbi rasek / eh bien sers ta tête vite ( serbi > fr.servir) Eh bien dépèche-toi !

Iwa zma 'rezlek / eh bien ramasse ta pied Allez lève-toi !

Iwa baraka m-el-mzah

Ça suffit des nèfles ! Assez déblatéré, assez plaisanté !

Azina daba l-emet

Parlons maintenant franchement

Emet : terme hebr=vérité

Des expressions idiomatiques foisonnent évidemment dans : ״tes les langues, et si on venait à les transposer dans la réalité on en ־-*ait aussi. Il n'est qu'à voir par exemple des expressions formées en :rinçais avec le mot "diable" : la beauté du diable, aller au diable, se lire l'avocat du diable, vendre son âme au diable, avoir le diable au corps, tirer le diable par la queue etc. Si on venait à traduire cette entière expression en arabe par exemple cela donnerait aussi quelque chose de cocasse qui n'aurait aucun sens : ka ijerr chitan men denbto De même, si on taduisait l'expression empruntée à la terminologie du cadastre : "le mur est à cheval." l-het foq l-'aud II (comme on l'a  écrit dans un document du cadasre marocain sous la plume d'un : fonctionnaire qui ne maîtrisait pas bien le français) cela n'aurait aucun sens non plus et ça prêterait évidemment à rire.

De même, des expressions françaises telles que : "poser un lapin, dormir sur ses deux oreilles, prendre le taureau par les cornes, être à feux doigts" prêteraient à sourire si on les transposait dans la réalité. Et si l'on y ajoute la mimique comme l'a fait une humoriste connue lors d'une émission de divertissement, cela deviendrait encore plus hilarant.

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- La Qasida judéo – marocaine

La Qasida judéo – marocaine

La Qasida judéo-marocaine est un récit rimé en arabe dialectal des Juifs du Maroc. Elle est destinée à être chantée sur un air préalablement indiqué par l’auteur, en général sur l’air d’une prière connue, par exemple : Mi kamokha. Sans prétention littéraire, écrites en caractères hébraïques, les qasidas étaient imprimées sous forme de feuilles volantes et diffusées par un petit libraire du mellah. On en a retrouvé près d’une quarantaine, conservées princpalement à la bibliothèque de l’Institut Ben Zvi à Jérusalem. Nous en donnons ci-après de larges extraits accompagnés d'une traduction en français qui colle le plus possible au texte d’origine. C’est la première fois, à notre connaissance, et nous en sommes heureux, que des qasidas sont révélées au public dans leur version hébraïque d'origine. La plupart ont été composées et diffusées à Casablanca. Certaines sont devenues célèbres, telles la Qasida de Bensousan ou la Qasida de Yosef Ha-saddiq. L’auteur d’une qasida est le plus souvent un modeste lettré qui, en dehors de son activité professionnelle (boutiquier, coiffeur, artisan, petit commerçant..) s’essaie à ce genre populaire pour divertir le petit peuple du mellah et susciter chez lui, par la même occasion, un éveil de sens esthétique et peut-être même une prise de conscience de sa condition sociale précaire pour dénoncer, souvent avec humour, une oligarchie dominante

 La langue dans laquelle est écrite la Qasida est généralement comprise par le public populaire en dépit de la présence de quelques termes d’arabe littéraire. (Voir glossaire)

A l’origine, le mot qasida (pl qasaid ) dans la littérature arabe classique, désignait un poème de sept ou dix vers. Aujourd’hui, ce mot désigne un récit rimé en arabe dialectal des juifs du Maroc. Il se prononce qseda ( pl>qsaid ou qsedat). Dans un texte en français nous écrirons : qasida).

Elle recouvre un vaste domaine de la littérature populaire dont une partie est d’inspiration religieuse et une autre d’inspiration “profane”. La première comprend un certain nombre de légendes, versions adaptées de récits bibliques glorifiant des personnages mythiques telle la qasida de Yosef ha Saddiq et des saints locaux du Maroc, des poèmes à la gloire des saints d’Eretz Israël (Ha-Saddiqim), qui donnent lieu à de grands rassemblements de pèlerins venus de tous horizons dans un climat autant de ferveur mystique que de fête champêtre ( voir P91), célébrés à date fixe lors de pèlerinages (Hüloulot).

Au-delà de ce domaine de la piété, on trouve tout un ensemble de qasidas à caractère “profane” qui traitent des évènements grands et petits, heureux ou malheureux, des conditions de vie des habitants du mellah. Dans certaines d’entre elles il souffle comme un petit air de révolte pour dénoncer sous une forme ludique la misère et les inégalités sociales comme le laissent entendre les adages suivants :

men khdemt la-‘niyyim u m-qellt s-sghel et-tazer ka y a‘mel l-flos

مين خدمت لعنيين و مقللت شغل  تازر كا يعمل الفلوس

Du labeur du pauvre et de son déseuvrement le riche s’enrichit

 zit-el-‘ani men hdit-el 'asir

زيت العني من هديت العسير

L’huile( de la lampe du pauvre )s’épuise à évoquer la fortune du riche

 l-‘asir ( terme hebr.=riche) ‘ando bas itsara u iqra u-l-‘ani ( terme hebr. =pauvre) ma sab-s bas ibra

العسير عندو باس يتسارا و يقراء والعني  ما سابس باس يبرا

Le riche a de quoi se promener et se cultiver Le pauvre n’a pas de quoi se soigner

"Paradoxe déconcertant, nous dit Jean Hess (“ Israel, au Maroc") toute la vitalité de ce petit peuple du mellah, sa bonne humeur, sa joie  et son amour de la vie, c’est en parfaite misère qu’elle paraît le mieux s'affirmer

Quelques exemples de Qasidas :

qseda di- Bensoussan

 ’ qseda-del- miziria

 qseda d-es -srab u mahia

 ’qseda di- Pissah u Sekka

 ,qseda d-el-baqq

 ,qseda d-el- berghot

 ,qseda d-el- firan

 ,qseda d-el kra

 ,qseda d-es-selhat

 ,qseda d-el-Bedawiyat u -s- Selhat u-l-Fasiyat

,qseda d-l-apiqorosa

 ,qseda d-el‘ azri u-l-mzuwwez

 ,qseda di- Hitler

 ,qseda di- Haman

 ,qseda d-et-tifos

 ,qseda di-Yossef Ha-Saddiq

 ,qseda de Mordékhai et Esther

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- La Qasida judéo – marocaine –page 41-43

 

– Qseda di- Bensousan Histoire d’un amour cruel- Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014

1- Qseda di- Bensousan Histoire d’un amour cruel

Qasida chantée par Cheikh Zouzou (Voir CD)

Cette Qasida a été composée par un juif oranais du nom de Bensousan. C’est l’histoire d’un amour-passion qui remonte à la fin du 19ème siècle (probablement l896).

