Une nouvelle Seville en Afrique du Nord-Debdou-Une miniature de Jérusalem.Aperçu  historique

Pour laconique que soit ce texte, le renseignement qu’il donne ne manque pas d’intérêt. Tout d’abord, il confirme les récits des auteurs non juifs et il ajoute deux détails fort intéressants. En premier lieu, il donne le prénom juif de Ben Mechâal; ensuite, il explique pourquoi El-Oufrani passe sous silence la manière par laquelle Moulay Er- Rachid s’empara du chef juif. L’auteur musulman, mal à l’aise, déclare «qu’il serait trop long de raconter» les circonstances de la prise d’Ibn Mechâal. Mais le chroniqueur juif n’a pas la même gêne, et il montre dans cette affaire le cas si fréquent dans l’histoire d’Israël d’un chef juif victime de ses scrupules sur le repos du Chabbat.

Mais, de tout cela, il ne résulte nullement que le pays berbère, celui des Zekkara et des Béni Snassen où se déroulaient ces événements, ait été enchanté de la disparition du souverain juif, loin de là. On voit, en effet, qu’après le meurtre d’Ibn Mechâal, les tribus berbères ne se ral­lièrent aucunement à la cause de Moulay Er-Rachid, et que celui-ci dut plutôt s’appuyer sur les éléments arabes; la résistance acharnée de ceux de Taza contre le Chérif envahisseur en dit long sur les senti­ments de ces populations à son égard. Cela permet d’émettre bien des hypothèses par la suite. Presque trente ans après la disparition d’Ibn Mechâal, on verra Moulay Ismaïl, généralement bien disposé à l’endroit des Juifs, expulser, pour des raisons inexpliquées, ceux qui habitent la Kasbah Ibn Mechâal. La Kasbah elle-même fut rasée et il n’en reste aucune trace, au point qu’il est bien difficile de savoir exactement où elle pouvait se trouver précisément. La tradition popu­laire la situe près de l’Angad, entre les Djebel Béni Snassen et les Béni Zekkara, région où se trouve encore, près de la montagne de Meqam un douar Ibn Mechâal. Dans le pays même des Zekkara, on rencontre aussi une «Montagne du Juif» qui, par son nom, rappelle celle que A. Chénier attribue au souverain juif. En outre, il y a chez les Ahl Togma des Béni Snassen, quelques tentes éparses d’Oulad Ben Mechâal qui vivaient autrefois chez les Béni Bou Abdissied. Ce seraient, d’après M. Voinot⁽¹²⁾, des descendants du Juif Mechâal que les traditions locales représentent comme ayant autrefois commandé à tous les Béni Snassen.

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