Le Mossad – Michel knafo


Double arrestation avant le franchissement de la frontière.Ginette Assouline-Michel Knafo

 

 

Double arrestation avant le franchissement de la frontière

Ginette Assouline

Ginette Assouline, Prisonnière de Sion, domiciliée à Kiryat Motzkin. A fourni on témoignage le 26.6.1995, d'après ses souvenirs et sur la demande de Meir Knafo.

En juillet 1959 à peu près, je pris contact à Casablanca avec monsieur Kaufman, qui, à ma connaissance, n'est plus en vie aujourd'hui, en lui demandant de m'aider c fuir le Maroc avec ma famille, composée de cinq personnes. Au bout d'un mois a peu près, un jeune homme me remit deux faux passeports. Il fut décidé que notre départ se ferait en deux temps: Moi-même et deux enfants partirions par la ::entière nord, et mon mari et un autre enfant s'envoleraient de Casablanca à Paris.

J'étais alors au septième mois de ma grossesse. Nous partîmes pourtant vers Tanger et de là en transbordeur jusqu'à Algésiras. Mon mari partit sans problème, alors que je connus quant à moi des ennuis.

J'avais sans doute été suivie par deux membres de la police secrète marocaine durant tout le voyage. Arrivée au transbordeur, je présentai mon passeport et c'est là que je fus arrêtée. Les détectives me demandèrent de les accompagner, et je fus ramenée à Casablanca. C'était la veille du neuf Av. Mes deux enfants furent remis par la police à mes parents et je fus emmenée au poste de police. Après un bref interrogatoire, je fus libérée et l'on m'interdit de recommencer.

Mon mari et mes enfants me manquaient davantage de jour en jour, et je redemandai un faux passeport. Une nuit, trois semaines plus tard, un jeune homme arriva chez moi et me donna un passeport et des billets d'avion pour Marseille, avec la date et le numéro du vol.

Le lendemain, en arrivant au terminal, mon pied ne s'était pas encore posé sur la rampe de décollage qu'un policier en civil me demanda de le suivre. Je fus introduite dans une salle où je fus forcée de m'étendre sur le sol, les mains dans le dos, malgré ma grossesse. Au même moment, d'autres familles – avec enfants – furent arrêtées. Les enfants furent envoyés sous la garde de policiers à leurs familles et nous fumes arrêtés. L'enfer commença alors!

On me mit dans un cachot isolé durant une semaine, durant laquelle je fus interrogée, humiliée et soumise à d'insupportables tortures. Pire encore: à force de coups et de souffrance, je perdis mon bébé.

La date du premier procès arriva. Inutile de préciser que mon père, qu'il repose en paix, prit toutes les indemnités qu'il avait reçues de son travail et me paya les services de deux avocats.

Le premier verdict, qui tomba la veille de Kippour, était de cinq années de prison. A cet instant, le monde s'écroula sur moi! Je passai à peu près un mois dans la prison de Casablanca puis on me transféra à la prison centrale de Marrakech, de sinistre réputation. Ma mère faisait tous les jours le voyage de Casablanca à Marrakech, soit quelque 450 kilomètres, pour m'apporter de la nourriture cachère.

Je fis appel, et ma peine de détention fut ramenée à trois ans. Mes parents se procurèrent des fonds supplémentaires – y compris des dons de Juifs – et un nouvel appel auprès de la cour suprême. Je fus condamnée de façon définitive à une peine d’emprisonnement d'un an et demie. En raison de ma bonne conduite, je bénéficiai d'une remise de peine de trois mois.

Après ma libération, je pus quitter le Maroc pour la France et de là vers la terre promise. En Israël, je devins aveugle et j'ai besoin aujourd'hui d'aide jusqu'à la fin de ma vie. Inutile de préciser que l'allocation que je reçois actuellement ne suffit même pas à payer l'électricité et les taxes municipales. Je souffre également d'une maladie de cœur et d'hypertension. Je suis aujourd'hui mère de sept enfants et grand- mère de quatorze petits-enfants. Seul mon mari subvient à mes besoins. J'espère que j'ai fais, au moins partiellement, la lumière sur cet épisode. C'est ce que ma mémoire me permet d'écrire. C'est là ma situation actuelle.

Dans l'espoir que cette lettre vous aidera à glorifier le judaïsme du Maroc et son combat pour une immigration libre, et afin de révéler le récit des tribulations que ces Juifs subirent avant d'arriver en Israël. 

