Dora CORIAT-Je me souviens-Extraits d’un manuscript-Brit 27-Redacteur Asher knafo
LE PACHA DE MARRAKECH
Ceci m’entraine a parler du Pacha El Glaoui Cette figure extraordinaire le seigneur le grand forban. Papa etait tres lie avec lui et en temps voulu, l’avait pousse a opter pour la France. Nous etions recus chez lui tres souvent et par ses femmes. II y avait 3 legitimes et 5 belles circassiennes: Malika, Gamra, Schench, et je ne sais plus le nom des autres, fort belles toutes. Elles avaient ete volees sur les bords du Bosphore lorsqu’elles etaient tres jeunes lors d’une de leurs nombreuses promenades en barque. Volees, vendues a des marchands d’esclaves.
LES RECEPTIONS
Fin 1913 et debut 1914, des annees ou tout le monde s’amusait follement comme avant chaque guerre. Maman et Papa recevaient enormement. Les 4 soeurs de Maman etaient a Marrakech a l’epoque et se mettaient en frais: piano, violon, danse espagnole et chants. Mes tantes etaient tres belles et chacune eut bientot son cavalier attitre, belles oui mais incultes comme elles l'etaient, que de gaffes et de faux pas ont du etre commis! Mais ces jeunes officiers, seuls, sans famille, en pleine Medina, etaient fort aises de trouver un accueil chaleureux, bonne table, distractions et malgre le manque d’instruction, beaucoup d’intelligence, de bon sens et de bonte. En plus a cette epoque on ne demandait pas aux femmes.d’etre instruites. Rachel, flirtait avec un lieutenant dont j’ai oublie le nom. Toutes les photos de ces beaux officiers ont maintenant disparu. Donna qui avait eu avant un grand amour contrarie par son pere avait adopte Arturo Olivieri, jeune italien tres sympathique (Arthur mon frere porte son nom). II est reste longtemps ami de la famille jusqu’au jour ou il a fait une embrouille commerciale a Papa. Depuis ce jour, ils ne se sont plus ni salues ni frequentes. Fortuna avait comme soupirant le lieutenant Dubois, fin, race, grand cultive (le plus beau des 4) qui declamait des vers d’Alfred de Musset aux receptions de maman.
Pour Licita enfin ceci etait bien plus serieux. Le lieutenant Giacommoni qui etait fou d'elle voulait l’epouser. J’ai lu ses lettres avant leur destruction. Papa etait :contre mais facile a convaincre. Grand pere, inebranlable, jurant de se suicider, raisait toute espece de chantage, etc.. Le lieutenant Giacommoni a vu Papa puis est alle voir Grand pere a Tanger. Licita n’a pas eu le courage d’attendre sa majorite et de partir. Elle a obei a son pere. Licita est tombee amoureuse des centaines de fois et souvent a la veille du mariage quelque evenement inattendu intervenait et tombait a l’eau.
LES CORCOS (la deuxieme branche S.C.)
Passons un peu aux Corcos: Antie Messoda, soeur de Papa etait tres grande et tres majestueuse, Uncle etait petit comme moi, elle le depassait d’au moins toute la tete. Elle a epouse son cousin germain (je crois que grand-mere etait la sceur du pere d’uncle Leon). Plusieurs enfants sont nes de ce mariage: l’ainee est morte a trois ou quatre ans puis Julia, Ernest, Philippe, Albert, Rachel et enfin Lucien. Les garcons eleves tres severement par leur pere, en partie a l’anglaise etaient fouettes pour un oui pour un non, il poussait le sadisme jusqu’a leur faire apporter le fouet et je n’oublierai jamais la voix tonitruante d’Uncle disant « Lucien bring me the whip! » et Lucien s’executant Loreille basse. Uncle Leon, eleve en Angleterre de cette fagon continuait la tradition ; petit sec, a grande moustache il avait assez d’allure. Mais comme tout petit homme il compensait sa taille par de l'autorite. Intelligent, tres instruit il avait une merveilleuse collection de livres. Il etait agent des LLoyds, correspondant du Times de Londres et aussi commercant. Il puisait presque toutes ses informations politiques au pres de Papa qui a eut pas mal d’influence sur les marocains lors de l'instauration du Protectorat. Il etait exagere en tout: un jour il recoit une lettre dont le timbre n’etait pas oblitere, il ecrit une longue missive au Receveur des Postes lui rendant le timbre, soulignant qu’il ne veut pas profiter du Gouvernement etc… Il etait tres puritain. Un jour Ena bavardait innocemment avec Haim Attias: Uncle lui envoie quelqu’un avec un message dans ce genre « Monsieur Corcos vous prie de ne pas flirter sous les fenetres de son bureau, vous n’avez qu’a aller ailleurs ». Pour en revenir au fameux fouet Uncle a corrige Philippe jusqu’au jour ou a dix sept ans, celui-ci a eu le courage de dire a son pere « si tu oses encore me frapper je te le rendrai ; avec une telle determination dans ses yeux que Uncle a compris que c’etait fini pour Phillippe. Untie Messoda etait tres grande, belle femme et imposante mais comme maitresse de maison pas trop maniaque. Les apparences etaient sauves mais il ne fallait pas trop fouiner!
Les enfants etaient abandonnee aux domestiques, le jour ou il manquaient une culotte ou une chemise, les bonnes venaient vers Antie qui repondaient: »Allez chez Dahan ou Elmaleh, achetez ce qu’il faut (magasins que nous connaissions bien ou les Corcos avaient des comptes ouverts) Aussi, bien souvent lorsque les cousins venaient a Marrakech, Maman par affection et par pitie, et aussi pour ne pas perdre la face vis-a-vis de ses amis devaient les vetir de pieds en cape.
LES ENFANTS
Ernest avait faitt quelques etudes a Oxford ou Cambridge, Il en etait revenu comme il se doit capitaine d’equipe de Rugby mais sans grandes prouesses scolaires. Dans sa chambre quelques trophees et photos attestaient de sa vie en Angleterre. Il a beaucoup travaille avec son pere et toujours agent des LLoyds a Agadir a epouse Maisie Toby ; ils ont eu un fils, Lilou roux comme notre grand-mere et comme sa mere (qui est de notre famille). Il a fait H.E.C. et a un bon poste, ici.
Julia etait la preferee d’Uncle Leon. C’etait l’ainee et en plus elle portait le nom de sa grand-mere, seule moi trouvais grace devant ses yeux. Elle est decedee en Israel en 1971.
Rachel, extra sensible, tres intelligente, cultivee, comme Lucien et Philippe pleine d’humour. Elle est a Tel Aviv
Albert qui deja tout petit se sentait tres mal a l’aise dans sa famille s’en est separe des qu’il a pu le faire. Il est alle a Agadir avant les autres gerer les biens de la famille. Lorsque celle-ci s’est installee a Agadir il a file sur Mogador, de la a Paris oil il a epouse Camille Deyrolles soeur du peintre Jean Deyrolles et niece de l’Amiral. Camille a fait d’Albert un homme cultive plein de qualites. Il est fonctionnaire international et ils ont fait presque le tour du monde grace a ce poste. Grand seigneur comme Ernest et les Coriat il mene grand train. Il a le titre de ministre. Ils ont deux filles.
Philippe, marie par l’entremise du journal Candide, il a epouse une alsacienne d’excellente famille mais dont le pere et la belle- mere voulaient se debarrasser.
Dora CORIAT-Je me souviens-Extraits d’un manuscript-Brit 27-Redacteur Asher knafo
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