Ayant appris l’infidélité de son amante partie avec un toréador espagnol, il la tua d’un coup de pistolet. Pour ce crime il fut condamné et envoyé au bagne de Cayenne où était déjà incarcéré à l’époque le capitaine Dryefus (cf. l’affaire Dreyfus).

Après quelques années de bagne, Bensousan sera grâcié, dit-on, par le président français Sadi Carnot. Cette chanson qui a ému beaucoup le public à l’époque a connu un immeuse succès et sera interprétée par de nombreux chanteurs dont Cheikh Zouzou. voici un extrait :

Uf-el-lilya tol hijri

 Ma nas mulu'  bihom /

Wa zani l-firaq f-es-sobh bekri

U la-hbab qellet ‘liya njihom

U la-hbab twoll‘o b-gheiri

 

U ma iqerr- s-el- kher fihom

N-nabi sid-n-nas

Ma nwokkel gher rabbe ‘lihom

Ana lli tmahhent men seghri (bis )

Sbatni tefla zinha ma kan

 Selbatni khleflia nejri ( bis )

Selbet ‘aqli b-t-tola u-t-tihan

                                   Ana ghsim ma zal derri ( bis)

 

Ma nwit-si l ‘achq isarred l-mhain

 F-el- qlub s‘ab u ghsam

 Khellit kiyyetha fi sadri

                                  Ana ghsim mazal derri

 

Ana lli tmahhent men seghri

 Ana lli hseltf- bniya

U selbatni b-t-tol u z-zina

 B-‘yun oqah ghzret fiyya

Khellatni f-et-temhina

Hiyya f-el-asel romiya

U isemha María Molina

                                      Ba‘d-el khtam nefdah serri ( bis )

 

Hin sabni Rabbi u n ‘id lli kan

Semhuli uqeblo ‘adri

Sem ‘o hditi syadi b -qlob hnan

U trau kana ‘ya f- sabri

B-t-ta‘b u-s-sqa u khsert d-drahman

 ‘Al Iwaldin u ‘leha u ‘la -la-khwan

                                     U ana ghsim ma zal derri

 Ana lli tmahhent men seghri

Traduction libre

“ J’ai enduré bien des souffrances depuis mon jeune âge à cause d’une jeune beauté. J’étais encore un jeune ingénu. Elle m’a ensorcelé par sa taille et sa grâce. Je courais après elle sans me rendre compte de l’amour qu’ elle instillait en moi, me faisant endurer bien des souffrances. Depuis le jour où elle m’a regardé, j’endure les pires tourments. Sa démarche rappelle le balancement d’un bateau.Elle est roumya (européenne) et son nom est Maria Molina. Je vous détaillerai plus loin mon secret.

Bonnes gens, ne me tenez point rigueur ! Ecoutez mon histoire avec un cœur tendre et vous saurez tout sur ce drame qui m’a valu bien des peines et beaucoup de dirhams pour cette fille et pour sa famille. J’étais encore un jeune ingénu, j’ai enduré bien des souffrances dès mon jeune âge…

  • La traduction d’une qasida n’est pas toujours aisée en raison d’une part de l’emploi de termes d’arabe littéraire et d’autre part du style parfois peu rigoureux de l’auteur .Aussi, est-ce en prenant quelque liberté avec le texte, sans pour cela en trahir l’esprit, que nous proposons une traduction libre des extraits que nous citons.

Le lien de la quassida

https://www.youtube.com/watch?v=3APY9RpuQMM

Judeo-arabe traduit en hebreu

http://moreshet-morocco.com/2014/10/25/%D7%94%D7%A9%D7%99%D7%A8%D7%94-%D7%94%D7%99%D7%94%D7%95%D7%93%D7%99%D7%AA-%D7%94%D7%A2%D7%9E%D7%9E%D7%99%D7%AA-%D7%9C%D7%A2%D7%A8%D7%95%D7%91%D7%99-%D7%99-%D7%9C%D7%A1%D7%A8%D7%99-33/

– Qseda di- Bensousan Histoire d’un amour cruel Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014

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Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-el ‘azri u-l-mzewwej

2 – Qseda d-el ‘azri u-l-mzewwej

Qasida du célibataire et du marie

Kont ‘azri / u gales mhanni

 Ka na‘mel di ‘zebni

A wili kif zra li

 

Kont ‘aich f-el-horriya

Si hadd ma ihkem fiya

 A wili kif zra li

 

Lli ‘zabtni ka n ‘abbiha U

 lli ma bghetha ka nkhalleha

 A wili kif zra li…

 

Sam‘o khsam el-‘azri m(a el-mzewwezya haddar

 El-‘azri kan kari m‘a el-mzewwez f-ed-dar

 Bda el-mzewwez ka i‘ayer f-el‘azri

  • Sma‘ ya dak ed-derri lazmek tedkhel bekri
  • Wella tdebbar fain tekri

L-a‘zara f-essoq ktar sir l'andhom tezri

Au iqeblok f-ed-dar

Bda el mzewwez ka i‘ayer f-el ‘azri:

  • El mzewwez fhal l-m ‘allaq
  • B-el-mra u lolad dima msennaq
  • U ila dwiti t-tfallaq

Khrozek m-el khedma l-ed-dar

Ma ‘andek fain tezhaq

Lama l-mra tzib l-khbar

  • El mzewwez qal-lo : ya-l-mfeiles
  • Gher ‘al-l-bnat dima ntin m ‘asses

 

F- qa ‘ d-droba dima ka tfettes

Hetta ka teh f-si wozh mkeffes

 T-tzewwezha au la temsi l-hebs.

El ‘azri qal-lo : iyyamek msat

 U-l-ghera fik qwat

 Ma bqalek -si ma tekhtar

Ghbintek gher men l-bnat

 LU ka nzib l-ed-dar

 

El mzewwez qal-lo b-qelbo mahroq :

– El ‘azri dima f-ed-droba metloq

 Makelto gher f-wost-s-soq

 

Ana ‘zizek mul -d-dar

Ka netledded u ndoq

 Gher f-et-‘amat ka nekhtar

El ‘azri wazbo : l-hkam lik

 Ya-l-mzewwez as iwatik ?

El-mra ka tebhel ‘lik

La izahqo rezlik

 L-hsab u-la‘qab ktar

Hetta ka tetleb Rebbe izlik

Gher bas tertah m-el-ghiar…

 

Traduction :

J’étais célibataire bien tranquille chez moi

 Je faisais ce que je voulais sous mon toit

Que m’est-il donc arrivé ma foi ?

