Jacob Ben Isaac Bu-Ifergan, habbaliste du sud marocain. M. Haim Zafrani

Jacob Ben Isaac Bu-Ifergan, habbaliste du sud marocain. M. Haim Zafrani 

En octobre dernier, au moment où mon livre Kabbale, vie mystique et magie voyait le jour, l'attention de notre collègue et ami, le professeur André Caquot, fut attirée par la préface d'une oeuvre mystique inédite, intitulée Perah Shoshan « Fleur de lys », par un M. Affergan qui se dit descendant de son auteur. Celui-ci se nommait Ya'aqob ha-Yoser « Jacob le potier » surnommé Ifergan, un toponyme berbère, pluriel de afrag/ifrig signifiant « enceinte », « enclos », « bergerie ». Ce rabbin de Taroudant (région du Sous), qui vivait à la fin du xvie et début du xvne siècle, était artisan de son état, « potier » comme pourrait le suggérer le qualificatif hébraïque ha-Yoser accolé à son nom, plus sûrement bijoutier, ha-soref comme il l'indique lui-même dans l'introduction à une autre de ses oeuvres kabbalistiquesMinhah hadashah (fol. 53a).

L'oeuvre intitulée Perah Shoshan est un commentaire ésotérique original du traité mishnaïque 'Abot, un des ouvrages fondamentaux de ce qu'on pourrait appeler l'éthique rabbinique postbiblique.

De cet écrit inédit, on connaît deux copies ; l'une est à la bibliothèque de l'Université de Cambridge (Grande-Bretagne), l'autre est à New York, au Jewish Theological Seminary. Une troisième appartient à l'ancien directeur scientifique de l'Institut Ben Zvi (Jérusalem), le professeur Meir Benayahu, qui nous en a donné une photocopie. Il semble qu'il s'agisse d'une copie autographe. L'ouvrage était, à l'origine, en possession des descendants de l'auteur. Il porte, à la fin du dernier folio, la marque du fils qui signe : « Moi, le chétif parmi les disciples qui ont appris la science de la bouche des princes, Abraham ben Ya'aqob Ifergan. » A la suite de cette première signature, on trouve cette note : « Que soit exalté le Créateur qui fait tourner les sphères célestes et préside à leurs révolutions. Il a fait de sorte que ce livre retourne aux descendants de son auteur, à moi, le chétif parmi mes compagnons d'étude, que le Dieu de mon père soit avec moi, Moshé surnommé Ifergan. » Ce texte est précédé de l'indication d'une date, jeudi du dernier shabbat (la dernière semaine) du mois de Tishri de l'année 5354 (1594), date inscrite dans le chronogramme   אשמחהemprunté à Psaumes IX, 3 אשמחה ואעלצהכך « Je me réjouirai et exulterai en toi » (fol. 192b)

La fin de la préface (fol. 15) est une page autobiographique où l'auteur raconte quelques épisodes pénibles de l'exil de sa communauté contrainte de quitter Taroudant à cause de la sécheresse, de la famine et des épidémies, les migrations et errances, les tribulations dans la vallée du Sous et jusqu'aux confins du Sahara (Aqqa, Tamghrut et Ifrane de l'Anti-Atlas), ses propres mésaventures, la détresse et l'infortune de ses compagnons d'exil.

A ce kabbaliste du Sud marocain, Jacob Ifergan (ou Bu-Ifergan, comme il se surnomme parfois), dont je connais les écrits depuis plus de vingt-cinq ans, je n'ai dédié jusqu'ici que de très brèves notes, dans mon dernier livre Kabbale, vie mystique et magie, comme dans les ouvrages précédents, Mille ans de vie juive au Maroc ou

Poésie juive en Occident musulman (au chapitre Poésie et mystique), me réservant de consacrer une étude substantielle à l'ensemble de ses écrits exégétiques à caractère mystique, le Perah Shoshan que nous venons d'évoquer et, plus spécialement, à son commentaire ésotérique de la Torah, une oeuvre monumentale inédite, une somme

considérable de spéculations kabbalistiques réunies en un gros volume de plus de sept cents folios, intitule Minhah Hadashah « Offrande nouvelle », dont nous avons trouvé une copie autographe au City Muséum de Liverpool, enregistrée sous la cote M. 12044, copie rédigée dans la ville d'Aqqa, commencée le 25 du mois de Kislew et achevée près de neuf mois plus tard, le 19 du mois à'Elul de l'année 5379 (1619) comme cela ressort du chronogramme emprunté à Nombres  בהקריבכם מנחה חדשה  לה'lorsque vous présenterez une offrande nouvelle à l'Éternel », un verset scripturaire où se trouvent ainsi inscrits, intégrés, le titre du livre et la date de sa rédaction. Ces indications sont notées de la main de l'auteur au folio 64a, pagination en caractères hébraïques, et dans le colophon du folio 682a /b

Zafrani Haïm. Jacob Ben Isaac Bu-Ifergan, kabbaliste du Sud marocain. Effervescence mystique et création littéraire

ésotérique. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 131ᵉ année, N. 1, 1987. pp. 62-80;

doi : https://doi.org/10.3406/crai.1987.14459

https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1987_num_131_1_14459

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