ארכיון יומי: 19 ביוני 2023


אשר כנפו-הכינור ואני-וריאציות לכינור ולביוגרפיה. מעשי ה״אַגְזְדּוֹר

. מעשי ה״אַגְזְדּוֹר״

במידה מסוימת, היה קיים מעין פולחן מוות בעירנו. הדבר הנורא ביותר שליווה אותי במשך זמן רב היה מראה פניהן השרוטות של נשים. בתחילה, לא הבנתי את פשר השריטות שעל פני אותן נשים – בדרך כלל לבושות שחורים. ופעם אחת, כשיצאתי מה״סלא״, התלמוד תורה שבו למדתי אצל הרב תמסוט, הייתי עד ללוויה רבת משתתפים הצועדת בכיוון ״באב-דוקלה״, שער המוביל אל בית העלמין. חברי הציע לי להצטרף להלוויה.

״הוריי לא מרשים.״ עניתי. ״למה שלא ירשו? ליווי המת הוא מצווה גדולה!״ השתכנעתי והלכתי אחריו. הגענו קרוב אל בית העלמין, ושם, ליד השער, עמדו מספר נשים וסטרו לעצמן בכל כוחן, תוך כדי קריאה קצבית "וואה! וואה!״(הוי הוי). מחזות נוספים כאלה ראיתי גם בבתים פרטיים.

פעם ראיתי אישה – אם לבן שנפטר ללא עת, שהכתה את פניה עד זוב דם. כאשר דיברתי על כך עם אבי הוא אמר לי: ״זהו מעשה אסור מדאורייתא, שהרי כתוב בתורה ׳ושרט לנפש לא תתנו בבשרכם׳!״

"אם כך למה הן עושות את זה?״

״מתוך בערות. הרבנים חוזרים ומתריעים נגד המנהג הפסול הזה ולשווא!״

עוד סיפר לי אבא, שהנשים האלו שעמדו ליד בית העלמין הן מקוננות מקצועיות. כאשר הן שומעות שמת מישהו, הן מתייצבות שם, וכשמגיעים בני משפחת הנפטר או הנפטרת, הן מתחילות לבכות ולהכות על פניהן. לרוב, בני המשפחה גם הם נמשכים ועושים כמותן. בסופה של ההלוויה, הנשים מלוות את המשפחה לביתה וגם שם הן ממשיכות לקונן, ובכל פעם שמגיע מישהו חדש לנחם את האבלים, הן חוזרות על ה״אגזדור״ – כך נקרא בערבית מעשה ההכאה ושריטת הפנים.

במשפחתנו לא היו קיימים המנהגים האלה. כאמור, אבי – ממש כאביו רב העיר, ר׳ דוד כנפו לפניו – אסר לחלוטין את לבישת השחורים ואת מעשי האגזדוד וכשבאו מקוננות אל ביתנו בעקבות פטירת הסבא או הדוד, אבי נתן להן כמה מעות וביקשן לעזוב את המקום.

  1. 14. ארבעים שנות אבלות

ייתכן שההחצנה הזאת של האבל שבאה לידי ביטוי על ידי מעשי המקוננות, עזרה לאנשים והקלה עליהם באבלם. הואיל ואצלנו לא התאפשרה כל החצנה, הדבר התבטא בתוגה גדולה שהשתלטה על ביתנו במשך שנים רבות, תוגה שנעלמה רק כאשר באו הוריי ארצה.

אמנם חייהם כעולים חדשים לא היו קלים, אבל עצם העובדה שהם התאחדו עם שלושת בניהם, שני אחיי ואני, גרמה להם לנחת מרובה, ולא היו שבתות שמחות ומאושרות כמו אלו שעברנו בביתנו בלוד, עד שאחת מאחיותיי, רות, נספתה בתאונת דרכים והיא רק בת עשרים שנה. זה קרה בערב שבועות. התוגה חזרה אל ביתנו וחג השבועות הצטרף לחג הפורים ונהפך ליום עצוב ביותר. לא עזרו כל תחינותינו לאמי, בפורים ובעיקר בשבועות, הייתה יושבת רוב היום מכונסת במחשבותיה ומתעטפת בשתיקה מעיקה

״אימא!״ היינו אומרים לה, "חג השבועות הוא יום חג, ואנו מצווים לשמוח בחג!"