 

J’étais libre,

Personne pour me commander

Que m’est-il arrivé ?

 

Celle qui me plaisait, je la prenais

Celle dont je ne voulais pas Je la laissais.

 Que m’est-il arrivé ?

 

Oyez bonnes gens l’altercation du célibataire avec le marié .Le premier était locataire chez le second. Le marié se mit à dénigrer le célbataire.

“ Ecoute, jeune homme, il faut que tu rentres tôt le soir, sinon débrouille-toi où loger ailleurs, ce ne sont pas les célibataires qui manquent dans la rue, hâte-toi de les rejoindre, ils t’accueilleront chez eux.”

Le célibataire répliqua aussi sèchement au marié : “ l’homme marié est comme un pendu.il est pieds et poings liés à sa femme et à ses enfants .Si jamais il se plaint il reçoit sa raclée. Du travail à la maison, il n’a aucune échappatoire de crainte que sa femme ne sache son histoire”

A quoi le marié répliqua : “Pauvre de toi ! tu n’as de cesse de courir après les filles jusqu’au fin fond des rues , pour finalement tomber sur une laideron que tu seras obligé d’épouser, sinon c’est la prison …

Le cœur gros, le marié lui dit : “le célibataire ne fait que tramer dans les rues. C’est là qu’il s’alimente.Moi, je suis chéri dans ma maison. Je déguste et je savoure les mets que je désire chaque jour.”

Le célibataire lui répond : “tu peux toujours parler, ta vie n’est pas de tout repos, ta femme ne cesse de s’enquérir à ton propos pour que tu ne glisses pas ailleurs.Tu dois toujours rendre des comptes et subir son châtiment jusqu’à ce que tu n’en puisses plus et que tu pries le Bon Dieu de t’exiler afin que tu te reposes de la jalousie qui te ronge.”

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-el ‘azri u-l-mzewwej- page47-50

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Hkayat / Anecdotes

Hkayat / Anecdotes

Pour illustrer cette qasida

Al-azri di zhaq – le célibataire qui a glissé

Proverbe : Kell-si qreto f-el worqa men gher z-zahqa

Jai tout lu dans les livres sauf la glissade

Wahd el bent / hant ma‘rofa f-el mellah / hit kant temsi m‘a lolad kellhom. Wahd en-nhar / taht hebla m-wahd-el-‘azri. Msat l'and-el-hakhamim/u qalt Ihom : “ el wuld elflani/huwwa boh- d-t- terbyadiali u ma habbs idzuwwez m‘ai. ” Safdo ‘leh l-hakhamim. M-di za qall-lhom : “ hots mi kbodkhem (sauf votre respect) t‘arfo / "-ger lotobis l-‘zara d-el blad kellhom dazo ‘leha/ Ihod mselmin u nsara. ‘las l-saqtfiyya gher ana ?”El-hakham di kan mloghe qal-lo :

׳ ׳"m ‘ak l-haq a bni iqder ikon kellhom dazo ‘leha / wa-layni ntin / zahqet zahqa kbira u daba en brera (heb.=tu n’as pas le choix)2

Traduction

Une jeune fille était connue au mellah pour son libertinage avec tous les garçons jusqu’au jour où elle tomba enceinte de l’un d’eux. Elle est allée saisir le tribunal rabbinique et leur a dit : “ Ce garçon est le père de l’enfant que je porte, mais il ne veut pas le reconnaître et se marier avec moi. ” Le jeune homme, récusant cette accusation, dit aux rabbins : “ Savez-vous, leur dit-il, que cette fille, sauf votre respect, il n'y a que l’autobus qui ne soit pas passé sur elle, juifs, musulmans et chrétiens. Pourquoi dois-je payer moi seul son inconduite ? L’un des rabbins qui ne manquait pas d’humour lui répondit : “ tu as raison, mon fils, tout le monde lui est passé dessus, mais toi tu as commis une glissade bien malencontreuse, tu n’as plus le choix !

[1] Il était de tradition que lorsqu’un jeune homme abusait d’une jeune fille il était tenu de l’épouser

Sekso bla khdaré/ Le couscous sans légumes

Wahd-el-mra / msat teski ‘and-el hakham / habbet t-talleq m-razelha. Bel- haqq ma sabt-s kif tqol-lo. Zat hiyya qalt-lo : as nqol- lek a sidi / razle dima ka yakel sekso bla khdare. / L-hakham fhem belli razelha ma kan- s i‘raf kif itmessa m‘a mrato f-el lil. Safd ‘leh u ‘al-lo : ta ‘raf akhai : z-zwaz huwwa fhal sekso/ida ma kan-s m‘ah si fsiwsat u si bwisat /qbel ma-doz l-‘eqqar ( terme hebr.=l’essentiel) l-mra ma ka i'azbhaz el hal. U daba m-di thabb takel sekso/kolo b-el- khdare dialo ! U-l fahem ifham !

Traduction

Une femme est allée chez le Rabbin pour demander le divorce d’avec son mari, mais elle n’a pas su comment présenter sa requête. “ Que pourrais-je vous dire, votre honneur, mon mari consomme toujours le couscous que je lui prépare sans les légumes qui l’accompagnent. Le rabbin qui a compris l’allusion, à savoir que le mari ne sait pas comment il doit se comporter avec sa femme lors des rapports conjugaux. Il prend ce dernier à part et lui dit : “ vous savez, le couscous si vous ne l’accompagnez pas de quelques câlins et douceurs, l’épouse n’est pas satisfaite. Dorénavant, quand vous voudrez le consommer, ne négligez pas les légumes. A bon entendeur, salut !

 Tout ce qui avait trait à la sexualité dans les propos était hautement tabou dans la bouche des honnêtes gens. On était tenu d’éviter les propos inconvenants ' l-klaim el qbah ’ou de faire des choses obscènes='l-hwaiz-el qbah

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Hkayat / Anecdotes

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-el-miziria

3 – Qseda d-el-miziria

Qasida de la misère ou Qasida de la crise

קצידא דל מיזירייא

Cette Qasida a été composée par un certain Shim’on ben Efraim coiffeur à Casablanca. Elle évoque les problèmes sociaux et  economiques qui ont affecté les conditions de vie des Marocains, juifs et musulmans confondus lors de la crise qui a le plus marqué le souvenir de la grande dépression de 1929/1930. Tout le secteur économique du mellah est confronté au marasme :

H ad l' am / ktert el-miziria / herrset-t-tezzar /

S-sna‘e kellhom tfellso f-had l-waqt- el-gheddar/

Ed-delma / bdat mell-kherraza /

Galsin itnahhdo /si wahd ma- tfaza /

Melli hall-l-hanot / ma khdem haza/

Ozho ka- isfar / f-la ‘siya / hiyya l-fraza /

Khass men Vabbeh le-d-dar

 

Sbab l-kharraza / huwwa Bata /

R-reclam el-tnin u-l-tlata /

El-blaghe rkhes men batata

Ya lli saiq la-khbar

Batata u- l-flafel khamzin /

‘lihom en-nas meddabzin /

Skon lyom y a ‘mel et-tazin ?

