Mon passe marocain-Aida Pinto

Mon passe marocain
Aida Pinto

Ce recit d'une vie qui embrasse pres d'un siecle d'histoire familiale et communautaire celle des Juifs marocains de Tanger au XXe siecle – aurait pu raconter I'histoire dune fracture terrible, celle d'une communaute implantee au Maroc depuis des siecles que les remous de I'Histoire poussent a I'exil et au deracinement, en Europe et ailleurs. S'il est vrai qu'un voile de nostalgie recouvre certaines pages, ces memoires sont inspirees par toute autre chose:

Elies respirent le grand souffle du bonheur et la grace d'une vie heureuse. Elies disent, avant tout, un grand merci a la Vie, et a tous ceux qui I'ont donnee: les parents, les proches, les amis, les enfants, l'entourage. Et comme le bonheur est contagieux, elles ont aussi le pouvoir de transmettre cet etat de grace aux autres: cest un bonheur rare de lire ce livre ou il fait bon etre en famille, au bord de I'eau par une merveilleuse journee d'ete; dans un jardin fleuri, a I'ombre d'une terrasse; ou encore devant une somptueuse table de fete familiale ou retentissent les voix des prieres millenaires.

Les gens heureux ont une histoire, la voici

Aida Pinto (1923-2004) a ecrit ses memoires "Mon passe marocain" dix ans apres son installation a Paris en 1967

Preface

Ce recit d’une vie qui embrasse pres d’un siecle d’histoire familiale et communautaire – celle des Juifs marocains de Tanger au XXe siecle – aurait pu raconter l’histoire d’une fracture terrible, celle d’une communaute implantee au Maroc depuis des siecles que les remous de  l'Histoire poussent a l'exil et au deracinement, en Europe et ailleurs. S’ il est vrai qu’un voile de nostalgie recouvre certaines pages, ces memoires sont inspirees par toute autre chose: elles respirent le grand souffle du bonheur et la grace d’une vie heureuse. Elles disent, avant tout, un grand merci a la vie, et a tous ceux qui l'ont donnee: les parents, les proches, les amis, les enfants, l' entourage.

 Et comme le bonheur est contagieux, elles ont aussi le pouvoir de transmettre cet etat de grace aux autres: c’ est un bonheur rare de lire ce livre ou il fait bon etre en famille, au bord de l' eau par une merveilleuse journee d’ ete; dans un jardin fleuri, a l'ombre d’ une terrasse; ou encore devant une somptueuse table de fete familiale ou retentissent les voix des prieres millenaires.

Le bonheur ne va pas de soi: il se construit lentement, souvent laborieusement, parfois d’un coup d’ eclair. Il est le fruit de plusieurs vies successives, celle des grands-parents, des parents et des enfants, celle des generations passees dont nous recevons l'heritage. Le bonheur est une memoire et une dette de reconnaissance: Aida Toledano sait qu’ elle le doit a ses parents et a travers eux, a tout un monde tisse de liens familiaux etroits, et a toute la texture serree d’ une vie communautaire: celle du Tanger du debut du XXe siecle et celle, plus moderne, du Casablanca du Protectorat francais et de FIndependance du Maroc. Tout commence dans cette famille et tout derive d’ elle: les personnages et leur histoire, les lieux qu’ils habitent ou visitent, leur entourage, les valeurs qu’ils incarnent. La famille est une terre nourriciere: elle nous nourrit et nous abreuve de ses bienfaits a travers le temps et 1’ espace. C’ est ce qui explique, peut-etre, F absence de douleur dans ce recit: la famille n’a pas disparu, elle a seulement change de cadre et elle s’est dirigee vers un avenir            imprevu sous des cieux differents. L’ essentiel, elle l'a donne: des etres chers qui vous apportent, ici et la, la chaleur necessaire a la vie.

Aida Toledano Pinto est nee en1923, au sein d’une riche famille juive tangeroise qui n’a pas oublie ses origines modestes, une generation auparavant. Tres jeunes, les freres Toledano, les sept freres et soeurs de son pere, Pinhas, perdent leurs parents, et vivent de la charite communautaire: en souvenir d’ une dynastie de rabbins les Toledano, venus d’Espagne via Meknes, ils recoivent les abats des betes sacrifices. Les soeurs ainees elevent les plus jeunes et, a l’age de raison, Joseph emprunte de  l'argent pour vendre des petits articles sur la route Tetouan-Tanger. Puis, les freres ouvrent des comptoirs a Tanger et a Mogador, ou travaille Pinhas.

Vers 1900, Joseph s’expatrie en Angleterre, pendant douze ans, pour faire fortune dans le commerce international, grand mot pour le negoce de sucre, de the en echange du ble. II fera appel a son frere Moses. Au prix d’ un travail acharne – dont certaines lettres de Pinhas rendent compte, ils etablissent au Maroc un reseau commercial d’importation de the de Chine et de sucre dont les Marocains sont tres friands.

Ils entrent dans la modernite: dans les annees vingt, ils developpent a Tanger le boulevard Pasteur, l’artere principale de la ville, en construisant les villas Toledano, dont une subsiste aujourd’ hui.

          Dans les annees trente, ils s’installent a Casablanca ou ils vont construire des immeubles et des villas somptueuses de style moderne. Cette famille, qui, un siecle auparavant, vivait modestement et parlait l'espagnol,  l'hebreu et  l'arabe, s’ ouvre au monde occidental, apprend le francais et l'anglais a l'Ecole de l'Alliance israelite universelle, voyage a l'etranger ou au Maroc, adopte les modes occidentales, envoie leurs enfants dans les ecoles franchises du Protectorat. Le tournant est radical et rapide: Pinhas et Lunita Toledano sont les acteurs d’ une evolution acceleree et d’ un progres fascinant. Pinhas, plus serieux et plus soucieux, veille a assurer le confort materiel de sa famille; Lunita, plus enthousiaste et plus cultivee, reCoit, invite, voyage, s’ habille, lit, devore la vie a pleines mains. Si le monde des premieres decennies du XXe siecle s’accelere, la vie de famille, elle, tend a rester la meme: elle est rythmee par des evenements religieux ou prives en marge de l'Histoire. La vie de famille traverse l'histoire du Protectorat francais au Maroc, le statut international de Tanger, les grandes guerres europeennes. Elle semble preservee des grands remous historiques et surtout, miraculeusement, de la Shoah: Pinhas meurt en 1945 en laissant a sa famille une belle fortune et un avenir souriant: Luna, sa femme, reste la gardienne de 1’union familiale et une nouvelle generation est nee avec Lunita, la premiere petite-fille de la famille Toledano. Aida, la fille de Pinhas et Luna, raconte 1’ histoire de ce prodige: elle sait qu’ il faut temoigner et dire la beaute d’ une famille unie et aimante.

Mon passe marocain-Aida Pinto

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