Jacob Raphaël Benazeraf -1988-1896- Une vie au service du Judaïsme marocain. David Cohen

David Cohen

Jacob Raphaël Benazeraf –1988-1896

Une vie au service du Judaïsme marocain.

Cette biographie, abrégée, de J.R. Benazeraf a une histoire et je me dois, au préalable, de la raconter ici. Au cours de mes recherches sur la communauté juive de Casablanca, recherches, momentanément, interrompues pour me consacrer au judaïsme algérien, j’ai été amené à dépouiller, entre 1985 et 1988, les archives privées de J.R. Benazeraf déposées à l’institut Ben Zvi à Jérusalem. Je les ai trouvées très intéressantes et importantes pour mes recherches. J’en suis ainsi venu à entrer en contact, par correspondance, avec cette ancienne notabilité juive casablancaise alors retirée à Paris. J’ai, de ce fait, rencontré Mr Benazeraf en 1987, à Paris, et il a exprimé alors le souhait que je rédige, en m'appuyant, sur ses archives une petite note sur lui. Une première mouture de cette biographie fut rédigée en juillet 1988 et, en remerciement, Mr Benazeraf m’envoya, en août 1988, son livre Refranero dont il sera question plus bas. Puis, profondément engagé dans mes recherches sur les Juifs d’Algérie, j’ai mis, provisoirement, de côté, mes investigations sur les juifs de Casablanca. En avril 2010, Mme Tamar Fuks, de l’institut Ben Zvi, à Jérusalem, me signala que le professeur Joseph Chetrit, de l’université Haïfa, lui avait fait remarquer que j’avais longuement compulsé les archives de Mr Benazeraf. Il se rendit compte, en outre, que de nombreux chercheurs ou étudiants, consultaient les archives de cette personnalité juive marocaine, sans avoir aucune idée sur sa personne, sa vie, son passé. Elle me demanda si je pouvais rédiger une note biographique sur J.R. Benazeraf afin qu’elle soit jointe à ses archives déposées à la bibliothèque de l’institut Ben Zvi. C’est ce que j’ai fait, modestement, car l’homme mérite davantage, dans les lignes qui suivent. 

L’Homme et son œuvre.

Jacob Raphaël Benazeraf est né à Casablanca, le 22 avril 1896, dans une Famille de commerçants juifs originaires de Tétouan, dans la zone espagnole du nord du Maroc, ville à laquelle il restera attaché toute sa vie. Il écrit en exergue tout au début de son livre Refranero dont il sera question plus bas : En homenaje a mis padres, Samuel Benazeraf y Ettedgui, y Esther Benazeraf, Attias Nahon, ambos nacidos en Tetuân y fallecidos en Casablanca, quienes al darme la vida también me dieron la razon de vivirla en el amor de Tetuân y del Sefardismo.

Ea famille Benazeraf, avec à sa tête, Samuel, appartenait au premier noyau de familles qui constitua, lors de son installation dans la ville en 1878, la communauté juive naissante de Casablanca.

Le jeune Jacob fut très malade étant bébé, on procéda alors à la cérémonie de Pidion hachem rachat du nom, selon laquelle si l’enfant guérissait on lui irtribuait un second prénom. Jacob recouvrit la santé et conformément à l’usage, on lui donna un deuxième prénom, Raphaël, dont la signification hébraïque est « guéri par D., ».

 

Depuis sa plus tendre enfance Jacob parla espagnol à la maison. Langue qu’il pratiqua tout au long de sa vie et fut vraisemblablement sa langue de prédilection. En dehors du foyer familial il apprit deux langues : le judéo- arabe dans ses jeux d’enfants avec ses jeunes camarades juifs et musulmans et le français à l’école de l’AIU (Alliance Israélite Universelle). Le français était une langue qu’il maîtrisait bien et dans laquelle il rédigea la plupart de ses articles et discours.