El-gezzara /y a hasra /kano tezzara /

Rahom l-yom f-s-sara /L-khteya bla 'ba

 El- haffafa / ‘ammro l-mdina /

Tseb kol wahed f-t-terkina /

Teyyho b-es-sen ‘a l-meskina

El met‘allmin bla ‘bar

 

Gher azi u qbed makina

U mqass mzenzar

Lowli bodneh maqto ‘a

U t-tani Ihito mat bo ‘a

N-nas galsin qamet makhlo ‘a

Men z-zrahi l-kbar

 

 El- khaddara / ma bqat Ihom m ‘isa /

Trahom galsin b-et-tnbisa /

U had l‘am zat et-tekfisa

 Zelbana u lobia makla rkhesa

Maklat d-t –tezzar

 

El- khiyyata d-el-kettan/mkemmsin /

B-el-ksad-d-el-kra saro mfellsin /

 B-es-sel'at d- Zapon mherrsin

Ez-ziyyara / mezmo ‘in f-el-qhawe /

Lihodi l-meslem u- d-drawe /

Uladhom ‘aryanin bla ksawe

U-l-mra ka tebki f-d-dar

 

 T-tellaya kamlin / hbab u shab

 Ma iqebdo l- flos ger b-et-t‘ab /

Lli ka isouro / ka imsi-l- hom /

Gher f-el karta u s-srab

Sna‘t- el- kwatsa/hemmha ktir/

Ma bqau isourro hetta s‘ir

Men- nhar za l-ksad /ma homa f-kher

Lotobis / koLwaqt m ‘ammer /

Mol t-taksi ger ka ihammer /

Melli za bqa msemmer

Ya hasra / ‘la sna ‘t-el-ktatbiya /

F- f-es-skwila qrau- b-en-niya /

T‘allmo l-‘azmiya/lil u nhar

Had el-ksad / zahom ghefliya /

U d-diplomat dyalhom / khebbauhom j-ed-dar

Traduction

La crise partout s’est installëe, tous les metiers, elle a mine en ees temps traitres.

Les cordonniers, dans leurs ëchoppes passent leur joumëe au soleil mais de travail, point!

C'est Bata qui les a ruinës en vendant leurs chaussures moins cher que les pommes de terre.

Les bouchers se lamentent en pensant aux jours heureux . Nul ne reclame leur viande…

Les coiffeurs, ça court les rues, chacun se prend pour Figaro

Et qu’importe si un client en sort l’oreille coupëe, et la barbe a moitië rasëe

Apeurës, les autres se sont enfuis, le salon est devenu boucherie

Les marchands des quatre saisons ëtalent leurs fruits pour la dëcoration. Pour eux cette annëe n’est que lamentation. Petits pois et haricots, a prix cassë, seuls les riches peuvent en consommer

Pour des pommes de terre et des poivrons pourris les gens se battent.

Qui peut encore un tajine se payer ?

Les marchands d’ëtoffes sur leur marchandise sont assis. Nul ne rëclame leurs produits, la concurrence des Japonais les a ruinës.

Les platriers au cafë passent leur joumëe, Juifs, Musulmans et Draouis.

Leurs enfants manquent d’habits, et leurs femmes pleurent jour et nuit.

Les peintres, dans le vin noient les quelques sous difficilement gagnës.

Les cochers voient passer les autobus qui, les clients, leur ont pris.

Sur les taxis je pleure, je les vois stationnës, nul ne les appelle

Malheureuses aussi les secretaires. A l’ëcole, le français elles ont appris. Jour et nuit, elles ont ëtudië et leurs diplomes, depuis longtemps, a la maison sont rangës.

Auteur :Shim‘on ben Ephraim ( Casablanca)

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-el-miziria-page53-56

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-el-baqq-Qasida des punaises

Qseda d-el-baqq

Qasida des punaises

Cette Qasida évoque la prolifération des punaises dans les maisons, durant la saison d’été, surtout en période de grosses chaleurs.

Veritable épidémie qui sévit pratiquement dans tout le mellah. Ces bestioles s’insinuent partout, dans les lits, les placards, les vêtements, rendant la vie intenable. La nuit surtout, impossible de trouver le sommeil. On erre d’un endroit à l’autre de la maison dans l’espoir de trouver un répit, mais rien n’y fait . Difficile de leur échapper. C’est la lutte permanente dans la maison pour tenter de se débarrasser de ces parasites, en ébouillantant les sommiers, les tables, les chaises, en somme tout le mobilier en bois où elles peuvent s’incruster.

Aziu tsam ‘o ya khwanna / di-habb irtah u ithanna / isken f-el- patio di derb Bohanna / ma isuf ‘dab /ya s-sam ‘in.

El-baqq temma ktar / teqder twusqo b-el-qantar / tsafdo f-el- paporat el- kbar / u terza‘ men t-tazrin

Hada l-patio u beqqo / f-el-lil / n-nas ibato ihekko / si f-rezlo u si f-‘anqo /u si itekhlo lo f-lodnin

Klami msedder b-et-tmam /el- baqq had-el ‘am / ka-ikhrez gher f- ed- dlam / ba‘d ed-dawat metfiyyin

F-el bit ma zani n‘as / rza‘t kfes men zmi‘ en-nas/ ka nesbah mhayyer b-er-ras/ el-lil kello men es-sahrin

Kherzet l-el- brah nethenna / sa‘a se‘latli l-mahna / ka trahom mseddrin foq l-mderrba u la‘bana / teht- el-mkhedda/fhal el-mhail daizin

Di saken f-el bit d-el-bni / ‘ammro ma irqed mhenni / el- ba qq kharzin men sqofa u men-er-rkani / fhal l-‘askar msettfin

Auteur : Hanania Dahan

[1] Derb Bohana est le nom d’une me populeuse de Meknès à laquelle l’auteur fait allusion ici sur un ton ironique.

Traduction :

“Mes frères, venez écouter mon histoire : celui qui veut vivre tranquille dans le patio de Bohana, qu’il élise domicile.

Il n’ y souffrira d’aucun déplaisir.

Les punaises pullulent là-bas.

Vous pouvez même les commercialiser par quintaux et les exporter par gros bateaux .

Vous deviendrez assurément très riches.

