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Le mariage traditionnel chez les Juifs Marocains-Issachar Ben-Ami

Vallée du Draa. A Mhamid, c'est le vizir  du marié qui, de l'entrée de la chambre nuptiale que lui cache un rideau, se renseigne auprès du marié et informe ensuite la famille, qui entre pour voir la mariée. Samedi après-midi, les jeunes filles et les tamzwaràt se rassemblent autour de la mariée pour chanter et danser. Les islan leur lancent des amandes. C'est le mercredi, septième jour après le mariage, que les mariés sont emmenés en procession au ruisseau. On dépose une branche au milieu du cours d'eau. Le marié et le vizir font une course entre eux, afin d'arriver le plus vite près de la branche. Si le marié est gagnant, il est chaudement applau­di, sinon il doit offrir au vizir le prix qu'on aura fixé auparavant. Le groupe se rend ensuite chez les parents de la mariée, qui leur servent un repas et offrent un tapis ou une couverture au jeune couple.

[1]  Ici, comme partout ailleurs, on attache une valeur considérable à la virginité. Dans un chant de mariage chanté par les Juifs de ce lieu et que j'ai recueilli en 1965, il est dit:

"O, fille, est-ce que ta mère

 t'a gardée comme un document?

 Est-ce que ta mère t'a gardée jusqu'à ce soir dans un livre…"

 (pour que tu aies si aisément prouvé ta virginité ! )

 

 Quand la mariée n'est pas vierge, elle peut être répudiée sur le champ. Néanmoins, si son mari veut faire une grande "mitsva" (commandement religieux), il accepte qu'on salisse le drap avec le sang d'un poulet. Selon la croyance locale, s'il la protège ainsi, il est sûr que Dieu le protégera en récompense.   

[1]       Le même rôle est joué par le vizir chez les Ait Warain (Westermarck, Ceremonies, p. 244) et chez les Ait Ubahti (idem, p. 248). Chez ces derniers, le vizir est présent dans la chambre nuptiale au moment même de la consommation du mariage. Pour la même coutume chez les Berbères tunisiens, voir H. de Montety, op. cit., p. 65.

Le marié et le vizir font une course entre eux Sur une variante de cette coutume, voir Westermarck, Ceremonies, p. 283 : ici (chez les Ulad Bu-Aziz), la course a lieu entre le marié et deux ou trois des jeunes gens vers la tente. Chez les tribus berbères du Mzab, selon Goichon, op. cit., p. 95: "A quarante ou cinquante mètres de la hajba, amis et ennemis partent en une course effrénée. Si l'un des mariés ou l'un des vizirs arrive le premier, tout se passe sans autre incident; mais si c'est l'un des autres agresseurs, il ferme brusquement la porte. Sans refuge, le malheureux marié et sa poignée de défen­seurs sont livrés à toute la bande, car l'honneur leur défend de s'enfuir".

Vallée du Todra. Dès que le mariage est consommé, la mère de la mariée entre dans la chambre et pousse des "youyous". Le drap est montré à toute la famille. Jeudi, "yom alhdïya" ou "le jour du cadeau", tous ceux qui ont assisté au mariage viennent donner leur grama. Vendredi après-midi, le marié soulève sa femme sur ses épaules et l’emmène dans la cour. Là, il plante au sol un piquet, sur lequel elle frappe, pendant que les sosbinim crient: "La femme restera, la femme restera, ici elle aura des enfants". Le soir, les jeunes gens et d'autres invités se réunissent chez le marié. Ils passent la nuit à chanter des cantiques religieux.

Samedi est le "sebt elkbir" ou "le grand samedi", que les familles passent ensemble.