Jacob Raphaël fut un bon élève, à l’école de garçons de l’Alliance à Casablanca et en 1909 il décrocha brillamment le CEP (certificat d’études primaires). Ce fut tout dans le domaine des études, c’est bien dommage, car il possédait les qualités requises pour des études supérieures. En compulsant ses archives, nous comprenons, implicitement, qu’il regretta toujours de n’avoir pu aller plus loin dans le domaine du savoir académique.

Benazeraf entra très tôt dans les affaires, il fallait prendre le relais de son père dans l’entreprise familiale et apprendre les rouages du négoce. Notions qu’il devait perfectionner sans cesse puisque vers 1950, la Maison Benazeraf, spécialisée dans le commerce du thé vert importé de Chine, était une des firmes les plus solides et réputées sur la place de Casablanca.

Jacob Raphaël Benazeraf, âme sensible et esprit curieux, montra très tôt un intérêt pour tout ce qui concernait le monde juif. Dès 1913 il demanda à s’abonner au mensuel juif français qui paraissait à Paris, Les Archives Israélites. En pleine Première Guerre mondiale, entre 1914 et 1917, il fit parvenir par l’intermédiaire du second mensuel juif français, à tendance religieuse, L’Univers Israélite, un don en espèces en faveur des juifs de Russie et demanda, pour ses jeunes frères, d’avoir un filleul parmi les soldats juifs russes qui combattaient sur le front.

Jeune homme, il était épris de sport. Il fut, en 1917, un des fondateurs de l’USM (Union Sportive Marocaine), section football et en 1922, il fut désigné pour faire partie de la commission des sports, du Cercle de l’Union, le club de divertissement de l’élite juive casablancaise. Enfin, en 1932, il conduisit, en Palestine du mandat britannique, la délégation de jeunes juifs marocains qui prit part à la lere Maccabiade, les jeux olympiques juifs.

La véritable entrée de J.R. Benazeraf dans la vie de la société juive casablancaise se produisit en 1919, lorsqu’il mit le local de sa synagogue appelée Maghen-David à la disposition du Groupement Sioniste Maghen- David, à la tête de laquelle se trouvait Elkrief et Simon Kagan. Cette synagogue, appelée synagogue Abitbol, était située dans le Mellah et une des personnalités qui la soutenait fermement n’était autre que Samuel Daniel Levy qui avait toujours soutenu le sionisme, et fut, en 1917, nous supposons, le véritable fondateur de Maghen-David.

Cette association sioniste désirait être reconnue par les autorités du Protectorat. Elle déposa ses statuts le 20 février 1919, et, s’appuyant sur la loi sur les associations, dahir du 19 juin 1914, qui établissait que, si dans un délai de trois mois depuis la date de déposition de la demande d’autorisation, aucune réaction des services du protectorat ne s’était manifestée, elle serait, à la date du 20 mai 1919, considérée comme légale. Mais le 1er juillet 1919, «le chef adjoint faisant fonction de Chef des Services Municipaux de la ville de Casablanca », adressait une lettre à Mr Salomon Roffé, négociant route de Médiouna, dans laquelle il lui faisait savoir que « la création de votre Groupement ne pourrait être favorablement accueillie par la grande majorité de la population Israélite marocaine, habituée de tous temps à se confier à l’autorité du Maghzen ».

Cette réponse mériterait de longs développements, mais le cadre de cet article ne s’y prête pas. La réaction de l’association Maghen-David fut subtile. Elle changea son appellation et devint « Maghen-David société pour la diffusion de la langue et la littérature hébraïques ». Cette fois-ci elle ne rencontra aucune opposition de la part des Services Municipaux de Casablanca et fonctionna normalement dans les années 1920. Elle joua un rôle important dans l’étude de l’hébreu moderne à Casablanca et dans d'autres villes du Maroc.

Jacob Raphaël Benazeraf -1988-1896- Une vie au service du Judaïsme marocain. David Cohen

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