Dans ce patio, ses occupants passent la nuit à se gratter, les uns, le pied, les autres, le cou.

D’autres enfin, de leurs oreilles sont dépouillés.

Voulez- vous que je vous dise ?

Les punaises cette année ne sortent que dans le noir après que Ton a éteint les lumières du soir.

Dans la chambre je n’ai pas pu m’endormir et le matin, ma tête est dans un affreux tournis tant j’ai demeuré éveillé toute la nuit.

Je me suis réfugié dans la cour pour y trouver quelque répit, mais là, c’est bien pis.

Les maudites bestioles étaient déjà alignées sur le matelas, sur la couverture et sous l’oreiller.

Telles à la parade d’une armée.

Celui qui habite une maison bâtie

Avec les punaises il ne trouvera point de répit.”

A propos de la prolifération des punaises, Joseph Tolédanc rapporte une anecdote dont le héros est un certain Joha, bien connu des Marocains.Elle s’intitule

“ Joha et les punaises.”Jha u-l-baqq.

Nous l’avons traduite en judéo arabe pour nos lecteurs:

Zha kan iqol bain sab wahd-dwa m‘azzbeb l-el-baqq di ka iqade m ahom f-merra wahda. Kan ka idoz f-es-soq u ka ibe‘ wahd-el- ghebra ghreba. Bezzaf d-en-nas srauha men ‘ando bas ithennau mell 'baqq. Wa laini wakha ressoha f-elfrasat si ma qdat. Qalo “Zha ‘ber 'lina! ”

D‘auh l-‘and el- basa. Zha qal-lo : a sidi had el ghebra di ka -be‘ ana ka teslah bezzaf l-li ihabb ithenna deghya mel-baqq walakin b-wahds-sert : di sraha kan khesso ya‘ref men qbel kifas i‘melha

Za l-basa qal-lo : u kifas ka t-ta‘mel had el ghebra ?

Zha qal-lo : l-haza sahla a sidi. Ka teqbed el beqqa u ka te ‘mellha h riri teht ibatha u hiyya ka tebda t-edhak. Ger thell femmha dik s-sa ‘a mell- ha swiyes d-el ghebra f-halqha / l-baqqa deghya ka tmot. U :agda ta‘melle-lbaqq lokhrin u tethenna m‘a rasek

“ Joha prétendit un jour avoir trouvé le remède -miracle contre invasion des punaises. Il allait dans les rues vendant une poudre mystérieuse censée en venir à bout.Mais ceux qui l’ont achetée ont eu beau en asperger les lits et les sommiers, les petites bêtes n’en avaient cure . Traduit devant le pacha pour cette imposture, Joha maintint que sa poudre était d’une efficacité sans pareille, à la condition toutefois de suivre strictement le mode d’emploi. Mais voilà, seigneur pacha, personne ne ne me l’a demandé avant d’acheter mon produit.

-Et quel est donc ce mode d’emploi-miracle, lui demanda le pacha ?

-C’est bien simple, on prend la punaise, on la chatouille un petit peu, alors elle commence à rire. A ce ce moment précis on profite qu’elle a la bouche ouverte pour lui introduire un peu de cette poudre dans la gorge et la punaise meurt instantanément. Ensuite on renouvelle la même opération avec les autres punaises, et ainsi, on en sera débarrassé.

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014 Qseda d-el-baqq

Qasida des punaises

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda- d-es- chelhat Qasida des filles chleuhs

Qseda- d-es- chelhat Qasida des filles chleuhs

Hde rasek/ la ifozo bik s-selhat y a flan .

S-selhat homa mzebbdat / el-ketra fi-hom zofriat

Homa t-tayhin del- bladat/ reddo roshom Parizyanat.

 Redd balek mleh men-chelhat

Ilatba‘tihom ‘abbak er-reh.

Hada klam -t-tesheh.

Men bladha / s-selha zat ‘aryana.

Dkhelt tekhdem b-s-semana.

Deghya wertet l-patrona.

‘abbat-lha razelha b-el khwana.

S-selha b-razelha u-oladha

Deghya ‘arratrash

L-polbo u t-tahmera f-wozeh ha

U-l manikür f-dfarha

Deghya nsat izarha

Llah iktter kher America

Di ksat Itto u Solika /

B-hwaiz d-l -bala / hiyya msiyyka

El hedra dyalha b-t-telwika

F-lotelat ka-tseyyed l-amirican

Tghemzo b-‘ineha u-tqo-llo “ kaman ! ”

U-t-tawa m ‘ah et-taman

S-selha deghya t-teksat

Ullau ‘andha ‘ser keswat

B-et-telq rfetthom m-el-l-hwant

Ka tkhalleshom b-et- ta ‘niqat u-l-bosat

U-dzid Ihom hetta l-embatat

F-es- sebt u-lhadd trahom farhanin

F-‘in Diab tsebhom sekranin

F-wost er-rzal ‘aryanin

Teht -s -szer metgergbin

Auteur : Moché Der‘i (Casablanca)

Méfie-toi des filles Chleus !

Si tu n’y prends garde elles pourraient te rouler

Elles, la lie du peuple, pour Parisiennes elles se font passer.

De son bled, la chleuh a débarqué pieds nus, à la semaine elle s’est placée.

Vite, patronne elle est devenue, et du mari elle s’est aussitôt emparée. Sa tête, elle l’a découverte, son visage elle l’a poudré Ses doigts, elle les a manucurés.

De ses origines, elle n’a pourtant cure .

Longue vie aux Américains qui ont vêtu Ito et Sulika !

De friperie elle se nippa et avec un accent, elle parla.

Dans les hôtels, l’Américain elle raccola, d’un clin d’œil discrètement “ Corne on !”, lui dit-elle, et le prix, elle négocie calmement Une garde-robe elle s’est montée, à crédit elle a tout acheté.

En baisers, embrassades et passades elle a tout payé.

Le samedi et le dimanche on peut les voir à Ain Diab

Nues et ivres sous les arbres, avec des hommes bourrés en diable.