Jeudi, huit jours après la cérémonie nuptiale, le marié va au marché. Il achète un panier, qu'il remplit d'amandes, de noix et de blé. Accompagné de ses amis il va chez ses beaux-parents, chez qui ils mangent du couscous. A son départ, il reçoit un pain de sucre. A la maison, le marié remet à sa femme le panier. Pendant qu'elle prépare du couscous, il doit moudre le blé. Les assistants les bénissent, en disant: "Que jamais le blé ne manque dans cette maison". Dans l'après-midi, les sosbinim viennent ouvrir les tresses de la mariée. Elle est ensuite conduite au bain et fardée par une tamzwarâ, qui lui met du 'ker et du swâk aux lèvres. Le soir, on répétera pour la première fois les "sept bénédictions". A cette occasion, le rabbin sonne du sofar et les femmes lancent des zgarit.[ C'est la première fois que nous retrouvons l'usage du Sofar lors des cérémonies de mariage].

Lmeghrane. Jeudi matin, la mère de la mariée ou une tamzwarâ entre dans la chambre, prend le drap Sali et le montre à toute la famille. Les femmes dansent tout en soulevant le linge; cinq tamzwarât lanceront à tour de rôle des zgarit. Tous ceux qui viennent ce jour-là contemplent le linge exposé. Chez les Juifs d'Imedra, dans la zaouia de Beni-Azem, le marié quitte la chambre dès que la mère de la mariée rentre. Accompagné d,islan, il va à la synagogue. A la sortie, un groupe de tamzwarât l'acueille en chantant. Le soir, les mariés ,accompagnés de tamzwarât et d ,islan, vont à la source, tenant d'une main un seau et de l'autre de la menthe. Pendant que les femmes chantent, dansent et poussent des zgarit, les islan crient :

“Le sultan arrive (trois fois).

Faites vos offrandes, serviteurs de Dieu.

Faites vos offrandes au sultan” (deux fois).

Arrivés à la source, les mariés remplissent les seaux et reviennent, toujours accompagnés, à la maison.[ Les mariés vont à la source jeudi soir, vendredi et dimanche soir. A part ces sorties organisées, il leur est interdit pendant huit jours de quitter la maison].

Jeudi matin, à Imeghrane, la famille offre aux mariés du sucre et des habits. A midi, au cours du déjeuner où se retrouvent les deux familles, les islan et plusieurs invités, le père de la mariée s’exclame, en prenant un bout de mhemmer et un verre de mahia : “Celui qui vient chez nous, l’aisance viendra chez lui”. De suite après, il dépose sur la table une somme d’argent. Tous les membres de sa famille suivent son exemple. C’est ensuite le tour de la famille du marié et des invités. La somme reçue est remise au marié.

Le couple ne peut quitter sa chambre même aux heures des repas. Il doivent être toujours ensemble. Les gens disent à ce sujet: “Que le vent ne passe pas entre eux”. Quand les amis rendent visite au marié, les amies de la mariée se groupent autour d’elle. Aucun d’eux ne peut être laissé seul pendant ces huit jours.

Samedi, les parents de la mariée offrent au jeune couple cinq paniers pleins de fruits secs, d’œufs, de sucre et de viande. C’est pour cette raison que ce samedi est ici intitulé “le samedi des paniers”. Le matin, après l’office à la synagogue, le marié sert aux assistants de la mahia et du mhemmer. Les islan le soulèvent et dansent tout en le portant. Le soir, on célèbre une fête animée de chants et de danses, qui dure jusqu’au matin.

Mercredi, septième jour après le mariage, est “le jour du bain”. Les mariés sont emmenés au ruisseau et, pendant qu’ils se baignent, la mère lave leur linge. Au retour, ils répandent dans un champ le contenu d’un seau plein d’épis de blé. Ds se permettent de cueillir dans un jardin des fleurs et des légumes, qu’ils mettent dans le seau, sans attirer la colère du proprié­taire musulman. En cours de route, les parents des mariés offrent aux pas­sants de la mahia et ces derniers déposent une grama dans le seau. A la maison, le marié met à sa femme le même hzàm avec lequel on l’avait attaché la veille du mariage. Un repas de couscous à la famille terminera les cérémonies de mariage.