פני אימא היו נשארות חתומות ואי אפשר היה להעלות חיוך עליהן.

שנים רבות אחרי פטירתה של רות אחותי, אחי משה החליט לחוג את חג השבועות בבית מלון. כשהדבר נודע לאמי היא נזפה בו: ״אתה הולך לבית מלון בחג השבועות?"

היה ברור שלדעתה, בחג השבועות חייבים לעשות כמותה – להצטנף בבית או בבית הכנסת לזכר אחותנו רות.

״אבל אימא!״ הגיב משה, "רות נפטרה לפני שלושים ושמונה שנים!״

אימא התכנסה שוב בעצמה ולא אמרה דבר.

יומיים אחרי החג, כשמשה בא לבקר את הוריי, אבא חיבק אותו ואמר לו: ״אתה יודע, משה יקירי, במהלך השנים איבדנו יקירים, אחים ואחיות, איבדנו את איב ואורוק הגיסים שלך, ואיבדנו קרובים אהובים אחרים. אבל המוות של רות הוא משהו אחר. למרות הזמן שעבר, אנחנו הולכים לישון עם הכאב על אבדנה ובבוקר אנו קמים אתו."

ואני, כאשר משה סיפר לי את המעשה הזה, חשבתי בלבי: ׳שלושה עשר ילדים נולדו להם והם אהבו כל אחד מאתנו כאילו הוא בתם או בנם יחידם!׳

לימים, כאשר ראיתי את ״חתונת הדמים", מחזהו של לורקה, חשבתי שאצלנו, להוציא את הבגדים השחורים שאבי אסר על לבישתם, המצב היה דומה מאוד.

ואם נחזור לחגיגת בר המצווה שלי, תוכלו להבין שהיא אפילו לא נלקחה בחשבון!

אשר כנפו-הכינור ואני-וריאציות לכינור ולביוגרפיה. מעשי ה״אַגְזְדּוֹר

Saïd Sayagh L'autre Juive Roman

Les vents d'ouest frais et humides s’étaient arrêtés. Les vents d’est, chauds et secs, avaient commencé à dissiper l’humidité des saisons pluvieuses.

Le corps de Sol ne supportait plus le moindre bout de la robe légère quelle portait. Même la tunique en coton blanc, gorgée de vapeur, ne pouvant plus absorber la sueur ruisselante, commençait à irradier la chaleur qui s’ajoutait à celle du corps. Sol en était dégoûtée.

Elle défit la ceinture jaune en fil de soie, attachée à sa taille. Le pantalon bouffant glissa sur ses pieds. Elle le quitta, le plia, l’aplatit sous l’oreiller et s’allongea d’un mouvement lent sur la natte recouverte d’un drap blanc.

Elle entrevit, dans une semi-conscience, une aiguière qui déversait de l’eau, dans un bruit lent et doux. La vision la calma et la rafraîchît.

Elle voyait de l’eau douce et fraîche lui couler sur les pieds, glisser sur ses jambes, entre les cuisses, pour s’arrêter sur son ventre. L’image de l’eau s’estompa, alors qu’un plaisir doux et humide commença à s’emparer lentement de tous ses membres.

Elle eut l’impression de devenir tout entière un fruit juteux, rouge comme la chair de pastèque mûre; passa le bout de sa langue sur ses lèvres et eût l’impression de siroter du jus de grenade.

Ses fesses commencèrent à ondoyer dans un mouvement voluptueux; et un relâchement profond du fond de son intimité recouvrit la rondeur de son bassin.