L’arrivée des Américains au Maroc en 1942 a eu pour conséquence de libérer quelque peu les mœurs avec de nouvelles modes vestimentaires, l’usage du chewingum et l’imitation de quelques expressions américaines courantes aussi bien au mellah qu’en médina. A ce propos on se souvient peut-être de ces fameuses petites chansons populaires qu’on y fredonnait à l’époque :

Au mellah :

Ma twela ma qsera

T-ta Ion di ‘allaha (bis)

'     El polbo u t-tahmera

L-Amirican m-n-noraha

 Viens, viens dans mes bras

Elle est ni grande ni petite

Ce sont ses talons qui la grandissent

Poudrée et maquillée

 L’Américain est derrière elle

 Viens, viens

Viens viens dans mes bras

 Ana nhabbekya ‘dra ( bis)

Ana nhabbek ana n ‘azzek

 Ma tehlali hetta mra

 Viens viens dans mes bras

Viens viens dans mes bras

 Je t’aimerai ô fille vierge

Je t’aimerai, je te chérirai

Aucune autre femme

Ne pourra me charmer

 

En médina :

Ay yay ‘la had z-zman

 U chno kan ?dakhlet-l-marican

N-nas tqewwat u n-nsa ‘lina jaru

 Hetta men la ‘gaizat n-ngab daru

U ‘la chwingom saru

Aïe Aïe Aïe ! Quel temps !

Qu’est-il arrivé ?

Depuis que les Américains sont entrés

 Les hommes se sentent plus assurés

Les femmes, leur nigab, ont enlevé

Même les vieilles, le chewingum, ont adopté

 

Z-zin u-l'in z-zerga

Jana kull kheir

El-yom imchiu la-bnat

 ‘lina nafkhin

Hetta men hiyya ma ,mucha

 Daru lha cha’n l-amirican

 Ma te s ma’ger OK,OK

BYBYu KAMAN

La beauté et les yeux bleus

Nous les avons eus grâce à Dieu !

Aujourd’hui les filles sont pleines d’arrogance

Même celles aux yeux chassieux

Ont gagné de l’importance

Aux yeux des Américains

Tu n’entends que OK, OK B Y, B Y et KAMAN

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda- d-es- chelhat Qasida des filles chleuhs

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-es- chrab u mahia -Qasida du vin et de la mahia et de l’eau-de-vie

 

6 -Qseda d-es- chrab u mahia Qasida du vin et de la mahia et de l’eau-de-vie

A khwani / tsennto l-had el-qseda /

Laïkun ta‘mel si faida/

Fe-qlob er-rzal u-n-nsa /

‘Azz biya di ka nsof el‘dab /

D-el-molo ‘in b-mahia u-s-srab.

‘Ammer s-srab maya‘mel r- rbeh.

Di ka isker/kif -l-kelb ka inbeh.

Es-sekran ma daiza-s slato

 Bin en-nas ma tfut-s- sehdato

 Ma y a ‘ref la ulado wala mrato

 Ka yen ‘el f-ed-din u-l-mella

Bab zahnnam / leh /mehlola.

Sahb-es-srab / dima f-el-qhawe

 Hetta ka yebqa bestamo khawe.

T-Tora di Mosse Rabeno

 Wossatna/men s-srab netba‘do

Traduction

Ballade sur le vin et l’eau-de-vie Oyez mes frères cette Qasida !

Peut-être vos cœurs en tireront profit.

Je souffre de voir ceux qui s’adonnent à la boisson sans répit. Jamais du vin n’est sorti quelque profit.

Celui qui s’en imbibe, comme un chien aboie.

L’ivrogne, sa prière n’est point agréée,

Son serment, toujours refusé.

Il ne connaît ni sa femme ni ses enfants.

 L’injure est dans sa bouche tout le temps.

Il maudit son peuple et sa foi.

Aux portes de l’enfer, il va tout droit.

Dans les cafés, il traîne sa douleur

 Et son porte-monnaie crie malheur.

La Torah de Moshe Rabbeno

Recommande de s’éloigner de la boisson illico

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Qseda d-es- chrab u mahia Qasida du vin et de la mahia et de l’eau-de-vie

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Histoire de la mahia au mellah

Histoire de la mahia au mellah

Tout le monde buvait de la mahia au mellah, même les femmes et les enfants, même les rabbins, et cela à toutes occasions .A ce propos, je me fais un devoir de me référer à J.Tolédano qui en a retracé l’histoire avec justesse, finesse et humour, en connaisseur avisé des traditions juives de sa ville natale Meknès qu’on appelait autrefois “ la petite Jérusalem”

J’en appelle pour cela à son amabilité pour qu’il me permette de citer un extrait de l’article magistral qu’il a consacré à l’histoire de la mahia “ Plaidoyer pour la mahia, dans son ouvrage “ l’Esprit du Mellah Ce faisant, je ne ferai que rendre hommage à sa réputation d’historien et d’ethnologue de la vie juive du mellah :

“ Autant que le thé à la menthe, sinon plus, la mahia était la boisson nationale des juifs du Maroc, un élément du folklore du mellah, avec ses drames, ses bonnes histoires, ses excès, ses légendes et ses miracles. Enfermé dans son mellah, le juif trouvait sa raison de vivre dans la fidélité à la Loi et son appétit de vie terrestre dans la bonne chair et la boisson . A petites doses la mahia était une bénédiction, un euphorisant qui vous fait oublier les misères de la vie ; à doses excessives une plaie. Les raisons de boire ne manquaient pas. La mahia n’apparaissait généralement à table, que lorsqu’il y avait une Sebba c’est à dire une occasion, une raison, comme l’a si bien noté Pascale Saisset dans son livre “ Heures juives au Maroc ” :

“ La mahia n’a pas son pareil pour animer les conversations.Elle accompagne tous les évènements heureux ou malheureux de la famille. Il n’est point de pauvre qui n’ait chez lui une provision dont il fait usage pour toute réjouissance :la petite réjouissance du chabbat, la grande réjouissance d’une fête rituelle ou d’une circoncision ou d’un mariage. On en boit lorsqu’on a des coliques, on en prend une lampée lorsqu’on est fatigué, ou pour calmer une rage de dents.Mélangée avec du cumin, elle est utilisée comme médicament qu’on appliquait sur les plaies.

Autrefois la mahia se fabriquait à la maison. Depuis l’occupation française en 1912 la distillation artisanale n’était autorisée que sous le contrôle de l’Etat et à certaines conditions.Croyez-vous que les juifs se soient résignés à cette interdiction?… ”

Certaines villes du Maroc étaient autrefois réputées pour la qualité de leur mahia en raison de la qualité de leur raisin et de leurs figues comme par exemple Debdou, Demnat, Fès et Meknès.

La fabrication de la mahia a souvent été la cause de démêlés avec les autorités. Dans sa tolérance, l’Islam maghrébin a toujours permis aux juifs de fabriquer leur boisson favorite, à condition de ne pas en vendre aux Musulmans. Le Pacte de la Dhimma qui régit le statut des non-croyants en terre d’Islam, interdit de détourner les fidèles des principes de leur religion. Mais pour les professionnels de la distillation -et il ne fallait pas un grand équipement, outre un alambic rudimentaire – le musulman était le meilleur des clients .