Double arrestation avant le franchissement de la frontière

Ginette Assouline-Michel Knafo

 

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Michel Knafo-Liste (partielle) des arrestations et des détentions

Liste (partielle) des arrestations et des détentions

La liste suivante des arrestations et détentions n'est pas exhaustive, mais elle permet de donner une idée de leur caractère.

" Fin 1956, 250 Juifs, en route vers Tétouan, furent arrêtés et gardés sous surveillance dans une école de cette ville.

En 1958, 80 Juifs furent arrêtés alors qu'ils se trouvaient entre Casablanca et Tanger. Six d'entre eux furent accusés d'organisation favorisant l'immigration. Deux furent l'objet d'un non-lieu, et les autres se virent infliger des amendes de 20 a 25, 000 francs. En outre, trois d'entre eux furent condamnés à trois mois de détention avec sursis durant trois ans. Le quatrième fut condamné à dix mois de prison ferme, qu'il purgea jusqu'au procès. Le procureur fit appel, mais entre-temps tous les six s'étaient enfuis.

 Le 25.8. 1958, cent Juifs furent arrêtés alors qu'ils faisaient route de Tanger à Ceuta. Ils furent tous emmenés à la prison de Tanger, y compris des enfants d'un an. des nourrissons furent séparés de leurs mères. Les enfants, les femmes et les vieillards furent ensuite libérés, mais vingt jeunes hommes de 18 à 30 ans restèrent en prison.

En février 1959, une femme fut arrêtée avec ses deux grandes filles, pour possession de faux documents. Elle désigna l'homme qui lui avait donné ces passeports. Le père et l'oncle de cet homme furent arrêtés et cruellement battus.

Le 25.3.1959, 37 Juifs furent arrêtés à Oujda. 26 femmes et enfants furent libérés immédiatement mais les hommes ne furent relâchés qu'en mai 1959. Début mars 1959, Avigdor Benchabat, Meir Weizman et George Ohayon, tous trois âgés de 23 ans, furent arrêtés près de Mélilla pour aide aux immigrant.' Ils furent incarcérés à la prison de Nador, cruellement torturés pour en tire: des informations, puis libérés jusqu'au procès qui eut lieu le 25.5.1959. A la même époque, divers Juifs, qui avaient été emprisonnés antérieurement, furent arrêtés pour interrogatoire.

Pour aide aux immigrants et distribution de faux documents, furent arrêtés:

Maurice Alfassy le 23.9.1958.11 fot libéré le 9.10.1958.

Medalsy le 11.9.1959. Il fot libéré en même temps que Maurice.

Elmaliah le 24.9.1958. Il fut libéré sous caution le 18.11.1958.

Début mai un Juif fut arrêté à Marrakech, parce qu'on avait trouvé en sa possession une lettre d'où l'on pouvait conclure qu'il avait l'intention de monter en Israël.

Ovadia Messaoud de Casablanca fut arrêté. C'était là sa deuxième arrestation.

 Il avait passé trois mois en prison après sa première arrestation. Il fut libéré le 14.7.1959.

 Le 14.6.1959,23 Juifs de Tétouan forent arrêtés. Ils étaient en route pour

 Ceuta. De même, fut arrêté un couple juif, propriétaire de l'hôtel de Tanger où le groupe de prisonniers avait séjourné. Le chauffeur espagnol qui les avait conduits fot également arrêté.

 

Le 6.7.1959, 16 d'entre eux furent libérés.

Un vendredi soir, le 10.7.1959, trois Juifs de Fès forent arrêtés et libérés le même soir. Ils forent battus à coups de bâton durant leur interrogatoire. Les policiers voulaient savoir comment leurs fils étaient partis en Israël.

En 1959, Un Juif fut arrêté à Fès pour possession d'un calendrier du KKL. Il

 fut libéré au bout de quelques jours, sur l'intervention des dirigeants de la communauté juive.

 

Début novembre 1959, trois Juifs, un père, son fils et un accompagnateur, furent arrêtés à Casablanca, pour avoir reçu des lettres de proches en provenance d'israël.

En 1959, un père et son fils, de Marrakech, furent arrêtés. Ils furent gardés une semaine, pour avoir reçu des lettres et des photos de proches en provenance d'Israël.

 

Le 2.12.1959, il a été fait appel d'un verdict d'Albert Tordjman et Yaakov Alfassy, tous deux militants de la Misguéret. Ils furent condamnés à l'époque à un an de prison, avec 36 autres Juifs. Leur peine fut allégée en sursis et amende. L'allégement de peine fut la conséquence de l'attention portée à cette affaire par les agences de presse de l'étranger.