Elle étendit sa jambe droite, s’étira vigoureusement et se réveilla brusquement. Sa poitrine fut prise d’une étrange impression de manque. Elle ressentit une douleur légère ; les stries torsadées de la natte s’étaient incrustées dans le bas de sa cuisse laissant un dessin profond sur sa peau. Cette sensation d’ébullition de son corps la tourmenta. Elle hésita longtemps à en parler avec sa mère. Elle ne savait pas comment se comporter avec cette vague impres­sion de péché, quelle n’avait pas commis mais qui s’empara d’elle. La chose lui semblait trop lourde chaque fois quelle décidait d’en parler avec sa mère. Elle finit par renoncer.

La maison de Benchimol l’interprète ressemblait à une ruche, animée de grouillements et de bourdonnements incessants. Le rez-de-chaussée, dans l’étroitesse de sa petite surface, ne pouvait contenir tous ceux qui lavaient à grande eau, ceux qui épongeaient, ceux qui dressaient les tapisseries murales couleur de henné décorées en leur centre d’étoiles à six branches vertes…

Les pièces de l’étage étaient pleines, de même que l’étaient les petites pièces gagnées sur l’espace non utilisé de la maison Tolédano voisine. Toutes les pièces furent meublées de divans et de tapis ras, le sol de la terrasse fut recouvert de tapis à poil long et une grande tente fut dressée pour protéger les cuisinières de la flamme dardée du soleil.

Esther,la fille Benchimol allait se marier et cela allait durer plusieurs jours. Les festivités commençaient le dimanche dit « du tissu blanc », car les femmes appartenant à la famille du fiancé rendaient visite, chargées de cadeaux, à la fiancée, chez ses parents. Elles enduisaient sa tête de henné, l’apprêtaient de la kassoua Lkbira, les vêtements de grand apparat et lui recouvraient la tête d’un tissu blanc quelle devait garder une nuit entière. Le lendemain, le fiancé nouait sept fois le morceau de tissu et l’uilisait comme ceinture jusqu’au shabbat dit de la vue. C’était l’oc­casion pour la fiancée de remercier les filles de la famille du fiancé avec des cadeaux. Le matin, après la prière de Shaharit, le fiancé était accompagné de sa famille et de ses amis, dans un cortège bruyant et joyeux, scandant des chants et des prières.

Le lendemain, la fiancée recevait des plateaux chargés de pains de sucre, de henné et de cadeaux divers. Le soir, elle recevait un œuf, du miel, du coton blanc étincelant, des bijoux en or et pierres précieuses. Puis, on cassait l’œuf sur la tête de la fiancée avec une clef pour augurer du bonheur et de la fortune. Le jour d’après, les femmes lui décoraient les mains et les pieds avec du henné et la paraient de tous les atours pour la rédaction de la ketouba.

La nuit suivante, nuit du henné, les femmes commencè­rent à vêtir Esther de la kassoua lkbira et l’assirent, dans  l’attente du fiancé, sur un divan surélevé.

Elles ajustèrent la jupe en filigrane sur des jupons bouf­fants, mirent le corselet en velours vert ouvragé de fils d’or. Elles le couvrirent du plastron brodé de fils de soie, entourèrent sa taille d’une ceinture en or sertie de pierres précieuses, puis la couvrirent d’un voile brodé avant de la couronner avec un diadème en or. Elles ornèrent ses bras de bracelets, lune et soleil en or et argent, puis lui enfilèrent la bague œil-de-chat. Elles finirent par la voiler de blanc.

Alors que la fiancée trônait, entra un groupe d’amis de Benchimol. Ils étaient habillés à l’européenne. À peine installé, un homme à l’allure distinguée dans son uniforme d’apparat sortit un carnet, une mine de plomb et quelques pinceaux qu’il trempa dans des tubes de couleurs aqueuses et délavées. Il commença à dessiner rapidement, avec une maîtrise et une précision qui étonnèrent Sol. Elle s’appro­cha de lui et se pencha par-dessus l’épaule du dessinateur pour voir ce qu’il faisait. Il tourna la tête dans sa direction. Leurs regards se croisèrent. Il lui sourit. Elle lui rendit le sourire avec des yeux brillants de candeur et d’étonne­ment. Il replongea dans ses carnets, les noircissant et les colorant.

