5 avril


La première étape: le désarmement des Juifs le 5 avril, 1912

tritel

Cette base documentaire déjà fort riche est suppléée par quelques relations en judéo-arabe que l'on doit également, à des témoins oculaires. L'érudit, Salomon Cohen, était depuis 1911 le trésorier (gizbar) de la communauté juive de Fès, dont il relata l'histoire dans son journal, en judéo-arabe (A8). Celui-ci couvre les années 1879 à 1925, date du décès de l'auteur. L'intérêt du témoignage de Cohen réside dans le fait qu'il a aussi vécu directement les événements de 1912 qu'il rapporte dans son journal. En outre, il est nommé en 1913, membre de la commission chargée de l'indemnisation des victimes du tritel. L'original de son journal, déposé autrefois dans les archives de la communauté juive de Fès, semble aujourd'hui perdu, mais, heureusement, il en subsiste une copie à l'Institut des manuscrits microfilmés de la Bibliothèque Nationale d'Israël, à Jérusalem. Une traduction hébraïque comprenant 76 pages très denses, effectuée par Hananiah Dahan en 1975, fut publiée dans le livre du grand rabbin David Ovadia (1913-2010) sur les Juifs de Fès.

Enfin, certains détails personnels sont fournis par deux sources supplémentaires. Dans leur recueil de textes judéo-arabes de Fès, Louis Brunot et Elie Malka inclurent la transcription d'un récit en judéo-arabe d'une femme anonyme qui vécut également ces heures éprouvantes (A9). G. B. Choukroun publia en 1993 une qasîda sur le tritel, recueillie de la bouche d'une dame fassie, Mes'ûda Sam'ûn, âgée alors de plus de 95 ans. Cette complainte fut composée à l'époque par le rabbin Moïse Lévy, disciple et gendre de l'érudit Joseph Ben Naïm (A10).

La première étape: le désarmement des Juifs le 5 avril, 1912

 Dès avant les événements dramatiques du pogrome de Fès, eut lieu un incident qui se révélera par la suite lourd de conséquences. Le 5 avril les autorités militaires françaises procédèrent à la réquisition de tous les fusils et les munitions détenues par la population fassie. Or, comme par hasard les premières perquisitions furent effectuées par les soldats de l'armée chérifienne auprès des habitants du mellâh, sous prétexte que ces derniers fournissaient des armes aux tribus berbères (Bl-3). Accusation d'autant plus ignoble que l'on savait pertinemment que l'hostilité de ces tribus s'exerçait en premier lieu contre les Juifs et que par ailleurs, c'était Mawlây al-Hâfid et son chambellan qui les armaient secrètement contre la France. Comme cela sera émis plus loin, l'hypothèse d'un acte prémédité de la part des Français qui ont observé la manière valeureuse dont les Juifs de Fès se sont défendus en 1911, n'est pas à exclure. Ils voulaient empêcher de semblables actes de défense lors de l'émeute pressentie.

Pour stimuler le zèle des soldats marocains on leur promit des primes ! 50 frs) en cas de découvertes de caches d'armes ou de cartouches. Animée d'une haine farouche contre les Juifs, la soldatesque maure se livra à toutes sortes de «dragonnades». Défonçant les portes des boutiques et des maisons du mellâh, ils violentèrent les femmes et frappèrent les habitants à coups de crosse. Comme on pouvait s'y attendre, ces perquisitions ne donnèrent qu'une maigre récolte, alors que de semblables recherches menées en ville arabe après la révolte, mettront au jour plus de 30 000 fusils.

Selon un rapport d'Amram Elmaleh (B2), les askari-s déposèrent sournoisement des paquets de cartouches dans les boutiques des Juifs, afin d'extorquer de l'argent à leurs propriétaires. Un jeune boutiquier, accusé de cacher des cartouches, fut conduit manu militari le soir du sabbat dans une caserne, où «sur l'ordre d'un officier français, il reçut à titre de question, une cruelle bastonnade qui le laissa plus mort que vif».

Ces violences provoquèrent un effroyable émoi au mellâh dont les habitants francophiles avaient réservé un accueil enthousiaste tant aux troupes de Moinier (avril 1911) qu'à la récente ambassade conduite par Regnault. Elmaleh adressa à ce dernier une énergique protestation exigeant des sévères sanctions contre les soldats coupables, menaçant de saisir l'opinion publique en Europe. De même, le consul britannique s'en émut (B3). Aucune suite ne fut donnée à l'enquête, mais les protestations d'Elmaleh ainsi que les accrochages et les insultes échangés au cours de la recherche, exacerbèrent sans doute le sentiment de revanche des soldats musulmans. La richesse du mobilier et l'abondance des marchandises constatées par eux lors de la fouille des magasins et des maisons juifs ne pouvaient qu'exciter leur convoitise. L'indignation des Juifs, désormais sans défense, allait être engloutie par une épreuve bien plus terrible qui se préparait dans les jours suivants.

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