Il était une fois le Maroc…David Bensoussan- le bombardement de Casablanca

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C'est en 1907 qu'eut lieu le bombardement de Casablanca et l'occupation d'Oujda…

En effet. Du temps du règne d'Abdelaziz, il y avait eu un certain mécontentement dans le pays suite au traité d'Algésiras. Le chef du dispensaire médical français à Marrakech, le Dr Émile Mauchamp fut assassiné de plusieurs coups de couteau et en riposte, le général Lyautey occupa Oujda et une partie du Maroc oriental. Neuf ouvriers européens travaillant dans le chantier du chemin de fer près du port de Casablanca furent assassinés. La fureur populaire aurait été déclenchée par le fait que le chemin du rail avait traversé un ancien cimetière musulman. Le gouvernement français dépêcha le navire de guerre Le Galilée (66 soldats) qui devait attendre l'arrivée des croiseurs Du Cheyla (75 soldats) et Le Forbin (44 soldats) prévue pour le 5 août et L'Escadre du Nord par la suite. On pensait alors qu'il fallait 1000 soldats pour occuper Casablanca. Il semblerait que le capitaine du Galilée n'ait pas attendu de renforts et, contre l'avis du corps consulaire, dépêcha ses 66 soldats le 5 août même et la ville fut bombardée. L'incendie s'y déclara. Les canons du croiseur Du Cheyla bombardèrent les alentours. L'estimation du nombre de victimes du bombardement varie entre 600 et 2000. Les troubles dans la ville furent tels que les Juifs s'échappèrent dans des barques pour se protéger contre les attaques de pillards. Par la suite, le contingent français compta près de 6300 hommes, dont 2000 tirailleurs sénégalais et soldats de la Légion étrangère auxquels s'ajoutèrent 500 fusiliers marins espagnols de la canonnière Don Alvar de Bazan. Le Maroc était impuissant devant la force militaire française à laquelle se joignait celle de l'Espagne. Les mousquets marocains datant de 1800 ne pouvaient se mesurer aux fusils Lebel à tir rapide et aux canons de 75 mm des Français. Le corps consulaire à Casablanca fut fort mécontent de l'intervention prématurée de la marine. Mais les politiques en France assumèrent l'initiative du capitaine du Galilée. Quant à la presse socialiste française, elle critiqua violemment le bombardement de Casablanca et l'occupation d'Oujda.

Georges Bourdon fit une description bouleversante des évènements de Casablanca dans son ouvrage Ce que j’ai vu au Maroc – Les journées de Casablanca. Il décrit ainsi la ville après le bombardement, le pillage et l'incendie : « Aspirez l'âcre et tiède odeur de pourriture, de charogne et de cendre, qui enveloppe cette ville de trente mille habitants dans une atmosphère de sang et de mort… Errez à travers Casablanca, ouvrez vos yeux et vos oreilles : vous n'y verrez que des tableaux de meurtre et de sang, vous n'y trouverez que des plaintes d'agonie… La corvée des cadavres ensevelit immédiatement ceux qu'elle ramasse, et ne compte pas.»

Le Dr Mauchamp fut décoré de la Légion d'honneur à titre posthume et eut droit à des funérailles nationales dans sa ville natale de Chalon- sur-Saône. Un monument y perpétue son souvenir. Son père compila un ouvrage posthume, La sorcellerie au Maroc à partir des notes de son fils.

Le directeur de l'Alliance Israélite Universelle décrivit ainsi les évènements de 1907 : « Le 3 août, les soldats du Makhzen se précipitent sur le Mellah, suivis de toute la populace, et commencent le pillage. Les 5 ou 6 000 hommes qui attendaient aux portes pénètrent en ville, se répandent tant au Mellah qu'à la médina, volent, pillent, violent, tuent et, pendant trois jours, répandent en ville la terreur, jusqu'à l'arrivée des troupes françaises. Il n'y a pas une maison, pas une famille, pas une personne qui ait été épargnée… La Kaiseria, où il y avait plus de cinq cents magasins israélites, n'était plus que ruines après les incendies. Le Mellah est saccagé d'un bout à l'autre, portes et fenêtres brisées, meubles et effets dispersés, tout est détruit, nos écoles sont mises en pièces, les bancs et les pupitres cassés, le matériel, l'argent, enlevé. Toutes les synagogues sont mises à sac… Partout c'est la désolation, la dévastation. On ne dirait pas que des hommes ont pu faire tant de dégâts, on croirait plutôt qu'un cataclysme s'est abattu sur la ville… Des scènes terribles se produisent, il faut entendre le récit de la bouche des victimes et des rabbins de nos écoles… Un des rabbins avait une fille unique, il avait refusé de s’embarquer. Des Kabyles (Berbères) pénètrent chez lui, il offre tout son avoir, ses économies, ses meubles, on les lui prend et sa fille aussi. Il court après elle, on lui assène un coup de poignard sur la tête, il tombe, quand il se relève, sa fille a disparu. Une jeune femme mariée depuis quinze jours est enlevée. Elle résiste, on la tue. Je vous raconte des scènes entre mille, impossible de tout dire…» Le Mellah de Settat où s'étaient réfugiés près de 800 Juifs de Casablanca fut également pillé. À Mzab, Ouezzane, Alcazar, Demnat et Fès, les exactions et les vexations se produisirent également.

Le rabbin et poète David Elkaïm de Mogador lança un appel dans la revue londonienne de langue hébraïque Hayéhoudi, adressé à toutes les organisations de philanthropie juive afin qu'elles fassent parvenir des armes aux Juifs du Maroc afin qu'ils puissent se protéger des attaques et des razzias de leurs voisins musulmans.

Le mois de mars de l'année suivante, les troupes du général d'Amade défirent les combattants de la tribu des Mdakra, l'artillerie faisant près de 1500 morts. Des centaines de tentes furent brûlées. Les pertes de l'armée française durant l'occupation de la Chaouia s'élevèrent à une centaine de tués et près de 400 blessés. Plusieurs milliers de Marocains perdirent la vie.

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