Les noms de famille juifs d'Afrique du nord des origines a nos jours – Joseph Toledano-Dahan-premiere partie

DAHAN
Nom patronymique d'origine ar abe, indicatif d'un métier: addlian, le peintre, celui qui pose un vernis, porté aussi bien chez les Juifs que chez les Musulmans du Maghreb, ou encore celui qui oint, le masseur. Se basant sur un autre sens du mot en arabe dialectal marocain, rabbi Yossef Messas avance une autre explication moins plausible: marchand de beurre. Ce nom patronymique était déjà porté en Espagne où il est attesté à Tolède au XlVème siècle. Après l’expulsion de 1492, on le trouve dans toutes les communautés sépharades d'Orient et d’Occident. Autres formes: Adahan, Dahhan, Bendahan. Au XXème siècle, nom très répandu, porté dans les trois pays du Maghreb, particulièrement au Maroc où il était un des cinq noms les plus usuels (Tafilalet, Meknès, Fès, Sefrou, Rabat, Salé, Marrakech, Tétouan, Tanger, Oujda. Mogador, Mazagan, Mzab, Ouezzane, Casablanca); en Algérie (Oran, Tiaret, Tlemcen, Aïn-Témouchent, Sétif, Constantine, Biskra, Saint- \maud, Bougie, Alger, Saïda, Miliana, Mostaganem, Sahara), à Gibraltar et en Tunisie ! Tunis).
R.SAADIA: Rabbin à Béghris dans le,Tafilalet au sud du Maroc au XVIlème siècle, fondateur d'une célébré dynastie de rabbins.
R.SALOMON: dit Hazaquen, le vieux, fils de rabbi Saadia, il succéda à son père comme rabbin de Beghris. Son fils Messod lui succéda comme rabbin de Beghris.
- SALOMON: Fils de Messod. Il succéda également à son père comme rabbin de Beghris. A la fin du XVIIème siècle, il fut délégué par sa communauté pour recueillir des fonds à Amsterdam pour racheter la syanagogue familiale tombée entre les mains des voisins musulmans. Il resta quelque temps dans la ville et y traduisit en espagnol le livre de rabbi Shélomo Sasportas, "Zekher-rab", sous le titre "Memorias de los 613 Preceptos " (Amsterdam, 1727). Auteur d'un recueil de morale intitulé "Binéot déshé", qui fut publié avec le livre de rabbi Yaacob Séréro ,"Zohar Harquia" (Amsterdam 1735, réédité en Russie en 1809).
- MOCHE: Fils de Yaacob. Le plus célèbre des rabbins de la famille, né à Meknès dans une famille originaire du Tafilalet. Rabbin-juge, il fit partie du tribunal de Meknès aux côtés de rabbi Moché Berdugo, dit Harav Hamasbir. Il passa quelques années à Marrakech et à Fès. A la mort de rabbi Moché Berdugo, en 1731, la communauté de Meknès le fit revenir de Fès pour présider le tribunal rabbinique. Un des notables de la ville, Aharon Benaroch lui fit don d'un terrain pour y édifier sa maison et sa synagogue et les riches de la ville se cotisèrent pour en couvrir tous les frais. Ascète d'une grande piété, il fut considéré en son temps avec son frère, rabbi Mimoun, "comme les deux colonnes sur lesquelles repose la Torah". Parmi ses décisions judiciaires les plus originales: l'interdiction pour une femme de servir comme "shohet" (abatteur rituel) bien que le "Shoulhan Aroukh" de rabbi Yossef Caro l'autorise expressément, en arguant que la coutume était ancrée dans les moeurs et que dans ce cas "la coutume l’emporte sur la loi". Poète fécond, une de ses "quinot" était entrée dans la liturgie des synagogues de Meknès pendant la période de Ben Hametsarim, les jours de danger précédant le 9 du mois de Ab, Ticha Beab commémorant la destruction du Temple. Son poème en l'honneur du chabbat, "Mévorakh shabbat", était chanté tous les vendredis soirs dans les foyers sur un air de musique andalouse. La communauté lui vouait une telle dévotion qu'elle interpréta comme un signe de la levée de sa protection, le sac du mellah par la Garde Noire, trois jours après sa mort, en 1737. Nous sommes alors en pleine guerre de succession pour le trône de Moulay Ismael. Le nouveau souverain, Moulay Abdallah, pour se gagner les faveurs de la Garde Noire, qui faisait et défaisait les souverains, l'autorisa à piller le mellah. Trop occupés au pillage, les soldats de l'armée impériale épargnèrent les habitants. Son fils Yaacob fut rabbin à Fès et hérita de son père le don de poète. Son poème "Eli végoali, chéma koli" (Mon dieu et mon sauveur, écoute ma voix) est égalemnt entré dans la liturgie des synagogues marocaines.
