La persecution anti-juive au Maroc sous le regime de vichy 1940-1943

La persecution anti-juiveLa persecution anti-juive au Maroc sous le regime de vichy

1940-1943

Joseph Toledano

Le comite de coordination des organisations des originaires du Maroc en Israel

 Les méandres d'une politique coloniale

Voilà un petit livre qui manquait, depuis longtemps sur les de bibliothèques. Joseph Tolédano, dans un style simple, concis et direct arrive à nous faire découvrir les visages divers de la politique juive du gouvernement de Vichy au Maroc. Il y aborde la législation anti-juive de l'équipe Pétain en France, décrit les manœuvres du résident en place pour l'appliquer au Maroc, retrace les tergiversations du Palais (Sultan) à Rabat et nous narre les tractations des dirigeants communautaires de plus en plus aux abois. On y retrouve les colons en place, grands racistes envers tout ce qui n'est pas colon, le résident Noguès, caméléon politique venu du Front Populaire devenu grand serviteur de la Révolution Nationale, Mohamed V qui essaie de préserver à tout prix la façade d'un pouvoir plus que virtuel, les rabbins et chefs des communautés, au sein de la tempête, sans boussole ni compas et aussi la figure si attachante de Nelly Cazès Benattar, femme remarquable de perspicacité, bien en avance sur son époque quant aux droits de l'individu face aux pouvoirs et autorités. Peu connu est le fait que la communauté juive au Maroc vivait un temps de terreur, menacée non par un ennemi nazi direct mais par des suppôts locaux qui n'attendaient que l'occasion pour « en mettre plein à la gueule aux yahud », à défaut de bougnoules. Les pogromes étaient aux portes des mellahs à l'heure où les flottes américaines débarquaient les « boys », reçus en messies.

La reconstruction minutieuse par l'auteur, des lois, dahirs, décrets, arrêtés et règlements divers met en lumière l'intense intérêt des autorités de Vichy sur la question juive. De même qu'en Europe, ministres, parlementaires, préfets, fonctionnaires et policiers n'avaient rien de mieux à faire que d'organiser des rafles de vieux en hospices et d'orphelins en institutions, au Maroc, la Résidence passait son temps à peaufiner des textes aux buts de démarquer juridiquement les populations juives des populations locales.

Au-delà de la réanimation de cette période si peu connue par les chercheurs de tous bords, le petit livre de Tolédano est aussi un excellent cours sur les méandres de la politique coloniale française. Il ressort de cette modeste étude que toute la politique française au Maroc se résumait à cette déclaration « J'y suis, j'y reste ». Tous les choix concrets par la suite, n'étaient que les conséquences de cette prémisse.

Dans un premier temps, pour éviter de former des élites locales musulmanes, susceptibles d'avoir des velléités d'indépendance, le protectorat utilise les populations juives comme intermédiaires face aux populations indigènes. C'est la période de la France généreuse des droits de l'homme que chantent les chantres du judaïsme marocains. L'administration, l'éducation, les métiers, les professions libérales s'ouvrent aux juifs qui s'y engouffrent avec frénésie.

La triste période de Vichy est perçue par le judaïsme marocain comme la trahison de la France. Celle-ci pour donner grande allure à sa collaboration, organise une gamme variée de persécutions à l'encontre des populations juives, hier alliés fidèles. Que faire donc avec les populations musulmanes? La réponse est toute prête ־ on va leur vendre du juif. Nous allons créer un antisémitisme musulman à l'européenne. Et voilà le protectorat en berger de boucs émissaires et en tuteur de prêtres sacrificateurs. Le débarquement américain devait créer un nouveau méli-mélo puisqu'il fallait se mettre à la mode démocratique. Cela ne s'est pas fait de bon gré. Les nouveaux dirigeants français au Maroc, essayèrent de tergiverser, abrogeant une partie du statut des juifs, conservant une autre, manœuvrant de façon à se plier au nouveau langage à la mode et continuant une politique de divisions à même d'assurer une main mise sur le pays avec ou sans droits démocratiques. Ce sont ces conduites, ces politiques où la bêtise ne le concède qu'à l'intérêt brutal et à court terme que ce petit ouvrage, lumineux, sympathique tout en touches délicates, plein de sympathie pour ces « petits »juifs perdus entre les grands de ce monde, nous fait toucher du doigt. Lire sur cette période, sous le regard attentif de Joseph Tolédano, c'est à la fois recevoir l'enseignement d'un maître mais aussi sentir le souffle d'un vrai humaniste et le plaisir d'une écriture de haute qualité.

Raphaël Ben Shoshane

Secrétaire général du Comité de coordination des organisations d'originaires du Maroc en Israël

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