La periode Romaine

mauritanie tingitane

Histoire du Maroc -M.Terrasse

LA PÉRIODE ROMAINE

Au Maroc, comme partout, la civilisation romaine nous est mieux connue par l'archéo­logie que par les textes. Or depuis une quinzaine d'années on a fait des découvertes nombreuses qui ont apporté beaucoup de neuf.

Les méthodes de fouille et les préoccupations des archéologues ont évolué. On cher­chait surtout des œuvres d'art et des inscriptions ou des monnaies. L'étude de ia céramique, « fossile directeur » par excellence, a été très poussée et permet des datations sûres. L'on s'attache davantage à l'histoire des sites, par des méthodes stratigraphiques L'on cherche à connaître la civilisation sous tous ses aspects, matériels et psychologiques la reconstitution se fait à partir des restes, aussi humbles soient-ils, que le sol conserves

 On voyait trop la Tingitane à travers Volubilis, par la force des choses, puisque ce site fut pendant longtemps le seul largement dégagé. D'autres villes antiques ont été fouillées, et les résultats amènent souvent à corriger les appréciations antérieures.

  1. LA DOMINATION ROMAINE. CONDITIONS ET LIMITES
  2. L'occupation militaire.

La Maurétanie Tingitane n'est pas une province romaine comme les autres. La domi­nation de Rome y a des caractères particuliers : territorialement réduite, peu enracinée, elle semble avoir moins visé le pays en lui-même que la possibilité de fermer un espace vide entre l'Espagne et la Numidie qui étaient parmi les plus riches territoires soumis à Rome (Texte 1).

L'assassinat à Rome du roi de Maurétanie, Ptolémée, en 40 après J.-C. par Caligula, l’empereur fou, ne suffit pas à mettre dans la main de Rome son royaume. Il faut quatre ans d'une guerre très dure pour mater la révolte conduite par un affranchi du souverain, Aedemon. Il faut deux légions et de forts contingents de troupes auxiliaires pour en venir à bout.

Les villes ne soutiennent pas ce mouvement, au contraire. Volubilis par exemple envoie, sous le commandement d'un de ses magistrats, des troupes aider Rome. On comprend cette attitude si l'on remarque qu'Aedemon chercha appui auprès des tribus du Sud, éternellement prêtes aux razzias contre de riches cités. Les généraux romains doivent envoyer des colonnes à travers l'Atlas, jusqu'au Sahara, afin d'éliminer la menace qu'elles faisaient peser sur les communications romaines par leur incursion le long de la Moulouya jusqu'à la côte.

Il semble que malgré ses victoires sur les derniers rebelles, Rome préfère diviser ce vaste royaume de Ptolémée en deux provinces de part et d'autre de la Moulouya : à l'Est la Maurétanie Césarienne, du nom de sa capitale, loi Césarea, à l'Ouest la Maurétanie Tingitane du nom de Tingis (Tanger). C'est l’empereur Claude qui fixe le statut et les limites de cette dernière.

Par la suite la Tingitane est relativement calme. Nos sources ne mentionnent que quelques mouvements peu importants jusqu'à la fin du IIIe siècle, moment où se produit, comme dans tout l’empire romain, une crise sur laquelle nous reviendrons.

Les forces militaires chargées de la défense ont varié en importance du Ier au IIIe siècle. Les détachements sont d'importance numérique inférieure à celle des légions, et de recrutement différent : ils sont aux Ier et IIe siècles composés uniquement de provin­ciaux, illyriens, espagnols, gaulois, etc. On a compté de deux à cinq « ailes » de cavalerie et de six à neuf cohortes d'infanterie soit au total de 8 à 14 000 hommes. Le chiffre peut paraître faible, mais il est comparable aux effectifs de Numidie et d'Afrique proconsulaire, qui sont plus étendues.

Ces soldats sont stationnés dans des camps. On a retrouvé et fouillé en partie ceux de Tocolosida et d'Aïn Chkour près de Volubilis, et celui de Tamuda; il y en a un à Sala et plusieurs dans les environs de Tanger et de Lixus.

On connaît aussi au Sud de Rabat, à environ 12 kilomètres, une ligne fortifiée constituée par un fossé et un talus, renforcés de loin en loin par des tours de guet dont il ne subsiste que les emplacements. Cet ouvrage, appelé « seguiat el Faraoun », s'étend de la mer au confluent de l'oued Akreuch avec le Bou Regreg.

  1. Le problème du limes. Les rapports avec les Berbères.

La présence de ce « fossatum » de quelques kilomètres a fait longtemps espérer retrou­ver le « limes », c'est-à-dire une frontière comme celle qui existe vers le Hodna, en Algérie, sur des centaines de kilomètres.

Les recherches, faites avec les méthodes de prospection aérienne utilisées en Algérie, ont été négatives. Hormis le tronçon déjà connu, on n'a trouvé entre Sala et Volubilis aucun élément permettant de croire à l'existence d'un dispositif fortifié romain. Toutes les ruines qui ont été signalées comme romaines, sont berbères ou musulmanes et d'époque médiévale le plus souvent. Les restes très peu nombreux retrouvés à Annoceur, dans le Moyen Atlas, ne sont pas ceux d'un poste, mais proviennent de Volubilis.

