L’exil Marocain -Dans la poesie de David Ben Hassine-André E. Elbaz

recherches-i.Ben-Ami

Cependant, les souffrances de l'exil marocain suscitent plus souvent, chez David Ben Hassine, des reactions moins affligeantes. Le poete trouve sa consolation dans l'espoir messianique, etroitement lie, chez lui, au retour a Sion, themes omnipresents dans toute son oeuvre. II croit le salut d'autant plus proche que les persecutions ont ete plus aigues:

Un liberateur arrive dans la ville de Sion…

Dieu lui-meme vient vous sauver…

Je n'en peux plus de languir apres toi,

O la bien-aimee de mon coeur,

L'annee de ma redemption.

Mon salut approche…

Je ramene vos captifs dans leur patrie.

(לישועתך ה׳ קוינו, טז, ב)

Aux yeux de David Ben Hassine, les malheurs d'Israel au Maroc, et en particulier, le regne sanguinaire de Moulay Elyazid, represented les חבלי המשיח la “guerre de Gog et Magog”, ces catastrophes qui constituent, selon la tradition, les signes avant-coureurs de l'ere messianique, auxquels il fait allusion dans son poeme מה טוב ומה נעים גורלו, טו. Comme lui, de nombreux rabbins marocains ont vu dans les persecutions du XVIIIe siecle des signes annonciateurs du salut, et ont conclu que l'intensite meme des souffrances et de la degradation des juifs devait hater la venue du “Fils de David”. David Ben Hassine assure que le salut est proche, que “le Premier en Sion va regner sur nous. Nos yeux vont voir sa majeste et sa beaute” (;אבא ביתך, ה שמחו בה׳, כח, ב).

Le messie annonce par le poete doit mettre fin a l'oppression (נשים שאננות, פח) et “liberer les prisonniers de la maison de servitude” (מתי תכונן עיר ציון, ט, ב). Il ramene la joie a ceux qui portent le deuil de l'exil (,משיח בן דוד מלכנו) et, surtout, les guerit de leur humiliation, en leur permettant a nouveau de marcher “la tete haute” (לך אוחיל רב עליליה, יד). Dans le premier des “chants splendides… composes a la gloire du souverain dont nous attendons la venue, notre messie de justice, incessamment, de notre vivant, Amen!”, David Ben Hassine expose la plupart des themes messianiques qui lui tiennent a coeur, tous en contraste avec les infortunes de l'exil marocain:

Rassemble mes disperses, mes expulses!

O Tout Puissant! Tu as promis depuis le debut des generations:

Un rameau sortira de la souche de Yisha'i,

Un rejeton poussera de ses racines.

Console done, et accorde ta misericorde

A tes enfants qui demeurent dans les tenebres de

minuit,

En leur envoyant le liberateur, nomme Menahem (Consolateur)…

Il relevera bien haut l'etendard de Juda,

Et deviendra notre souverain…

Les impies trembleront devant lui, seront aneantis.

Alors nous briserons nos chaines…

Il fera cesser l'exploitation,

Et protegera les faibles et les malheureux.

II lavera les souillures infamantes de la fille de Sion…

Et je triompherai de mes ennemis

Pendant son regne, la sagesse de la Thora se repandra

Un peuple ne levera plus l'epee sur un autre peuple…

Il fera mourir les impies avec le souffle de ses levres…

Hate son arrive! Qu'il vienne avant son heure

Sauver les pecheurs repentis!…

Puissent nos oreilles entendre la bonne nouvelle!

Alors les enfants d'Israel pourront revenir dans leur pays.

(אליך צורי שוכן עליה, יט)

Ce dernier voeu, la perspective du rassemblement des exiles dans la terre d'Israel, porte a son comble l'enthousiasme du poete. II ne tarit pas d'eloges sur la beaute de “ma terre,” ma vraie “patrie”, oil il “veut se rendre des qu'il sera libere de sa captivite” (מתי תכונן עיר ציון, ט, ב). Sans doute enflamme par les recits des rabbins  emissaires de Terre Sainte qu'il a vus a Meknes, il chante le Temple rebati sur le Mont Moria, les portes monumentales et “les remparts de Jerusalem, ou vecurent tant de sages” (לדוד שיר ומזמור, יז, ב). Il porte aux nues la saintete et la beaute de Tiberiade, reconstruite au bord de “la Mer de Kinnereth” par Haim Aboulafia, parmi les combes sacrees des plus grandes sommites d'Israel (אוחיל יום יום אשתאה, יח). Sous l’empire de l’emotion, il se delecte de la melodie des vocables hebraiques qui evoquent la splendeur de la nature a Sion:

Israel… va heriter pour toujours

La terre du lys, dans

Le Sharon, le Sharon,

La rose des vallees!

(בטחו, בטחו באל, ל, ב)

La terre d'Israel de David Ben Hassine, c'est une sorte de pays ideal, une terre sainte oil il aimerait vivre, dans la dignite et la liberte retrouvees, en somme l'antithese de l'univers hostile de l'exil marocain abhorre.

Cette image ideale de la terre d'Israel a justement pour but de consoler les exiles desesperes.

La solution eschatologique constitue le seul re- mede que David Ben Hassine puisse proposer aux souffrances de l'exil marocain, car il ne peut imaginer a son epoque qu'une amelioration quelconque puisse intervenir sur le plan local. Sa vision tragique de cet exil est d'autant plus severe qu'il a lui-meme vecu dans le denuement le plus complet, voire dans la misere et la faim. La naivete de ses reactions personnelles, la spon- taneite meme des emotions d'un poete qui partage le sort quotidien d'une communaute qui se reconnait en lui, font du recueil Tehilla Le-David non seulement un document historique de premier ordre sur la condition des juifs marocains au XVIIIe siecle, mais egalement un temoignage precieux sur leur etat d'ame. Temoignage d'autant plus important que les poemes de David Ben Hassine continuent a etre chantes, encore aujourd'hui, non seulement au Maroc, mais dans tout le Bassin Mediterraneen, contribuant ainsi a forger la conscience collective des juifs originaires des pays d'Islam.

L’exil Marocain Dans la poesie de David Ben Hassine-André E. Elbaz

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