Une nouvelle Seville en Afrique du Nord-Debdou-Une miniature de Jérusalem

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Néanmoins, la yéchiva de Debdou ne cessa de constituer un réservoir de talmidé hakhamim, dayanim et chohatim, qui exerçaient leurs fonctions dans la ville elle-même ou dans des communautés extérieures, et jusqu’en Algérie.

À l’arrivée des Français au Maroc, en 1912, Debdou compte quelque quatre mille habitants, dont deux mille Juifs environ : de ce nombre, la moitié au moins sont des Cohanim. De la quin­zaine de synagogues et oratoires de la ville, plus de la moitié sont fréquentés en majorité ou exclusive­ment par ces descendants d’Aharon qui, même en l’absence de simples «Israël», prononcent en choeur la bénédiction sacerdotale : afin, dit le Choulhan Aroukh, de «bénir leurs frères qui sont aux champs», et parce qu’eux-mêmes sont de toute façon inclus dans la bénédiction.

Plusieurs personnalités d’envergure ont illustré la ville de Debdou à la fin du XIXe siècle et a début du XXe : au premier rang, Rabbi Chlomo Hacohen, forte personnalité qui dirigea avec sagesse et fermeté sa communauté.

Deux de ses élèves exercèrent des fonctions rabbiniques hors de Debdou : Rabbi Avraham Bensoussan, qui fut nommé dayan, puis président du tribunal rabbinique de Mogador; Rabbi David Hacohen, nommé en 1913 dayan à Oran, dont il finit par diriger le tribunal rabbinique. Ses réponses halakhiques ont été éditées sous le nom de Kiryat Hana David. Un second rabbin Chlomo Hacohen, qui fut dayan à Oujda, laissa de nombreux manuscrits, et quatre volumes de responsa ont pu à ce jour être publiés (notamment Lekha Chlomo, Vayhal Chlomo, Vayéessof Chlomo et Maâloth Lichlomo).

Signalons un détail piquant : le célèbre Charles de Foucauld, qui devait par la suite finir ses jours comme ermite au Sahara, vint en 1884 à Debdou. Il était alors officier et, déguisé en Juif, parcourait le Maroc pour le compte des Services de renseignements français. À Debdou, le gîte lui fut offert par le grand-père de l’auteur de ces lignes. Les Musulmans eurent cependant vent qu’un chrétien se trouvait dans le quartier juif, et ce ne fut que grâce aux efforts dévoués des notables de la communauté qu’une catastrophe put être évitée. Le quartier juif fut néanmoins saccagé peu après le départ précipité de Charles de Foucauld.

L’après-guerre, avec l’immigration en Israël, l’Indépendance marocaine, l’installation de nombreux «debdoubis» en France, vit se clore la longue histoire de Debdou, la ville des cohanim, la petite Séville marocaine. La miraculeuse «source de Séville», disions-nous, s’est tarie soudain après avoir abreuvé de longs siècles les Juifs de la ville.

Debdou

Une miniature de Jérusalem

Traduction du livre intitulé «Yahas Debdou» d'Eliyahou Marciano, publie a Jérusalem en 1996. Natif de Debdou, l'auteur habite aujourd'hui Jerusalem ou il poursuit ses recherches  sur le patrimoine judéo-marocain. Il a publie en hebreu: «Hag Mimouna», «Bené Melahime», «Bené Haouma» et «Malkhé Yechouroun ve Chivhé hakhmé Algéria».

Les pionniers de Debdou se sont installés au sommet de la montagne qui surplombe la plaine du village. Les grottes et les cavités naturelles qui s’enfoncent aujourd’hui dans les flancs de la montagne, ont servi jadis d’habitation à la population. Et vraisemblablement de refuge en temps de guerre. En tout cas, la vie dans ce genre de grottes a offert, en période de calme, des postes d’observation avantageux sur les agitations de la plaine. Des gravures rupestres confirment cette hypothèse : nous avons découvert dans une grotte une image d’éléphant gravée sur la pierre. D’où le nom de «Grotte de l’Éléphant.»

Au XIIIe siècle, les rois de Fès mesurent la puissance de Debdou. Déjà, l’historien Ibn Saïd Gharnati mentionne dans sa correspondance «Oujda et la ville de Debdou, à l’ouest de Tlemcen».

Le plus prestigieux des historiens africains, Ibn Khaldoun, affirme lui-même s’être réfugié à Debdou : «Plusieurs personnes ont réussi à échapper aux assaillants, et se sont réfugiées sur la montagne de Debdou. Les autres, dont je faisais partie, se sont sauvées à pied dans un désert aride, démunies de tous leurs biens. De là, j’ai pu rejoindre mes compagnons à Debdou.»

Ibn Khaldoun désigne nommément le gouverneur de Debdou : «En 1364-65 Abou Hamou a pénétré au Maroc, et il a fait irruption à Debdou et ses
environs. En réaction, le chef de la région, Mohamed Ibn Zigdan le Mérinide, a fondé une ville indépendante…

À cette époque, le gouverneur de Debdou tente un assaut contre les habitants de Taza, et parvient à les assujettir. «Le roi de Fès a reconnu l’indépendance de Debdou et de la région… Les chefs de Debdou ont assiégé et assailli la ville de Taza. Mohamed Ech Cheikh avait essayé de les repousser, mais sans succès. Le roi (de Fès) a donné ses deux filles à deux des fils du gouverneur de Debdou : c’était la rançon de la paix.» (Ibid)

Le royaume de Debdou est alors à son apogée…

Au XVe siècle, un commandant Mérinide, Mohamed III, fortifie le hameau de Debdou, en y «construisant le quartier El Kasbah et la grande mosquée.» (Ibid) De fait, ce quartier représente la nette transition entre une habitation indigène et primitive (sur la montagne) et un faubourg civilisé sur la plaine et à proximité du fleuve. Ou encore, en termes de chronologie, une transition entre le Moyen Âge (semble-t-il) et le tout début du XVe siècle. Les vestiges des remparts qui datent de l’époque des Mérinides subsistent dans le quartier d’El Kasbah. Le chemin qui remonte de la tombe de Sidi Yossef (et ses environs), qui emprunte la direction du Kahf El Ma et aboutit au quartier d’El Kasbah, a subsisté lui aussi : on a retrouvé les traces de ce sentier merveilleusement dallé de pierres larges et taillées, que les habitants locaux appellent le Sentier Romain.

Les trois points d’eau principaux qui desservent le village sont la source Tafrent au sommet de la montagne, le Kahf El Ma au milieu de la montagne et la rivière Bourwed qui traverse le village.

Kahf El Ma (la grotte aquatique – appelée ainsi parce quelle abrite une nappe d’eau souterraine) a depuis toujours été un centre de villégiature, surtout aux mi-fêtes de Pessah et de Soukkot. Les annales du village ont retenu la  mésaventure d’un homme qui, entré tout seul au Kahf El Ma, en est sorti muet pour le restant de ses jours. Depuis, les visites y sont organisées en groupe et c’est avec le chant liturgique de Adon Olam Acher Malakh, que les fidèles entrent et sortent de la
grotte.

Une nouvelle Seville en Afrique du Nord-DebdouUne miniature de Jérusalem.

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