La vie et l'impact de Rabbi Refael Baroukh Toledano- Une ville assiegee

 

Au sujet du livre

En nous attaquant à la tâche de retracer quelque peu les voies de notre Grand Maître, nous nous sommes basés uniquement sur des sources sûres et précises, à la fois pour la description de l’époque, pour les actions, les conceptions et principes de Rabbi Baroukh.

Deux écrits remarquables nous ont aidés dans cette tâche : le premier, de la plume de Rabbi Avraham Amar, époux d’une petite-fille de Rabbi Baroukh, qui avait noté, encore du vivant de Rabbi Baroukh, des faits et des conduites qu’il avait vus de ses yeux et entendus de ses oreilles. Le second a été écrit par Rabbi David Schnéor, qui a fait des recherches pour connaître l’histoire de la vie de Rabbi Baroukh en interrogeant les membres de la famille et les anciens élèves. De notre côté, nous avons poursuivi les recherches et les interrogations auprès des membres de la famille parmi lesquels Rabbi Yossef, fils de Rabbi Baroukh zatsal, sa fille, la rabbanith Myriam Merzbach, et de nombreux petits-fils et petites-filles, ainsi que des disciples et gens proches qui vivaient dans son entourage.

De façon un peu plus large, certains de ses élèves et de ses proches connaissances nous ont fait partager eux aussi quelques souvenirs. À côté de chaque anecdote rapportée, nous avons essayé d’en signaler la source. Même lorsque tel n’est pas le cas, nous portons témoignage que toutes sans exception ont été écrites après une recherche et une investigation précises.

Signalons qu’étant donné que Rabbi Baroukh avait adopté des comportements qui dépassaient les strictes obligations de la Loi et qu’en outre, du fait de son extrême humilité, il restait discret quant à bon nombre de ses conceptions et conduites en matière religieuse, nous avons pris soin, de ce fait, de ne pas mentionner certains points, pour ne pas aller contre sa volonté profonde, surtout lorsqu’il s’agissait de procédés qui ne sont pas accessibles à tout un chacun.

Ajoutons que toute remarque sera accueillie favorablement et nous demandons même à celui qui aurait connaissance de récits et témoignages ne figurant pas dans le livre de nous les faire parvenir pour qu’ils soient publiés s’il plaît à D., dans une prochaine édition.

C’est avec plaisir que nous signalons qu’une édition de ce livre, en anglais et en espagnol, est également en projet.

Introduction

Une ville assiegee

La ville de Meknès, située en plein cœur du Maroc, entre des forêts de cèdres verdoyants et des sources d’eau vive, jouissait d’un climat méditerranéen agréable.

Au printemps, les champs voisins de la ville se couvraient d’un tapis bigarré de fleurs sauvages, de narcisses et d’iris. Des amandiers, des térébinthes et des néfliers fleurissaient en toute splendeur et à travers le feuillage bruissant des nerpruns, on voyait percer de petites baies rouges. Leffluve de l’aneth, qui emplissait l’air, parvenait jusqu’à l’intérieur des murs entourant le quartier juif, le mellah. Dans les ruelles étroites où s’ébattaient gaiement les enfants, les parfums enivrants des alentours embaumaient l’air, pénétraient dans les boutiques des cordonniers, des tailleurs, des brodeurs et des orfèvres, et s’infiltraient jusque dans les batei'Midrach, les lieux de prière et d’étude où les érudits en djellaba se réunissaient pour étudier.

À cette époque de l’année, les portails de bois du mellah s’ouvraient tout grand, comme si la méfiance et les restrictions, qui avaient cours en hiver, n’étaient plus de mise, à la période où le peuple juif se préparait à la fête de la liberté. Les premiers à sortir étaient les enfants dont les cris pleins d’entrain étaient renvoyés par l’écho tandis qu’ils se précipitaient, ravis, vers le grand terrain vague qui séparait le mellah de la Médina, la vieille ville musulmane de Meknès. Des femmes chargées de grands bacs et de ballots de linge sortaient à leur suite. C’étaient les laveuses qui allaient faire leur grande lessive, amidonner le linge, puis le repasser à l’approche de la fête des matsoth. Et finalement, c’était le tour des notables qui sortaient sans se presser, conformément à leur dignité de Talmidei 'hakhamim posés et polis.

