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Epreuves et liberation. Joseph Toledano

Non au congrès juif mondial

Dans cette atmosphère, il ne pouvait être question pour les autorités du Protectorat de permettre à la communauté juive marocaine – à laquelle elles refusaient tout organisme représentatif sur le plan national – de prendre part à l'essai de mobilisation globale du peuple juif, dans le cadre du Congrès Juif Mondial. Elles ordonnèrent à leur homme de confiance Yahya Zagury, l'Inspecteur des Institutions Israélites, de ne pas répondre à l'invitation qui lui avait été adressée de prendre part à la réunion fondatrice à Genève en 1933.

«Les résolutions prises visent à donner au Congrès le caractère d'une représentation légitime du peuple juif, au moyen d'élections organisées dans le monde entier. Il ne saurait être question pour les sujets marocains de religion israélite de répondre à des appels de cette nature et d'élire des représentants pour participer aux réunions de Genève… »

Le Maroc ne fut donc représenté pour la première fois aux assises du Congrès Juif Mondial qu'à titre individuel. Faute d'autorisation des autorités pour l'envoi d'une délégation nationale, plusieurs personnalités de Casablanca accréditèrent l'un des leurs, l'homme d'affaires internationales, originaire de Tanger, Jack Pinto, pour se rendre à la réunion suivante à Genève, en 1936.

Sans tenir compte de l'ambiguïté de son statut, il s'engagea au nom du judaïsme marocain :

«Le judaïsme marocain est disposé à donner son concours, en vue de la coordination des efforts des divers groupements juifs du monde, dans un esprit de loyauté envers nos patries respectives…

Nous continuerons à renforcer l'œuvre de compréhension mutuelle d'Israël et des nations, entreprise par ce Congrès. Aussi nos efforts tendront à maintenir et à développer les bonnes et sincères relations existant entre nous et les Musulmans du Maroc. Nous tenons à déclarer, en cette circonstance solennelle, notre profond attachement au gouvernement de Sa Majesté le sultan et à la France, nation protectrice. »

Le renouveau de l'agitation

Après une année d'accalmie en 1935, l'antisémitisme européen connut une nouvelle recrudescence, attisée par le débordement d'enthousiasme et les espoirs soulevés, dans la jeunesse juive marocaine, par l'arrivée au pouvoir du Front Populaire.

Grisée par l'événement, la jeunesse juive évoluée des grandes villes " osa " franchir le Rubicon et prendre position, pour la première fois, sur la vie politique française. Le professeur Dutheil du Centre des Hautes Études musulmanes de Rabat, l'école de formation des Contrôleurs Civils, rouage essentiel de l'administration coloniale, analysait ainsi le phénomène :

 « II est certain que du jour où ils ont vu pour la première fois un Israélite devenir Président du Conseil des ministres en France, les rêves les plus fous ont pu être échafaudés. On l'a nettement senti dans le comportement général des jeunes qui, manquant totalement de mesure, ont pris des allures affranchies, arrogantes, sachant au besoin rappeler leur communauté de race avec Rlum et ses nombreux satellites »

La judéité du chef du gouvernement Léon et ses idées libérales en matière de colonialisme exacerbaient la virulence des menées antisémites qui trouvèrent un nombre grandissant d'adeptes parmi les membres de la colonie française locale, indisposés par cette immixtion des nouvelles élites juives dans la vie publique " qui ne les regarde pas ". Quant aux Musulmans politiquement évolués, qui se plaignaient souvent du renversement de situation en faveur des Juifs depuis l'instauration du Protectorat, ils ne réagirent pas négativement à l'arrivée de Blum au pouvoir – bien au contraire. Peu importait pour eux que le chef du gouvernement français fût juif, pourvu qu'il fût ouvert à leurs revendications de liberté. A Fès, des intellectuels juifs et musulmans, plus ou moins proches des communistes, fondèrent en juillet 1936 une Union Marocaine des Musulmans et des Juifs, un groupement décidé à faire entendre sa voix sur les affaires publiques, notamment sur la liberté d'association. Quelques Juifs, proches du parti communiste, contresignèrent les télégrammes de protestation du Comité d'Action Marocaine contre l'arrestation de ses militants par les autorités du Protectorat :

\ Face aux provocateurs et aux manœuvres tendant à dissocier les Juifs marocains de leurs frères musulmans, nous intellectuels juifs marocains, affirmons une fois de plus, avec une énergie accrue, notre ferme volonté de rester indissolublement liés à eux pour le bien-être du peuple marocain, sans distinction de race ni de religion. Vive le prolétariat du mouvement marocain ! »

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