 

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”1 Le samedi soir 30.1.1960, deux familles d'immigrants et deux chauffeurs juifs de Tétouan furent arrêtés. Les chauffeurs furent battus et libérés. Les familles furent libérées au bout de deux jours.

3 Le 27.2.1960, une douzaine de Juifs furent arrêtés, immigrants et chauffeurs, près de la côte nord du pays. Ils furent gardés trois jours. Le juge espagnol refusa de signer contre eux un mandat d'arrêt.

3 Le 26.6.1960, vers le soir, une trentaine de Juifs turent arrêtés. Ils turent transférés à la prison de Tétouan. Les immigrants furent libérés au bout de trois jours. Les quatre accompagnateurs lurent torturés par chocs électriques. Leurs objets de valeur leur furent confisqués et jamais rendus.

3 Le 26.7.1960, six jeunes Juifs furent arrêtés. Ils turent transférés à Nador pour interrogatoire et condamnés à quatre mois de détention et à une amende de 20,000 francs. Ils turent libérés le 20.9.1960 après avoir fait appel. Il s'agissait de David Azoulay, Eli Elimelekh, Rosette Malka, Maurice Alfassy, Jacky Souissa et Maurice Chettrit.

3 Le 14.8.1960, la famille Cohen fut arrêtée dans le port de Casablanca. Ils avaient en leur possession des passeports valides. La femme fut libérée le lendemain et le mari au bout de cinq jours. Leurs passeports leur turent rendus et ils immigrèrent en Israël.

3 En septembre 1960, trois juifs de Casablanca furent arrêtés. Schlomo Azoulay tut libéré au terme de l'interrogatoire. Meir Elhadad enseignant à l'école de L'Alliance, fut arrêté à l'aéroport à son retour de France. Il tut ramené en France. Yfrah, ancien habitant d'Israël et parachutiste dans les rangs de Tsahal, qui était arrivé au Maroc, fut libéré au bout de deux jours au terme de l'interrogatoire. [Sa libération au bout de deux jours seulement parut suspecte, et Meir Knafo fut chargé de le filer quelques jours, afin de s'assurer qu'il n'avait aucun lien avec la police].

3 Le 20.9.1960, dix immigrants furent arrêtés près de la frontière puis libérés au bout de cinq jours.

3 Le 2.10.1960, un véhicule fut intercepté à 15 kilomètres de la frontière de l'enclave espagnole Mélilla. Douze Juifs, qui avaient tenté de passer clandestinement la frontière, se trouvaient à son bord. Le chauffeur espagnol, José Morales avait 23 ans. Parmi les Juifs se trouvaient Ohayoun Messaoud, 26 ans, Vaknin Simon 45 ans, Souissa Raphaël, 17 ans, Maman David, 19 ans, et Bitton Simon.

Le 27.10.1960, Prosper Alfassy fut arrêté et accusé de tentative d'immigration vers Israël par Tanger. Il fut battu puis libéré au bout de quelques heures.

Le 28.10.1960, Meir Aboutboul fut arrêté et accusé de tentative d'immigration vers Israël par Tanger. Il fut battu puis libéré au bout de quelques heures.

En décembre 1960, Chalom Edery fut arrêté à Casablanca puis libéré.

En décembre 1960, David Dadoun et ses deux enfants furent arrêtés à l'aéroport de Casablanca. David avait en sa possession un faux passeport. Il fut cruellement torturé par les enquêteurs. Une fois libéré, il fut suivi par les hommes de la Misguéret. De nombreux efforts furent déployés pour le faire sortir de toute urgence du pays. David et ses deux enfants trouvèrent la mort lors de la tragédie du navire Egoz.

Le 30.10.1960, Myara fut arrêté et soumis à un très dur interrogatoire.

Le 2.11.1960, une mère et sa fille, proches de Myara, furent arrêtées puis libérées.

En janvier 1960, madame Suissa Simi fut arrêtée en possession de faux passeports. Elle fut torturée puis hospitalisée.

En janvier 1960, des employés de bureaux furent arrêtés et interrogés, accusés

d'organisation d'immigration, puis libérés au terme de l'interrogatoire.

En février 1961, furent arrêtés au cours de l'opération Bazak les personnes suivantes:

De Fès: Charly Abissera, Elie Levy, Itzhak Cohen, Félix Monsonégo, Marcel Ruimi, André Niddam, George Attias et Marcel Schtemberg.

De Meknès: David Toledano, Meir Elbaz, Haim Rouach, George Benzino (aujourd'hui Gino Eliezer),

De Casablanca: Haim Hamou, Albert Elbaz, Max (Maor) Malka, Rahel Guiladi (Zrihan), David Tordjman, Henri Ben Naim, Ginette, Raphaël Vaknin, Shimon (Keren) Corcos, Albert Lugassy et Meir Knafo.

