Structures et organisation de fa communauté juive de Mogador Fondation de Mogador-Salomon Hai Knafo

Structures et organisation de fa communauté juive de Mogador

Fondation de Mogador :

Ce texte a été écrit en 1963.

J’ai dit que la construction de la ville datait d’environ deux cents ans. Ceci est vrai pour la nouvelle Mogador, car d'après les recherches effectuées aux environs de la ville et dans l'île de Mogador qui se trouve à vingt minutes en barque du port, il s’avère que la ville existait ou a existé déjà il y a deux mille ans.

Mais l’histoire qui nous intéresse pour le moment se rapporte à la nouvelle Mogador.

Le Sultan, Sidi Mohamed Ben Abdallah, ayant fermé le port d’Agadir au commerce extérieur, voulut créer un autre port pour servir de centre commercial avec l’étranger. Certains disent pour servir de refuge à ses bateaux pirates. Pour peupler la nouvelle ville, il pensa aux Juifs, entreprenants et ambitieux. Il fit appel à diverses familles de Marrakech et d'autres villes marocaines. Ainsi on retrouve parmi les familles qu'il fit venir les Corcos, Elmaleh, Afriat, Aflalo, Cabessa, Levy, Acoca, Zagury, Pinto et d'autres. Ces familles furent investies d’un pouvoir presque illimité. Il mit à leur disposition terrains, finances et pouvoir, avec pour mission de commercer avec l’étranger, et de prendre part à la direction de la ville.

Ainsi, le commandant du port était juif. Les droits de porte, les impôts directs étaient perçus par les Juifs. Donc ces Juifs, étant installés dans la première enceinte de la ville appelée Essaouira, attirèrent d’autres Juifs qui s'installèrent comme je l’ai dit plus haut, à côté de cette enceinte, d’autres se sont ajoutés après puis les Arabes aussi.

Les Arabes étaient tous des fonctionnaires ou des soldats au service du Sultan. Ce n’est que bien plus tard que la ville s'est peuplée de Musulmans qui n'étaient pas forcément au service du Sultan.

C’est donc cette élite juive qui avait formé le Comité de la communauté juive.

Au commencement, cela marchait tout seul, le besoin d’un comité ne se faisait pas sentir, comme dans l’histoire juive à la période de Joseph avec Pharaon.

Ce n’est qu’à la mort du Sultan, avec l’extension de la population juive, que le besoin de s’organiser commença à se faire sentir. Tout de suite, deux clans se formèrent. Les habitants de la Casba d’un côté, et ceux du Mellah d’un autre.

Le pouvoir est resté longtemps aux mains des Casbaouis, les habitants de la Casba. Comme ils finançaient la caisse communautaire, ce sont eux qui dirigeaient la population juive. Leur premier acte important fut l'institution d'une caisse de bienfaisance.

Ils se cotisèrent et chacun fit don d’une somme importante. Avec le capital recueilli, ils achetèrent des bâtiments dont la population pauvre pouvait avoir besoin : le cimetière, la synagogue, les maisons d’hôtes, les établissements scolaires. Ils avaient formé une société commerciale dont le bénéfice était versé à la Yechiva où les nécessiteux séjournaient pour l'étude du Talmud.

Quand les besoins de la communauté grandirent, ils établirent une taxe sur l’importation, sur le sucre, le thé et les produits de luxe ainsi que sur la viande. Toutes ces taxes alimentaient la caisse.

L’instauration de cette caisse n’empêcha pas les riches de continuer à donner individuellement. Car malgré le rapport des taxes diverses, la caisse ne pouvait pas faire face à tous les besoins de la population. L’argent de cette caisse, suffisait pour la distribution toutes les semaines et tous les mois aux pauvres et aux étudiants de la Thora. Bientôt les diverses institutions demandèrent de l’aide et même, des sommes importantes. Mais les fonds ne suffisaient pas aux besoins de ces institutions, comme par exemple, la Hevra Kadicha, qui s’occupait des morts et qu’on appelait Hevrat Hessed Veemet, – Société de bienfaisance et de vérité. Cette Hevra s’occupait aussi des malades et des agonisants.

Il en était de même pour les écoles de l’Alliance qui, au début couvraient la totalité des dépenses grâce à l'argent venant des fonds de l'A.I.U (l’Alliance Israélite Universelle) mais quand l'école grandit, elle se trouva devant de tels besoins qu'elle finit par obtenir le versement d'une participation prise sur les collectes faites pour les Rabbins de Jérusalem, envoyés à Mogador pour ramasser de l'argent afin de le redistribuer aux résidents de la Terre Sainte.