La Chronique de Fès (Yahas F as), abonde en avertissements des autorités contre ce commerce illicite et en Takanot (ordonnances rabbiniques), interdisant formellement de fabriquer au-delà des besoins de sa propre famille, pour assécher ainsi l’approvisionnement du marché noir.

En 1736, les notables et les rabbins de la communauté de Meknès habilitèrent leur Grand Rabbin Rabbi Yaacob Tolédano, à fixer à chaque famille un quota suffisant à ses propres besoins et qu’ il était interdit de dépasser sous peine d’amendes .Il fallut toute l’autorité de ce dirigeant hors pair pour enrayer le fléau -momentanément..

L’arrivée des Français, faillit bien coûter la vie à la mahia si les Juifs s’étaient résignés. Les autorités voulurent en effet imposer comme en France le monopole des vins et alcools. Dans un premier temps, elles se contentèrent de limiter la fabrication domestique aux besoins familiaux, ensuite elles interdirent totalement la distillation artisanale à domicile.

Face à ce cruel décret la première réaction fut tout naturellement d’en appeler à la pitié et au bon sens des autorités du Protectorat comme en témoigne cette lettre adressée à l’historien Nahum Schlouz envoyé par Paris en 1914 pour enquêter sur la situation des communautés juives du Maroc :

“ Monseigneur, c’est avec de chaudes larmes et le cœur brisé que nous venons déverser notre plainte auprès de Votre Honneur et lui faire connaître une goutte de la mer de nos malheurs. Nous, les soussignés sommes pauvres et misérables…Parmi nous il y a des invalides, des orphelins et des veuves, mais nul d’entre nous ne se livre à la mendicité. Nous vivons à la sueur de notre front, de la distillation de l’eau-de-vie que nous vendons à nos coreligionnaires pour les jours de fête et de joie et nous subvenons ainsi avec peine à nos besoins. Le jour de l’arrivée des Français, nous avons pensé améliorer notre misérable vie à leur ombre, nous leur avons juré fidélité et qu’avons-nous reçu en échange ? Leur première mesure a été de nous priver de notre gagne-pain, en ordonnant que désormais, nul juif, riche ou pauvre, n’aurait plus le droit de distiller car ce commerce leur est réservé et ils ont établi des gardiens dans la ville. Tout contrevenant est sévèrement puni, et la petite source qui nous faisait vivre a été asséchée.Nous avons adressé nos suppliques aux quatre coins, nous avons essayé de parler au cœur des ministres et des juges, mais il n’y a point de sauveur. Maintenant que la lumière de Votre Seigneur est tombée sur nous, nous nous prosternons à vos pieds d’avoir pitié de nous, des familles réduites à la faim, de bien vouloir intercéder auprès des autorités pour qu’elles adoucissent la sévérité de leur décret qui nous a touché jusqu’à l’âme, et de nous laisser entrevoir une ouverture, ne serait-ce que de nous imposer une taxe mensuelle ou annuelle afin de nous permettre d’exercer notre métier que nous savons faire. ” Pour autant la distillation ne chôma pas un seul jour malgré les menaces et les perquisitions. Les amateurs de “ la goutte forte ” ne connurent jamais de manque. Il y avait dans chaque mellah quelque brave matronne à vendre ses bouteilles de mahia en cachette. ”

A Meknès on racontait d’inombrables anecdotes à propos des amateurs invétérés de mahia dont le fameux Yousef Chriqui. “ Sa popularité à Meknès, nous dit Joseph.Tolédano, n’avait d’égale que sa bonne humeur car il avait la mahia gaie et l’humour désopilant. Au lieu d’être la victime des histoires d’ivrognes il en était bien souvent l’auteur .” En voici quelques unes à titre d’exemples :

A suivre

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014 Histoire de la mahia au mellah

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Histoire de la mahia au mellah- Les facéties du sieur Chriqui

Les facéties du sieur Chriqui

Le raisonnement de Chriqui

Le rabbin tente de raisonner le sieur Chriqui pour qu’il lmite sa boisson de mahia, sous peine de divorce demandé par sa femmme .Mais grâce à son humour Chriqui eut le dernier mot .Il réussit à retourner la situation en sa faveur.

Freha ihodiya f-Mknas / d‘at razelha Yousef ‘and-el- hakhamim / men hit kan iketter bezzafmen mahia.

Za- r-Rebbi qal- lo : “kifas a Yousef ma-ka tehsems ? nti ba‘da wuld-en-nas / foqas masi tresse rasek / u teqdi men-had- l- bliya rah mratek ka tetleb t-tlaq”

A sidi / had-el-mra ma ka tqol- s- el-haqq. Dima ka-tfettes kifas tlomni. Kifas tqol li belli ana skairi ya r-Rebbi ?

Haqq-s-Saddeqim la‘zaz ma ka nesreb gher ila kant si sebba u had-si ma ‘rof / F-es-sebba / ma memno ‘s / sreb di kwiyes di mahia / adraba lazem l-wahd isreb swiyes bas ifrah m ‘a n-nas

Zaubo r-Rebbi u qallo M‘ak el-haqq ! Iwa daba qolli ila ma kant-s s-sebba / imta ka- tesreb ? ”

“ Iwa nhar es sebt / li-khbod Sabbat / ma nesrebs swiyes bas nkun ferhan?

“ Iyyeh ! nhar -sebt lazem bnadem ikun ferhan ! Iwa azina daba l-n-nharat l-okhrin !

Iwa nhar el- hedd / bas ma nensas / el ferqa d-es-sebt

lazemni nsreb swiyes / bas nheyyed el -ghbina.

Qallo r-Rebbi : “Iwa hadi niyya mezyana ! Adraba misva ! ”

Nhar el tnin / ka nzebdo s-sifer / ma nesrebs kwiyes ?

Wakha ! nkhelliu daba nhar l-tnin / azina l-nhar- t- lata !

Iwa nhar t-tlata / el -Hakhamim / ka-ibarkoh zoz d-el-

merrat u hna nkhassro feh ?

Wakha ! khelli nhar et-tlata / azina l-yom l-arba ‘ !

Khelliyom l-arba‘ /daba nerz‘olo men ba‘d. Nhar el-khmis ka- nzebdo ‘awd es-sifer. Iwa nhar l-tnin ferhna beh b-kwiyes u nhar l-khmis ibqa itim ? Masi hram ? Nhar ez-zem ‘a / la-ghedda ka izi s-sebt/ma nkonos ferhanin / u nserbo kwiyes ?

Zaubo r-Rebbi u’qal-o : “Iwa daba nerz‘o lyom l-arba‘as masi

tqol li daba ? ”

-Ah ya Rebbi ! wakha nhar wahed f-ez-zem ‘a / hram bnadem isreb si qtera bla sebba ? Masi hsoma /mrate tqolli ana skairi ¡ ‘la qtera di nhar- l-arba‘ ?