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Opération Muller ou Mural-Michel Knafo

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Opération Muller ou Mural

Le naufrage d'Egoz provoqua chez Naphtali Bar-Guiora une très grande peine, lui qui se trouvait cette même nuit tragique près de la plage, du début à la fin de l'opération. Il était déterminé à faire sortir du Maroc le plus possible d'enfants qui seraient intégrés dans le cadre de l'immigration de la jeunesse en Israël (Alyat Hanoar).

En janvier 1961, après le naufrage d'Egoz, Naphtali Bar-Guiora a rencontré le directeur d'une organisation caritative suisse. Lors de cette rencontre, des choses importantes ont été conclues entre les deux hommes: l'intégration de centaines d'enfants du Maroc "pour leur guérison" dans les centres de l'organisation

du nom de Hillsfond – comme couverture à leur immigration en Israël par la suite. Ce qui a été convenu comprenait aussi l'enrôlement d'un homme inconnu des autorités marocaines et qui n'appartenait pas à la Mlisguéret, et également l'ouverture de bureaux spéciaux dans ce but. De cette manière 530 enfants sont sortis de Casablanca pour ces lieux de résidence, Hillsfond à Morgens, Suisse puis ensuite vers Israël

David Litman, né en 1933, qui était à la tête de ce projet, était le fils d'une riche famille anglaise. Il a été enrôlé par la Misguéret et a mené ses activités de Casablanca pour l'organisation. Il a reçu l'aide de sa femme, Gisèle, née au Caire. Après avoir reçu les directives des responsables du département de l'Alyah et de l'état-major de la Misguéret à Paris, David Litman est parti le jeudi 16 mars 1961 à Casablanca, avec en sa possession un nombre de lettres de recommandation destinées aux autorités marocaines et à l'ambassade de Suisse au maroc. Les directives qu'avait reçues Litman de la Misguéret étaient les suivantes:

les activités devaient être légales.

les carnets médicaux des enfants devaient être authentiques.

les contacts avec les institutions de l'état marocain devaient être ostensibles et officiels.

Litman pensait qu'il fallait faire croire que le programme Hillsfond était destiné à l'ensemble des enfants du Maroc et pas seulement aux enfants juifs. Lui, personnellement, était connu à Casablanca en tant que non juif et, tous les dimanches, il se rendait à l'église anglicane pour y prier. Lorsque Gisèle l'a rejoint, le 1.4.1961, elle a agi de la même manière que lui. Ainsi a été créée l'image immuable d'un couple "chrétien".

Le couple Litman avait loué un appartement à l'hôtel Anfa, dans le quartier prestigieux de la ville, et des bureaux meublés au centre de Casablanca. Il ont commencé à s'organiser pour "le recrutement" d'enfants et leur envoi "en convalescence" en Suisse. A la fin de l'année scolaire, ils ont commencé à prendre contact avec les bureaux gouvernementaux et les organisations caritatives marocaines à Casablanca et Rabat, et leur ont transmis de la documentation sur les résidences Hillsfond et sur le traitement et le contrôle médical qui y étaient dispensés. Aussi, un article a été publié dans un journal marocain sur les activités de l'organisation – article qui a contribué à renforcer le statut public de David Litman et a permis aux familles juives de prétendre qu'elles avaient obtenu les informations concernant l'opération par l'intermédiaire de cet article. Mais, dans les faits, toutes les familles venues inscrire leurs enfants avaient été dirigées par la Misguéret.

David s'était aussi efforcé de recruter des enfants musulmans afin de dissiper le doute, mais ces derniers ne s'étaient pas inscrits en raison de la participation financière qui leur était demandée. Le département de la Makéla de la Misguéret avait créé à Casablanca une équipe spéciale pour aider à la promotion de l'opération. Ses membres avaient rempli les imprimés nécessaires à l'obtention d'un passeport, l'inscription et les examens médicaux étant effectués la nuit. Un membre de la Misguéret donnait à chaque famille l'acompte qu'elle devait payer lors de l'inscription, et ils avaient demandé aux familles de ne pas prononcer le mot "Israël" dans le bureau de Litman, "parce qu'il n'est pas juif et il n'est pas au courant de tout le programme. Le travail de préparatifs qu'avait effectué l'équipe du "Balet" (mouvement de jeunesse dans la clandestinité) dans la concentration des documents était exemplaire, ainsi que l'obtention des carnets de l'élève par les différents établissements scolaires. L'inscription de centaines d'enfants avait attiré l'attention de la rue juive.