A l'Est de Volubilis des recherches ont été menées pour trouver la liaison avec la Maurétanie Césarienne : on ne trouve aucun témoignage de la présence romaine; des nombreuses ruines de la région d'Oujda aucune n'est de construction romaine. Le premier poste romain de Césarienne est Numérus Syrorum, près de Lalla Marnia; il est tenu par des auxiliaires syriens, chameliers spécialisés dans les patrouilles au désert. Il n'y a donc pas de liaison permanente, aménagée entre les deux Maurétanies. Ces conclusions ont de quoi surprendre, mais ne semblent pas pouvoir être mises en doute.

Comment alors est assurée la sécurité de la province et de quelle manière se font les relations par voie terrestre avec la province voisine ? Entre Sala et Volubilis les obstacles ne semblent pas suffisants. Au contraire la configuration du terrain, les forêts, peuvent être aussi favorables aux attaquants qu'à la défense. On peut se demander si chaque cité n'assure pas sa défense : Sala avec son micro-limes, Volubilis entourée d'un rempart et protégée par des camps militaires, Lixus avec son rempart préromain. Mais ces remparts de ville n'ont pas une grande valeur défensive, et en général Rome ne fractionne pas les forces militaires; au contraire elle excelle à organiser de vastes dispositifs.

Une autre hypothèse peut être avancée sur la base des études faites sur le « limes » de Numidie. Il est démontré que ce n'est pas une frontière fortifiée linéaire, mais un dispositif profond, allant jusqu'à 60 kilomètres, et dont les pièces maîtresses sont des routes et des camps. La défense y est mobile, active. Le « fossatum » n'est que le dernier obstacle, continu, en arrière de môles défensifs échelonnés, eux-mêmes précédés d'avant- postes destinés à tâter l'ennemi. La province de Maurétanie Tingitane, peu étendue, mais disposant d'effectifs importants, et occupant une position stratégique particulière, entre l'Espagne et l'Afrique romaine (Africa et Numidie), contrôlant l'entrée de la Méditerranée, ne peut-elle être considérée dans son ensemble comme un « limes » ?

Quoi qu'il en soit il faut étudier les rapports avec les tribus berbères, voisines des cités occupées par Rome, mais hors de sa domination.

On connait à Volubilis treize inscriptions qui se réfèrent aux Baquates, seuls ou avec un autre « peuple ». Sauf une, ce sont des inscriptions qui commémorent des traités ou des renouvellements de traités, des « autels de paix ». Elles sont plus nombreuses pour le 111e siècle. La dernière date de 280. Elles nous font connaître neuf noms de princes indigènes. Certains se succèdent de père en fils, et ont adopté un nom romain, signe qu'on leur a accordé le droit de cité. L'épitaphe du fils de l'un d'entre eux a été retrouvée à Rome où il mourut à l'âge de quinze ans (Texte 2).

Ces princes « alliés » de Rome, en fait ses protégés, reçoivent d'autant plus d'avantages qu'ils sont soumis. Et ils le sont jusqu'à la date où s'arrête notre documentation. On ne peut les rendre responsables de l'évacuation de Volubilis.

Ces Baquates ne sauraient être assimilés aux Berrhouata. On retrouve plutôt leur nom chez les Boqoya du Rif. En effet ils occupent une zone au Sud et à l'Est de Volubilis, du Moyen Atlas à la Moulouya. Cette position fait comprendre l'importance du rôle qu'ils ont à jouer : ils gardent les communications avec la Césarienne. La basse Moulouya est menacée par les Bavares qui ont tenté d'absorber les Baquates au début du me siècle, mais Rome est intervenue pour empêcher ce regroupement. Déjà vers 170, les Baquates ont failli être absorbés par les Macénites, et Rome a rétabli « l'indépendance » de ses protégés. C'est vers ce moment qu'est construit le rempart de Volubilis, signe qu'une certaine menace plane alors.

A Banasa on a retrouvé une table de bronze portant la décision de Marc-Aurèle d'accorder le droit de cité à des notables d'une tribu voisine appelée Zegrense. A Sala on n'a rien retrouvé d'identique. Est-ce le hasard ou bien le fossatum rend-il moins nécessaires des accords avec les chefs des tribus voisines ? On peut aussi bien penser que les Autololes, redoutables selon Pline, refusent l'entente, ce qui a rendu nécessaire le fossé fortifié.

On est en droit de se demander si la bonne entente avec les Baquates et les Zegrenses n'a pas dispensé de la construction d'une ligne continue. Cependant sur toutes les frontières de l’empire la même diplomatie existe : Rome cherche à gagner certains chefs locaux et à s'en faire des auxiliaires dociles, des tampons entre elle et les tribus sauvages au-delà.

On pourrait dire que l'entente avec les chefs locaux continue la politique que Rome a eue auparavant envers les rois maurétaniens, qui jouaient déjà ce rôle.

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