A Imedra, les mariés reçoivent chacun un poisson, qu’ils essayent de nettoyer le plus vite possible, pendant que les femmes chantent. Le mari doit, à ce moment, ecraser le pied de la mariee, mais s'il n'est pas alerte, la femme lui .marchera sur le pied

Le mariage traditionnel chez les Juifs Marocains-Issachar Ben-Ami-page 82

Le mariage traditionnel chez les Juifs Marocains-Issachar Ben-Ami

 יהדות-מרוקו-יששכר בן עמי
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  1. Dans le Sous. A Taroudant:, dès que le mariage est consommé, le marié quitte sa chambre et revient à ses amis qui l’attendent. Les femmes entrent en poussant des zgarit. Jeudi est le “nhar sboh” avec la remise des cadeaux. Toutes les femmes qui viennent voir la mariée, prennent le linge tâché et s’enduisent les yeux. La mère de la mariée gardera ce linge jusqu’au jour où sa fille enfantera son premier enfant.

Samedi après-midi donne lieu à un l’ab jusque tard dans la nuit.

  • Mercredi, “nhar sab’ iyyâm”[“Le jour des sept jours”. A Iligh, ce jour-là est le “nhar lehruz” (le jour de la sortie).], le marié, accompagné des islan, va au marché acheter un panier, qu’il remplit d’oeufs, ainsi qu’un mouton, qu’il offre à ses beaux-parents. Quand il arrive chez lui, les islan prennent les oeufs et les jettent contre le marié; c’est un bon Pendant ce temps, la mariée est conduite au bain; elle se rend ensuite chez ses parents. A son arrivée, elle doit piétiner une bourse pleine d’argent que son père a déposée par terre. [Le sens donné: que la jeune femme vive chez son mari dans la même aisance qu’elle a connue chez ses parents.] Toujours à l’entrée de la maison, elle doit assister à l’abattage d’une bête et voir comment le sang jaillit. En quittant ses parents, ils lui offrent deux paniers avec des poulets et de la viande de mouton.
  • Le sens de cette coutume, donné par les habitants de Taroudant, est que la fille doit voir le sang afin de surmonter sa peur. Sommes-nous en présence d’un vestige d’un rite destiné à compléter l’éducation de la mariée, en vue des responsabilités futures du mariage?

A Tiznit, après la défloration, le marié entrouvre la porte et jette la culotte de la mariée, qui est aussitôt ramassée par les femmes. Elles la mettent au bout d’un bâton et vont faire le tour des maisons, en réveillant les gens.

  1. K., instituteur à Tiznit en 1940, m’a raconté qu’il a été un jour réveillé à deux heures du matin, en sursaut, par des cris et des coups à sa fenêtre. En ouvrant, il vit une culotte tâchée sur le bout d’un bâton. Les femmes lui crièrent : “la mariée a mis le henné”.

Chez les Oulad-Barhi, on danse à la maison toute la nuit avec le linge maculé. Samedi, après la prière, on habille le père de la mariée et celui du marié de vieux habits, à la grande joie des assistants. Mercredi, “jour du retour”, le marié va au marché. 11 s’approche d’un marchand et, sans mot dire, il prend un couscoussier. Il y met. du henné, des noix, des dattes et autres fruits. A son arrivée, il les offre à sa femme avec un habit et un bijou. Après le bain de la mariée, un repas avec la lecture des “sept bénédictions” clôturera les cérémonies du mariage.

Les histoires concernant le salissage du linge avec le sang d’une poule sont ici plus courantes que dans d’autres lieux. Les Juifs soussis sont, par ailleurs, réputés par leur magie.

L’importance du sang virginal est aussi capitale chez les Musulmans, qui connaissent la pratique de la poule égorgée. Voir Westermarck, Ceremonies, p. 229, et G. Mouette, op. cit., p. 398. La médecine populaire musulmane montre beaucoup de recettes afin de rendre à une jeune fille déflorée avant ses noces l’apparence de la virginité.. Il existe au Maroc, selon l’information que m’a transmise une infirmière, qui a travaillé longtemps dans ce pays, des cliniques privées qui font un greffage aux jeunes filles non vierges, qui permet, au moment du coit, de faire couler du sang.

Auparavant, un des amis du marié va chez le marchand et lui paye le couscous­sier. Il l’avertit que quand quelqu’un viendra prendre l'objet, il ne devra rien dire.

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