Il croqua la maison, les musiciens, les danseuses, les paru­res, les corps, les yeux. Il esquissa les vêtements, la kassoua Ikbira et dessina la fiancée…

  • C’est Esther… s’exclama Sol!
  • .. oui… grommela le dessinateur sans s’arrêter.

Les voix des femmes croisaient celles des chanteurs, les sons du rebec, du luth, du tabla, des tambourins et des derboukas…

Abbatou, abbatou

 Elle l’a emporté

Elle ne l’a point laissé

Il l’a emportée

Il ne l’a point laissée

 

  • Mais, il est en train de dessiner la famille de Benchimol !
  • Oui, et après?
  • C’est interdit !
  • C’est ce que pensent ceux qui ne distinguent pas la réalité de l’ombre. La distinction entre les deux rapproche de la vérité.
  • C'est ton avis, mais qu’en pense le rabbin?
  • C’est lui qui l’a autorisé à dessiner. Et, de toutes les façons, je suis chez moi et c’est ma fille qu’il dessine.

Le peintre ne s’arrêtait toujours pas de dessiner, des centaines de feuilles

, des lignes droites, des courbes, des ombres, des arcs, des traits de visages, des terrasses, des têtes, des yeux, des chevaux, des fantasias assourdissantes et terrifiantes, des sarouels, des fleurs, des pieds, des bras, des cuisses ; comme s’il craignait d’oublier le moindre des détails que ses yeux observaient et que sa mémoire enre­gistrait. Il dessinait vite, écrivait, coloriait. Il créait…

Il dit dans un espagnol plus proche du français que du castillan :

  • Je préfère le visage d’Esther et son teint à ce dessin. Comme je préfère savourer ces pâtisseries au miel plutôt que de les regarder avec avidité. La peinture est comme l’appétit. Elle le remplace. C’est comme la traduction, une langue supplée à l’autre pour exprimer une idée; comme lorsque monsieur Benchimol, 1' interprète, traduit des propos de l’espagnol au marocain. La peinture, cest la traduction sur le papier, des impressions que ma tête retient de ce que j’observe autour de moi. J’ai besoin de plus de vingt bras et de plus de quarante-huit heures par jour pour traduire tout le trouble et toute l’emotion qui m’habitent depuis que je suis à Tanger. Les juives de ce pays sont une merveille. J’ai peur de ne rien faire d’autre que de les peindre. Ce sont des perles du paradis. Et moi, je suis comme quelqu’un qui rêve et qui a peur de perdre ce dont il rêve. Aucun des peintres que je connais n’est capable d’imaginer toute la beauté et tout l’émerveille­ment de ces splendides caractères.
  • Comment t’appelles-tu ?
  • Eugène Delacroix… de France.
  • Ah ! Tsarfat, le pays du grand Rashi.

Il se tut. Sol tourna la tête vers les dessins. Elle les regarda attentivement et s’émerveilla de la manière indicible avec laquelle il faisait ressortir la lumière de la noirceur de son crayon. Elle eut l’impression que l’appétit dont parlait le peintre était palpable dans ses dessins. Elle comprit ce quelle put et écouta attentivement les paroles du peintre :

  • Les fêtes chez vous expriment fidèlement les senti­ments les plus profonds, les plus authentiques et les plus anciens, ancrés dans la mémoire de l’humanité au point que la forme de la joie se confond avec le sentiment quelle illustre.

Sol se joignit au reste des invités et répliqua avec eux aux modulations des musiciens.

Abbaha, abbaha.

 

Saïd Sayagh L'autre Juive Roman

Page 72

19/06/2023

 

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