Cette collecte tenait une place importante dans la vie mogadorienne. Elle pouvait durer plusieurs jours ou plusieurs semaines, parfois plusieurs mois. Le Rabbin dit Rav del Colel, restait chez une famille aisée, mangeait, dormait, était soigné et dorloté. Parfois, parce qu'il comprenait qu'il n’était pas une charge légère, il changeait de famille. Quand c’était le même qui revenait après une période relativement longue, il s'adressait à la même famille en disant du maître de céans : Baal habaït cheli – C’est mon hôte. L’arrivée d'un ou de plusieurs Rabbins à la fois, souvent il en arrivait tellement que l’on ne savait plus à qui imposer ces dépenses, donnait un air de fête à la ville. Car pour obtenir plus d’argent, ces Rabbins choisis par ceux qui les envoyaient, déployaient une verve étourdissante, se faisaient inviter par les synagogues pour y faire des discours avec force Pilpulim. Plus ils étaient érudits, plus les dons étaient importants Les plus admirés étaient reçus à des dîners dans les grandes familles qui considéraient que c’était un honneur d’avoir hébergé tel ou tel Rabbin.

Si la famille n’était pas tellement riche, elle déployait tout de même un effort pour élever le niveau de vie quotidien.

Il n’était pas rare qu’un de ces Rabbins prenne femme chez nous et s’installe définitivement dans la ville.

A part ces Rabbins officiels si l’on peut dire, il en venait d’autres pour leur compte personnel : ils venaient d'Israël, de Pologne, d’Allemagne, de Russie, de pays arabes ou balkaniques ou même d'autres villes du Maroc. Ces Rabbins devaient déployer encore plus d'érudition au cours de leurs joutes oratoires pour convaincre les habitants de leur mérite.

Tous ces Rabbins, grâce à leurs sermons, leurs enseignements et leurs discours, maintenaient un niveau moral assez élevé au sein de notre ville. De plus, ces voyageurs apportaient des nouvelles fraîches de ce qui se passait au-delà de Mogador et cela était important car les moyens de communication n’existaient pas encore et la télégraphie n’est apparue qu’avec l'avènement du protectorat français au Maroc.

A ce propos, à Marrakech, un peu avant le protectorat, le Dr Marchand avait été assassiné parce qu’il avait un poteau télégraphique sur sa terrasse.

Le Pilpoul est une des maîtrises de l'étude du Talmud qui consiste à discuter un problème jusque dans ses détails les plus infimes.

Après quelques générations, la direction de la communauté n’était plus le monopole des descendants des protégés du Sultan.

D'autres familles s'étaient substituées à ces anciennes familles et avaient pris des fonctions au sein de la communauté en formant un comité. Les membres de ce comité assistés du Grand Rabbin, procédaient à la distribution de dons à la population. Ces distributions se faisaient presque exclusivement au profit des familles issues du Mellah.

Quoique la population du Mellah se soit développée, la direction des affaires est restée très longtemps entre les mains des gens de la Casba. Il semble que la tendance à cette séparation dont je parlais au début devait aller en s'accentuant. Les différences entre les personnes âgées n'étaient pas trop grandes, les gens de la Casba pouvaient rencontrer ceux du Mellah à la synagogue ou dans le commerce et la vie courante. Les choses changèrent quand les Casbaouiins qui avaient peu d'enfants, les envoyèrent faire des études en Europe où ils subirent l’empreinte du modernisme.

Les filles allaient dans les écoles anglaises créées par des dames venant d’Europe. Ainsi les mœurs changèrent et le snobisme s'est introduit et développé et atteignit des sommets…

Alors se forma une société presque fermée aux gens du Mellah. Les langues, l’éducation, les amusements, tout devenait européen. La musique et la danse se sont implantées dans les "bonnes familles". Des clubs se sont créés et il était bon d’y adhérer et de se frotter aux Européens. Il y eut même quelques mariages mixtes, mais très peu, quoique les liens entre Européens et Juifs aillent en augmentant.

Les gens du Mellah, eux, semblent avoir subi l’influence des nouveaux habitants venant des villes du sud marocain où les choses allaient de mal en pis pour eux.

L’influence du Sultan ne s'étendait pas jusque là, et les gouverneurs ou Caïds se conduisaient avec les Juifs comme bon leur semblait.

Il y avait aussi des régions qui n’avaient pas de Caïd détenant son pouvoir de la grâce du Sultan. Elles se gouvernaient elles-mêmes, comme des petites républiques. Elles ne reconnaissaient le pouvoir du Sultan que dans leur prière. En effet, il y a une prière ou tout Musulman doit citer le Sultan. Mais à part cela, elles ne lui obéissaient pas.

Les Juifs étaient donc protégés par ceux qui les abritaient et dans le territoire contrôlé par eux. S'ils passaient d’un endroit à l’autre, ils étaient toujours en danger, car il suffisait que deux tribus soient en désaccord pour que l’une attaque les Juifs de l’autre.

Structures et organisation de fa communauté juive de Mogador

Fondation de Mogador :page 55

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