Un siècle de floraison culturelle-Joseph Toledano

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UN CENTRE D'ECHANGES

Un autre detail dans la vie de rabbi David Hassine – qui trouve un echo dans son oeuvre – en plus de ses frequents deplacements dans les autres villes du Maroc, nous revele une des causes de la poursuite de cette floraison intellectuelle malgre la deterioration des conditions politiques et economiques – l'ouverture aux echanges et on sait qu'il n'y a pas de floraison culturelle sans ouverture sur le monde exterieur. Dans un de ses poemes; il se lamente sur la disparition du plus illustre des emissaires de Terre Sainte, devenu le saint le plus venere dans toute l'Afrique du Nord, rabbi Amram Bendiwan.

Arrive a Meknes en 1773, l’emissaire avait ete recu avec tous les egards et la veneration reserves depuis toujours aux emissaires de la Terre Sainte. Le premier shabbat de son sejour, il prononca a la synagogue de rabbi Raphael Berdugo un sermon vibrant en faveur de la alya en Eretz Israel dont les echos enthousiasmerent toute la communaute. Aussitot, s'etait organise un mouvement de depart si massif que le pacha, en craignant les repercussions sur la vie economique de la ville, mit solennellement en garde le Naguid Shelomo Maimran contre un tel projet. Alors que la tension commencait a monter, l'assassinat d'un haut personnage mit le feu aux poudres dans toute la region rendant les routes impraticables. Non seulement aucun depart de pelerins n'etait plus possible; mais l’emissaire lui -meme se trouva dans l'impossibilite de poursuivre sa mission et resta bloque a Meknes pendant presque huit ans, jusqu'en 1781. Pendant les annees de ce sejour force, le domicile de son hote, rabbi Mordekhay Messas, devint un centre d'etudes pour tous les rabbins et talmide hakhamim de la ville comme le fils de son hote, rabbi Zichri Messas; rabbi Mordekhay Seban, qui fut plus tard on le sait rabbin a Livourne et en Syrie, rabbi Yaacob Berdugo et rabbi David Hassine. Participant a la vie communautaire, il fut appele a contresigner des decisions des dayanim de la ville. En 1781, avec le retour de la securite, rabbi Amram reprit sa mission en compagnie de son fils rabbi Haim, visitant Fes et Sefrou. Sur le chemin du retour vers la frontiere algerienne, il mourut pres de Ouezane et son tombeau a Asjen est devenu par la suite le plus haut site de pelerinage de tout le Maroc. Dans son elegie, rabbi David Hassine laisse percer l'influence qu'il a eue sur ses contemporains :

 

Chaque generation a ses predicateurs et ses notables.

Tous se pressaient a ses homelies

Et prisaient ses commentaires; attrayants, plaisants

Son jugement etait pur et limpide,

Ses arguments decisifs. Ses paroles etaient ecoutees

 Car elles etaient appropriees, toujours pertinentes.

Amram a été distingué, pur comme la laine la plus blanche;

Tel un astre éclatant; sa lumière poin que celui de l'argent et de l'or

 Son commerce était plus précieux.

 

Autre apport de grande valeur enrichissant la tradition rationaliste des des­cendants des expulsés d'Espagne par le mysticisme des tochabim. Vers 1790( Meknès accueillit celui qui devait devenir son saint patron : rabbi Daoud Boussidan. La seule prononciation de David en Daoud est révélatrice d l'origine de la famille en pays berbère dans les confins sahariens. Fuyant son village de Tioumline en raison de persécutions; il était arrivé à la tête de s communauté de 150 personnes. Le grand rabbin de la ville, rabbi Raphela Berdugo lui céda un terrain sur laquelle il construisit sa yéchïba. Déjà célèbre de son vivant pour ses miracles, son tombeau est devenu après sa mort le site de pèlerinage par excellence des Juifs de Meknès.

Plus proches et plus intensies,  les échanges avec les rabbins des autres grands centres de la Torah au Maroc et plus particulièrement Fès et Salé.Les deux plus illustres rabbins marocains de l'époque, rabbi Yaacob Abensour de Fès et rabbi Haïm Ben Attar de Salé, entretenaient de très étroites relations aveci les lettrés de Meknès où ils ont passe de nombreuses années de leur vie.

Le père de rabbi Yaacob, rabbi Reouben Abensour (1638 -1713), avait quitte Meknès pour Fès en 1673, l'année meme de la naissance de son fils. Après ses études talmudiques, Yaacob avait opte pour le métier de greffier bien son grand ami rabbi Habib Tolédano lui ait conseillé de se tourner plutôt vers l'enseignement qui " ouvre plus de perspectives comme l'a prouvé la carrière de votre propre père. " Mais son immense érudition lui fit gravir tous les échelons et ouvrir les portes du tribunal de Fès comme juge à partir de 1704, puis comme son président.

En 1728, suite à une querelle avec la communauté de Fès, il s'installa à Meknes où il siégea plus de dix ans au tribunal aux côtés de rabbi Moshé Berdugo et de rabbi Moshé Dahan; avant de se réfugier à Tétouan lors de la grande famine de 1738. Ses deux chefs d'œuvre Et lekol hefetz, recueil de poemes et Michpat outsédaka béyaacob n'ont été imprimés qu'à la fin du XIXème siecle par l'association de Fès Dobébé shifté yéshénim pour l'édition des chefs d'oeuvre du passe, à laquelle nombre de notables de Meknès apportèrent leur soutien.

Rabbi Haïm Benattar (1696 1743) le plus universellement connu des rabbins marocains. Auteur du célèbre livre Or Hahaïm, commentaire mystique de la Bible. Né à Salé, il était venu à Meknès à l'âge de 18 ans pour épouser la fille de son oncle Moshé Ben Attar qui fut un moment Naguid de la communauté de Meknès. Après la mort de son beau -père, il revint à Meknès régler son héritage. Au cours de ses longs séjours dans la capitale, il se lia de grande amitié avec ses rabbins et plus particulièrement avec rabbi Yéhouda Berdugo. Dans la préface à son ouvrage Mayim Amoukim, ce dernier raconte qu'il avait convenu avec son ami intime rabbi Haïm Benattar qu'il fera imprimer mon livre en appendice à son ouvrage Or Hahaïm. Mais comme nous l'avons déjà vu rabbi Haïm, contraint de quitter précipitamment le Maroc, n'avait pu prendre avec lui à Livourne le manuscrit de son ami.

Les acquis de cette période de floraison cultu­relle devaient permettre à la communauté totalement dévastée sur le plan matériel par cataclysme sans précédent des per­sécutions de Moulay Yazid, de conti­nuer dans les siècles suivants de maintenir à plus petit feu son rang d'éminent centre de Torah malgré tous les aléas politiques, sans ja­mais retrouver, sur le plan maté­riel et politique, la gloire du règne de Moulay Ismaël.

 

Un siècle de floraison culturelle-Joseph Toledano

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