- MIMOUN: Rabbin à Tétouan, contemporain du célèbre rabbin Moché Malka qui pleura sa mort dans une élégie de 1756.
- YOSSEF: Rabbin de Tétouan qui monta en Terre Sainte en 1845 où il mourut à un âge très avancé. Auteur de nombreux ouvrages non publiés. Son petit- fils, Yossef, qui fut rabbin à Ceuta, publia son chef-d'oeuvre "Shofaria diyossef' (Alexandrie, 1897). Il publia lui-même un ouvrage de Responsa: "Abanim shlémot" avec le soutien fiancier des juifs de Debdou et d'Oran.
ABRAHAM: Commerçant né à Tétouan, il s'installe à Gibraltar en 1789 où il fonda une grande famille.
JUDAH: Marchand ambulant né à Meknès, il s'installa comme de nombreux de ses compatriotes dans la ville de Ouezane, à la demande des autorités qui avaient besoin de marchands et artisans, au milieu du XVIIIème siècle. Avec d'autres membres de sa famille, ils s'installèrent à Gibraltar en 1756. Son fils Abraham, né à Meknès quitta Gibraltar pour Lisbonne en 1803.
- YOSSEF RAPHAËL: Né à Meknes en 1853, fils de Moché, il monta avec ses parents à Tibériade en 1857. Après des études rabbiniques, il épousa la fille de rabbi David Abbou de Safed. 11 ne se cantonna pas dans son rôle spirituel et joua un grand rôle dans l'accueil des immigrants du Maroc dans la ville de Galilée. Fuyant les honneurs, il refusa à plusieurs reprises de partir en mission à l'étranger pour ne pas avoir à quitter la Terre Sainte.
YAACOB: Sans doute le plus vieux des immigrants du Maroc en Terre Sainte. En 1893, à l'âge de 90 ans, il se joignit à la grande caravane qui quitta Meknès pour Tibériade. La vue de ce vieillard impotent osant affronter les dangers de la route pour réaliser son rêve, fit une impression énorme sur toute la communauté et en particulier sur ses rabbins qui firent serment de l'imiter ..l'an prochain ! Mais le propre des rêves est de se briser: quelques mois plus tard arriva la première lettre au seul fils resté pour liquider les affaires, lui conseillant vivement de renoncer à toute idée de alya: "Ici il n'y a que du soleil et des pierres et point de parnassa (gagne- pain)". Troublé, le fils alla montrer la lettre de son frère à rabbi Hayim Messas qui lui ntima l'ordre de détruire ce document et ce ne le montrer à personne: "Comment : en frère n'a-t-il pas peur de dire le mal de la Terre Sainte, ne se souvient-il pas du sert réservé aux Méraglim (éclaireurs envoyés reconnaître le pays par Moïse) ? Et puis n'était-il pas un peu fou ton frère, qu'est-ce qu'il croyait qu'il aurait à la fois le privilège de vivre en Terre Sainte et de trouver la pamassa, les deux à la fois ?!!"… Mais en fin de compte même la pamassa vint puisque deux de ses petits-fils furent maires de Tibériade sous le Mandat britannique !
SHIMON: Petit-fils de Yaacob, né à Tibériade en 1900. Comme tous les autres originaires d'Afrique du Nord en Galilée placés sous la protection de la France par les consuls de France de la famille Abbou de Safed, il fut expulsé avec sa famille par les Turcs à la déclaration de la guerre en 1914 comme sujets ennemis. Réfugiés en Corse, ils revinrent à Tibériade en 1919. Installé comme avocat, il se lança également dans la vie publique, entretenant d'excellentes relations avec les habitants arabes de la ville, ce qui lui permit d'accéder à la mairie en 1935.
BLANCHE BENDAHAN: Célèbre écrivain et journaliste née à Oran dans une famille originaire de Tétouan. Très attachée à ses origines, elle place à Tétouan le cadre de son roman "Mazaltob" – qui raconte la lutte des générations, le choc entre la tradition et le modernisme. Mariée contre son gré à un homme riche mais beaucoup plus âgé qu'elle, Mazaltob déjà imprégnée de culture française, continue à aimer secrètement un jeune homme de son âge. Le roman reçut en 1937 le Prix de l'Académie Française, "pour avoir montré la voie aux romanciers de l'avenir pour l'étude de l'âme du judaïsme marocain, domaine encore inexploré et cependant riche de vérité". Ses autres oeuvres comprennent un recueil de poèmes: "La voie sur l'eau" (Paris 1926), "Poèmes en short" (Paris 1948) couronné par l'Académie de l'Humour français et un roman, "Messieurs vous êtes impuissants", (Paris 1961). Après l'indépendance de l'Algérie, elle s'installa à Paris où elle mourut au début des années 70.
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