Le 31.5.1961, Litman fut convoqué par Mohamed Drissi, chef du département de la police secrète à l’état-major de la police de Casablanca, et a été interrogé sur la nature de l'organisation Hillsfond et sur ses buts. Drissi lui a dit qu'il avait entendu parler de lui et de son organisation et désirait avoir des renseignements complémentaires, sans cacher que la sortie d'enfants juifs en convalescence éveillait des soupçons, et que peut-être quelques-uns d'entre eux disparaîtraient et feraient envoyés en Israël – c'est pourquoi il proposait de leur délivrer uniquement un passeport collectif, la seule manière selon lui d'être assuré de leur retour au Maroc.

De nombreux problèmes, principalement d'ordre politique, ont été provoqués par le commissaire de police du premier arrondissement – il avait refusé de signer les demandes de passeport. Il y a eu moins de problèmes avec le commissaire du deuxième arrondissement qui était connu pour son amour des pots-de-vin. Quelques tablettes de chocolat suisse pour lui et une montre de fabrication suisse au responsable des enquêtes de ce même commissariat avaient réussi à résoudre les problèmes...

Le premier groupe prend la route

Enfin, et après de nombreuses péripéties, 127 enfants juifs ont embarqué le 26.6.1961 à bord du bateau lonia qui a navigué vers Marseille, et ensuite ont été transportés par autobus en Suisse. Une semaine plus tard, Litman a été à nouveau convoqué pour un interrogatoire à l'état-major de la police de Casablanca, et il s'est avéré que sa convocation était le résultat d'une plainte de Ibrahimi, secrétaire personnel du gouverneur de la ville, qui a demandé d'enquêter de nouveau sur les activités de l'organisation Hillsfond suite aux plaintes du commissaire du premier arrondissement.

Entre-temps, David avait continué l'inscription des enfants pour le deuxième départ, et lors de sa visite dans le bureau de Elhadj, responsable de la délivrance des passeports, il y a découvert une lettre d'Ibrahimi, qui disait que l'enquête sur Litman n'avait rien révélé d'illégal, et que les activités de l'organisation Hillsfond étaient faites avec probité.

 

Le deuxième groupe

Les résultats positifs de l'enquête de la police ont permis le départ par avion de 93 enfants supplémentaires le 10 juillet 1961 de Casablanca vers la France, et de là en autobus vers les résidences Hillsfond en Suisse. Le caractère borné du représentant de l'immigration de la jeunesse à Marseille, qui a donné l'autorisation de transférer 85 enfants du premier groupe de Suisse à Marseille et ensuite par avion en Israël, aurait pu provoquer un scandale et peut-être l'arrestation de David Litman – si le représentant de l'ambassade Marocaine en Suisse avait visité les résidences et découvert qu'il manquait 85 enfants. Cela a été fait sans l'autorisation de Naphtali Bar-Guiora qui en le sachant est rentré dans une colère noire, mais par chance, l'affaire s'est bien terminée.

 

Le troisième groupe, le quatrième et le cinquième

Les préparatifs pour le départ du troisième groupe par avion le 19 juillet, le quatrième via le bateau Ionia le 22 juillet, et le cinquième par avion le 24 juillet, se sont "mieux déroulés" – et ceci grâce au nouveau gouverneur nommé à Casablanca, le colonel Driss Ben-Omar, qui était plus modéré que son prédécesseur.

Le total de ces trois groupes était de 310 enfants juifs, et la totalité de l'opération "Muller" est de 530 enfants âgés de onze à seize ans.

Le premier groupe d'enfants parti en "convalescence" était censé revenir au Maroc le 25 juillet, mais une partie d'entre eux était déjà en Israël, et l'affaire était susceptible d'être découverte, c'est pourquoi Alex Gatmon, le commandant de la Misguéret, décida de faire sortir du Maroc David Litman et sa famille avant le 25 juillet. Gisèle et leur petite fille Diana sont parties par avion de Casablanca à Paris, et le 23 juillet 1961, Litman s'est rendu à son bureau à Casablanca et a détruit tous les documents qui s'y trouvaient. Ensuite, il a rencontré Pinhas Katsir, le chef du renseignement de la Misguéret, et celui-ci l'a conduit à Alex Gatmon.