El-Hakham ma sab ma iqol. Za l-emra u qal-lha : “ sma ‘ a khti qtera di mahia /zaida au naqsa nhar l-arba‘ / ma feha bas ma kain ‘las tetleb t-tlaq / Razlek ka- ihabb en- ñas u- l-frahat udaba ‘amlo s-salom binatkom veatem salom

Traduction :

N’as-tu pas honte ? dit le Rabbin . Toi Yosef, un fils de bonne famille, gâcher ta vie à boire au point que ta femme te traduise aujourd’hui devant le tribunal pour demander le divorce ? Jusqu’à quand persisteras-tu dans cette voie ? Le mari démentit catégoriquement les accusations de sa femme.

“ Elle ne cherche que des prétextes, dit-il, moi un ivrogne ?

Ya rabbi ! Je jure par tous les saints que je ne bois jamais s’il n’y a pas une Sebba, une raison particulière, et c’est connu que, quand il y a une Sebba, non seulement il n’est pas interdit, mais il est même recommandé de boire ”

C’est vrai, dit le rabbin . Alors dis-nous quand est-ce que tu bois ?

C’est simple : samedi c’est le shabbat, doit-on le passer dans la tristesse ?

Non, dit le rabbin, le shabbat il faut en effet se réjouir likhbod Shabbat

Dimanche ? La veille c’était shabbat. Alors, comme ça, on va vite l’oublier ? Alors je bois un peu en l’honneur du shabbat.

C’est une noble attention, dit le rabbin

Lundi on sort le Séfér Torah à la synagogue.Alors ça ne mérite pas, dit-il, un petit verre ?

Passe pour le lundi !

Mardi ? N’est-il pas écrit que c’est une journée doublement bénie par nos rabbins et nous, nous ferions la fine bouche ?

D’accord pour le mardi, et le mercredi ?

Laissons le mercredi de côté, nous y reviendrons plus tard.Le jeudi on sort de nouveau le Séfér Torah . Alors le Séfér du lundi, on l’a accueilli avec un petit verre et celui du jeudi on le laisserait orphelin, n’est-ce pas hram ?

Vendredi, c’est évident, le lendemain c’est Shabbat, n’est-ce pas une occasion de se réjouir , kabalat Shabbat ?

Et le mercredi, alors? demanda le rabbin comme pour l’acculer.

Alors ya-Rabbi, quoi !Même un jour par semaine il est interdit de boire un petit verre ? N’est-il pas honteux que ma femme me traite d’ivrogne pour la seule goutte du mercredi

Le rabbin désarmé par l’apparente bonne foi du mari se tourna alors vers la femme et lui dit :

“ Ecoute, un petit verre de mahia peu ou prou le mercredi ce n’est pas si méchant et ne justifie pas que tu demandes le divorce.Ton mari aime les gens et les réjouissances, Il n’y a point de mai a cela . Allez, partez en paix !

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014 Histoire de la mahia au mellah Les facéties du sieur Chriqui-page 74

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014- Histoire de la mahia au mellah- Les facéties du sieur Chriqui

El-hlam- d-Chriqui/le rêve de Chriqui

Hlemt wahd l-lila bas ana motet / u men hit kont ma‘rof f-Meknas ‘abbauni l-gan‘eden. Ferhet wahd-el-ferha di ma‘andha qyas ‘la ‘qibal dak-el-kabod di ‘amloli. /

Wahd-en-nhar / ana daiz f-es-soq / wana ka nra mol-liqama / huwwa wahd-er-rebbi kbir di Meknas. Zidet si khalfat / wana ka nra ‘aud wahd-er-rebbi akhor d-el blad / gales ka ibe‘ f-wahd-el- hwinta.

T‘azzebt m- dak-essi di ka nra . Khammemt m ,a rase u qolt “ Was kain si sra ‘ f-gan ‘eden / bas-el-hakhamim el kbar d-el-blad i‘iso f-had d-della ? Ana hakdak / baqe ka-nkhemmem / wana ka- nra wahd-el kerrosa / ka-izerroha setta d-el-khil m ‘azzbin / u-n-nas kellhom ka-itba ‘do hetta ka-d-oz.

Qolt skon mol had-el-kabod kello wana ka-nra f-el kerrosa sahbe Béton /di konna dima f-el-‘rasat u-l- miali / u mahia gher qebb ‘liya nqebb ‘lik Bqit dahes men dak -essi di ka-nra. Zit ana qolt-lo : “ Kifas a Béton oselt l-had -el-kabod kello ? qal-li : dak-essi-li ka tra / ‘la qibal mahia llah ibark fiha !

 Za S-Sreqi qal-lo : hetta ana m-di nmot i‘amloli had-el-kabod ? qal-lo : l-la ! men hit ana / bdit nesreb men seghri / men di ka-nqom f-es-sbah bekkri/u-mma ntin /kont ka-tsenna d-dhor / ‘ad ka tebda tesreb. ”

Iwa hadi hiya ‘las m-en-nhar di hlem dak-el-hlam / S-Sreqi bda isreb hetta huwa men di ka-iqom f-es-sbah fhal sahbo Béton.

Traduction

Une nuit, je fis un rêve étrange. J’ai rêvé que j’étais mort et comme j’étais bien considéré à Meknès, je fus naturellement dirigé vers le Paradis . En me promenant dans les rues, je cherchais des visages connus .Mais ce que je vis me laissa ébahi :le marchand de menthe n’était autre que le grand rabbin de ma ville.Quelques pas plus loin, une autre surprise m’attendait : une petite échoppe était tenue par un grand rabbin. Tout à mes pensées sur les mystères de la justice divine, je vis arriver un magnifique carrosse tiré par six superbes chevaux et tout le monde s’écartait sur son passage. Je voulus savoir qui en était l’heureux passager et ma surprise fut encore plus grande. Ce dernier n’était autre que Betton, mon compagnon de toutes les saoûleries dans les mariages et les fêtes! Je lui dmandai ce qui lui avait valu tant d’honneur. “ Je dois tout à la mahia, bénie soit-elle ! ”

Alors, moi aussi quand je serai mort j’aurai droit à de tels égards ?

Ah ! non, toi tu seras à un degré moindre, parce que moi je commençais à boire très tôt le matin, alors que toi tu attendais l’après-midi ”.

Voilà pourquoi Chriqui s’était mis à boire lui aussi dès le lever du jour comme le faisait son ami Betton.

Langues et folklore des Juifs marocains-Pinhas Cohen-2014 Histoire de la mahia au mellah Les facéties du sieur Chriqui-page 75

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