Le printemps se ressentait également dans la ville musulmane jouxtant le mellah. Les âniers et les chameliers saluaient leurs voisins juifs plus amicalement que de coutume. Les charifim eux-mêmes – ces musulmans extrémistes ׳ toujours maussades à l’accoutumée et plus emplis de haine contre les Juifs que les gens du peuple semblaient s’adoucir. Un souffle printanier de fraternité paisible enveloppait les êtres.

Telle était l’atmosphère qui se renouvelait chaque année, mais tout allait changer à l’approche de la fête de Pessa’h de l’année 5663 (1903).La situation des Juifs du Maroc avait toujours été précaire : il suffisait d’un léger souffle pour faire tomber le voile d’amitié de leurs voisins musulmans et déclencher des pogromes ensanglantés qu’on appelait tritel. Une fois par an, des membres fanatiques des tribus arabes et des Berbères se réunissaient en masse à Meknès pour fêter leur grand jour, la issaouwa.

C’étaient des journées de calamité et de frayeur durant lesquelles les Juifs se calfeutraient derrière les murs du mellah et attendaient que les troubles prennent fin. On versait des sommes énormes pour amadouer le gouverneur afin qu’il éloigne la foule déchaînée du quartier juif, ce qui n’empêchait pas, certaines années, les Juifs, dont les boutiques étaient situées dans le quartier arabe, de se retrouver dépouillés de tous leurs biens après la fête, parce que la foule avait saccagé leurs échoppes.

Les Juifs, hélas, étaient donc déjà habitués à cette réalité, et une fois la tempête passée, la vie reprenait généralement son cours.

Mais cette année-là, il règne dans l’air une sensation d’oppression plus forte que jamais. Des vents de changement soufflent un peu partout dans le monde, et au Maroc, tout changement signifie le malheur des Juifs. Le Maroc, en effet, est en effervescence du fait de l’immixtion des puissances européennes, l’Espagne, l’Angleterre et la France, qui revendiquent une part d'influence sur le royaume qui va en s’effritant. La situation, de plus en plus délicate, finit par exploser. Les tribus berbères en révolte contre le sultan légitime Moulay ,Hafid, accusé de céder aux pressions européennes, s'étaient rassemblées autour de Meknès et avaient proclamé un nouveau roi, Moulay Azin.

Les Juifs bouclent immédiatement les portes du mellah.

En très peu de temps, les abords de Meknès se remplissent d’une foule de révoltés formée de cavaliers montés sur des chameaux, de guerriers masqués, d’hommes robustes armés de poignards et de fusils datant de l’Antiquité, d’une racaille munie de haches et autres sortes d’armes improvisées. L'immense troupe se dirige d’abord vers Fès, la capitale où demeure le roi, distante d’une journée à cheval de Meknès, mais elle est repoussée par les combattants de la « garde noire », la garde rapprochée du roi. Les insurgés, changeant de direction, décident alors d’investir Meknès, la seconde ville du royaume. À l’intérieur du mellah, l’angoisse va en grandissant. Les Juifs évitent soigneusement de prendre parti dans cette querelle où deux souverains se disputent la couronne, mais tout le monde sait que lorsque les fondements du régime s’écroulent, c’est sur eux que tous déversent leur colère. Les Juifs, par définition, sont des dhimmis, des étrangers tolérés par le roi, dont toute l’existence n’est due qu’à la grâce du souverain. Qui veut s’en prendre au roi s’attaque donc d’abord aux Juifs, ses protégés…

La vie et l'impact de Rabbi Refael Baroukh Toledano Une ville assiegee

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