La rencontre a eut lieu dans le véhicule de Pinhas. Alex a exprimé personnellement ses remerciements à Litman pour la réussite de l'opération, et lui a dit qu'avaient déjà été effectués tous les arrangements pour son départ en avion avec le cinquième groupe qui était prés de décoller de Casablanca le 24 juillet 1961. En cas de problème à l'aéroport, la Misguéret avait planifié une autre voie pour le faire partir du maroc. Dans ce cas, Litman devait retourner à un certain café au centre de Casablanca où l'attendaient des personnes qui s'occuperaient de sa sortie clandestine. Le lendemain matin, David Litman s'est rendu à l'aéroport, il avait envoyé ses valises avec celles des enfants, afin que personne ne se doute de son intention de quitter le Maroc définitivement et pour donner l'impression qu'il était ià comme accompagnateur.

lors de l'entretien avec les officiers de police à l'aéroport, il leur a dit qu'il attendait, dans l'avion qui atterrirait, un "accompagnateur" qui ferait le retour avec les enfants pendant leur voyage en France. Mais lorsque l'avion a atterri à 2:00, il ne s'y trouvait aucun "accompagnateur". Litman a feint d'être surpris et d'être très en colère, alors, il a annoncé au représentant de la société à laquelle avion appartient, en présence de l'officier de police responsable – qu'il n'avait : autre choix que d'accompagner lui-même les enfants. Les officiers, qui étaient persuadés que le voyage de Litman était exigé en raison des circonstances, ne l'ont pas retenu. C'est ainsi que Litman a quitté le Maroc sans aucun problème, alors que cette opération complexe qu'il avait dirigée se terminait dans la réussite.

 

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Entre la fin de la période d’Egoz et Cocous et le début de l'opération Yakhine

Béni Meitiv

A la fin de sa première mission – dans les années 1953 à 1956 au châtea. Cambousse en France, en tant qu’émissaire de l’immigration de la jeunesse -Beni Meitiv a tout de suite repris l’uniforme pour l’opération Kaddesh, qui a eu lieu en 1956 et, après la guerre, il est retourné dans son kibboutz Nirim. En 1961, il a répondu par l’affirmative à la sollicitation de la Misguéret de retourner au Maroc Il raconte ici la période post-naufrage d’Egoz.

Je ne connais pas les motifs de ceux qui m'ont choisi pour cette mission, cependant après la formation habituelle, je suis parti au milieu de l'année 1961 directement a Gibraltar. Il est difficile de dire que quiconque avait pris la peine de déterminer mon rôle. On m'a dit de voyager, et j'ai voyagé; on m'a dit de rencontrer là-bas certaines personnes, et je les ai rencontrées; on m'a dit que je recevrai des explications, mais personne ne m'a rien expliqué.

Nous étions, en fait, dans la ligne de démarcation entre la fin d'une période et le commencement d'une autre qui était le début de l'opération Yakhine, dont le but était clair. Et dès que j'ai compris de quoi il s'agissait, j'ai reçu la confirmation a posteriori que dans tous les cas ma fonction principale était de "surveiller les braises" et de m'assurer que, s'il survenait des incidents dans l'opération Yakhine, tout le dispositif clandestin refonctionnerait à nouveau comme par le passé. C'est pourquoi, la mission était de continuer d'agir, modérément, dans différentes opérations, principalement assurer la continuité de l'action de la Misguéret et du dispositif général, et dans la mesure du possible même les développer.

A Gibraltar se trouvaient, à mon arrivée, deux de nos membres actifs de la Misguéret, le premier était Hertzel Sher, commandant de la base, et Yéhouda Alboher, son aide. Avec eux se trouvait également notre ami, Ehud Daivis. radiotélégraphiste, spécialiste du codage et du camouflage. Ehud était marié à Naomi, une jeune femme de tanger. Après leur mariage, le jeune couple a habité dans une maison où j'habitais moi-même et l'appareil "radio", et après presque un an, Ehud a été remplacé par Shaul Assis, qui a épousé la sœur de Naomi, ainsi "tout est resté dans la famille…" Entre-temps, Hertzel Sher a terminé sa mission et peu de temps après lui Yéhouda Alboher, je suis resté seul pour continuer les activités.

Les enclaves espagnoles

Le dispositif à Gibraltar a fonctionné principalement face aux deux enclaves espagnoles, Ceuta et Mélilla, dans lesquelles les immigrants clandestins arrivaient par deux itinéraires continentaux principaux, et ensuite vers Gibraltar. Le transport de Ceuta était réalisé par bateau, qui faisait deux fois par jour la traversée Ceuta – Gibraltar. A l'arrivée des immigrants à Ceuta, se trouvait notre homme, Señor Don Carlos Médina, qui les attendait, les accueillait et les hébergeait selon les besoins dans l'une des pensions de la ville. Si les conditions le permettaient, il les faisait embarquer le même jour en direction d'Algésiras, qui se situe à l'extrême sud de l'Espagne, ville dans laquelle ils étaient hébergés dans la pension Malaguénia de Señor Pédia, qui était responsable du bien-être des immigrants à Algésiras.

Les immigrants qui arrivaient dans la deuxième enclave, Mélilla, partaient – en fonction de leur heure d'arrivée – dans l'un des bateaux pour une traversée qui durait une nuit entière, et parfois même davantage (en comparaison avec une traversée de deux heures et demi de Ceuta), et ceci en fonction de la grandeur du bateau.

De l'un de ces bateaux, j'en garde un souvenir négatif, malgré le fait qu'il était le plus beau bateau dans lequel je n'ai jamais navigué, et dont le nom était "The Sister". Ce bateau était l'œuvre d'un artiste, qui rappelait l'une des trois caravelles avec lesquelles Christophe Colomb avait effectué sa traversée de l'océan et qui étaient sculptées et gravées de différentes figures en bois. Cependant, il y avait une ombre au tableau: à cause de son étroitesse, la moindre bris d'une petite vague le déstabilisait. La navigation avec ce bateau était un plaisir douteux et la traversée durait entre 11 à 12 heures. Mais, en général, les immigrants clandestins embarquaient sur le bateau à Mélilla en direction de malaga, ville dans laquelle ils étaient accueillis par notre homme – que j'avais hérité de mon prédécesseur, il était espagnol non juif, responsable et dévoué d'une manière peu ordinaire. Sa profession au quotidien était la pédicure. C'était son gagne-pain, mais pour ce qui était de son idéal – et seulement pour cela (car il n'avait reçu de nous que des sommes insignifiantes) – il s'était investi corps et âme en faveur des immigrants juifs, et il lui semblait toujours qu'il n'en faisait jamais assez. Il réceptionnait les immigrants, se préoccupait de les transporter de Malaga au Señor Don Pedia à Algésiras, et de la, ceux-ci étaient transportés par le ferry-boat de Algésiras à Gibraltar. N'oublions pas qu'il y avait eu des problèmes politiques entre les autorités espagnoles de Franco et entre celles qui avaient la mainmise sur le rocher de Gibraltar, qui était une enclave britannique.

En ce qui concerne la porte d'Espagne, dans la ville La Linéa, je ne savais jamais quand elle était ouverte ou fermée. De toute façon, les autorités ne voulaient pas voir les immigrants entrer par cette porte, et c'est pourquoi, afin de compliquer encore l'adage du Juif Errant, les immigrants clandestins, étaient embarqués sur le ferry-boat d'Algésiras, arrivaient à Gibraltar, et ensuite étaient acheminés vers le camp de l'agence juive.

Retournons un instant à l'actualité de ces jours-là au travers d'une histoire. J'ai jusqu'à présent insisté sur les immigrants clandestins, le dispositif, les moyens et ceux qui accomplissaient pour nous des tâches importantes. A Gibraltar, demeurait aussi un émissaire de l'agence juive, Mordekhaï Maor (Markovitch du département de l'Alyah, qui dirigeait le camp, et à ses côtés, travaillaient des infirmières locales. La première infirmière était Naomi, qui plus tard épousa Ehud, le radio. La seconde infirmière, Marcelle, devint la femme de sir Joshua Hassan.

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Le premier ministre de Gibraltar, sir Joshua Hassan

Entre sir Joshua Hassan et moi-même, se sont liés des liens d'amitié particulier.

Et voilà qu'en 1994, il avait été invité par l'adjoint au maire d'Ashkelon pour recevoir un diplôme d'honneur pour sa contribution à l'immigration de milliers de juifs via Gibraltar. La cérémonie a eut lieu dans une somptueuse tente marocaine à Ashkelon, en présence d'un public nombreux.

Moi, personne ne m'avait invité, et lorsque j'ai interrogé l'adjoint au maire, en feignant de prendre un ton naïf, que j'avais lu dans la presse la venue de l'hôte et que j'aurais souhaité connaitre le lieu où il logerait, celui-ci me demanda si je connaissais Sir Hassan et d'où je le connaissais. Je lui ai répondu que nous avons travaillé ensemble à Gibraltar. L'adjoint au maire était perplexe et m'a répondu: "Tu sais quoi, viens, peut-être que je pourrai t'arranger une rencontre avec lui à l'extérieur de la tente." Je l'ai remercié.

Entre-temps, j'ai appris que sir Hassan descendrait à l'hôtel Hayatt. J'ai téléphoné à Méir Knafo, pour l'en informer et prendre conseil, et ensuite j'ai téléphoné à sir Joshua Hassan, qui a tout de suite exprimé son désir de me rencontrer, et lorsqu'il a su que je n'étais pas convié à la cérémonie, il m'a dit ceci: "Béni, je suis invité pour 20:00. Donc à 19:30, je serai chez toi." Il est arrivé à l'heure convenue, et devant quelques apéritifs, la discussion a fusé jusqu'à 20:45. Lorsqu'il est sorti de chez moi, ses hôtes l'ont interrogé, où était-il donc, il a répondu: "Je suis allé rendre visite à Béni Meitiv, car c'est un geste qu'il convenait de faire."

Troisième partie: En ces jours de tempête

Le camp de Gibraltar

Revenons de l'actualité à la chronique dont nous parlons. Dans le camp de Gibraltar, les immigrants attendaient les avions qui les transporteraient à Marseille, puis en Israël. Les avions étaient de tout type de D.C. – 4, 5 et 6. Tous désiraient voyager dans le plus gros possible, parce qu'il était aussi le plus sûr – et il faut dire que voyager de Gibraltar, ce n'était pas un simple voyage, mais vraiment une aventure.

L'aéroport était quelque chose qui appartenait aux légendes: cet énorme rocher composé entièrement de passages souterrains et de lieux de transits, pour une exploitation maximale du terrain – dont cette montagne ne dispose pas en quantité – et votre chemin d'un point à un autre passe d'un souterrain à l'autre. A l'intérieur de ce fromage suisse troué, était tendue une bande étroite, c'était l'aéroport.

La solidité du rocher de Gibraltar lui a valu l'expression française: "Solide comme le roc". Le nombre d'habitants de ce cap s'élevait à vingt-six mille, parmi lesquels 800 familles juives, cependant l'importance spécifique de la communauté juive était incomparablement plus grande que le pourcentage qu'elle représentait dans la population. Sur huit ministères dans le gouvernement de la colonie de la couronne, se trouvaient trois juifs, et à leur tête le premier ministre, sir Joshua Hassan, qui a occupé cette fonction pendant plus de vingt ans. Nous avons sollicité son aide de nombreuses fois parce que d'après la nature de nos activités, il y avait de temps en temps des "embrasements" qui n'étaient pas prévus ou des situations qui nécessitaient une aide immédiate, et celle-ci a toujours été donnée par la communauté juive et par celui qui était à la tête de la hiérarchie du rocher.

Le but est de ne pas compliquer les relations entre la Grande-Bretagne et le Maroc

Lorsque sir Joshua a demeuré chez moi, nous avons évoquer le passé, et parlé des vrais amis (et d'autres "amis" aussi, si l'on peut dire) qui étaient liés à notre action, et parmi eux Sergeo Viouti, le "immigration officier', l'officier préposé à l'immigration qui a travaillé comme mon vis-à-vis dans la signature de la paperasserie des immigrants qui entraient à Gibraltar, et qui est décédé il y a six ans, et aussi Scott, le propriétaire d'Egoz, lui aussi décédé.

J'ai interrogé sir Hassan: "What about Mr. Bâtes?" qui était le "colonial secretary", le secrétaire de la colonie. Voici une histoire à son propos: un jour, il m'a convoqué et m'a dit: "Mister Meitiv, j'ai à vous formuler une demande, nous avons un problème avec vous, l'ambassadeur du Maroc à Londres a porté plainte pour des activités clandestines que vous effectuez sur le territoire marocain."

Je lui ai dit: "Mister Bâtes, I give you my word of honor (je vous donne ma parole d'honneur), que mister Meitiv n'a jamais foulé la terre marocaine." Il a alors souri et a répondu: "Je suis certain que mister Meitiv n'était pas là-bas, mais malgré cela, vous voyagez à Ceuta et Mélilla, et vous savez que les marocains prétendent que ces deux enclaves sont des territoires marocains."

Ce sujet était assez sensible. A côté de moi était assis sir Moshé Ben-Naïm, qu: était le consul honoraire d'Israël, et qui était mal à l'aise en raison de la sensibilité du sujet. Et je lui ai répondu en souriant: "Mister Bâtes, qu'importe si les marocain? prétendent que Ceuta et Mélilla font partie du territoire marocain, l'Espagne aussi prétend que Gibraltar fait partie du territoire espagnol – qu'ils continuent à le prétendre!" Malgré tout, nous nous sommes séparés en bons amis, tout en lui faisant la promesse que je serai prudent et ne compliquerai pas les relations de la Grande-Bretagne avec le maroc.

Opération Muller ou Mural-Michel Knafo

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