Le rocher d'origine-Haim Shiran (Shkerane)&Fabienne Bergman

Le rocher d'origine

Haim Shiran (Shkerane)&Fabienne Bergman

La Companie Litteraire

2013

Le Rocher d’origine, c’est l’histoire, racontée à la première personne, d’un garçon pauvre issu de l’ancien mellah de Meknès.

« Ce sont les rêves qui m’ont porté, qui m’ont poussé, qui m’ont orienté. »

Par delà le récit de son enfance, c’est aussi Meknès avec ses deux mellahs et ses trois communautés – la juive, l’arabe et la française – qui nous est racontée avec une tendresse parfois mordante et non exempte d’amertume. Le héros y connaît la pauvreté, l’amitié, l’amour, mais aussi l’Autre, l’arabe, tant de choses qui marqueront sa vie, fertile en expériences. Toujours attaché à sa ville natale, il saura saisir les clins d’œil du destin et débarquera à Paris où son acharnement et ses dons pour le théâtre lui permettront d’entamer une carrière artistique qu’il développera avec succès en Israël.

« En face du vrai bonheur, les richesses valent l’ombre d’une fumée. » Sophocle, Antigone

Le Rocher d’origine est un chant de liberté envoûtant empreint d’une grande sagesse. C’est un parcours initiatique haut en couleur, une envolée dans le monde du théâtre et une incursion surprenante dans le coeur d’un homme : Haim Shiran.

J’ai commencé ce récit en parlant de la nécessité qui s’est imposée à moi de  porter sur mon passé un regard plus objectif, plus vrai et plus personnel que je ne  l’avais fait dans mes films. »

Haïm Shiran a dirigé le théâtre Inbal à Tel Aviv après avoir été metteur en scène pendant plus de 30 ans à la télévision éducative israélienne.

Ce livre est le fruit d’une collaboration entre Haïm Shiran, dont l’histoire est contée ici, et Fabienne Bergmann, traductrice, comédienne, historienne et écrivain.

Il est tellement facile d'ecrire ses souvenirs quand on a une mauvaise memoire.

Arthur Schnitzler

Preface d'Albert Memi

Merci, cher Haïm Shiran, de m ,avoir confié le manus­crit de votre livre. Je l’ai lu non seulement avec plaisir, mais pour mon édification : Ainsi il a existé une condition commune a tous les juifs du Maghreb.

Il n’y a pratiquement plus de juifs en Afrique du nord ; il en demeure plus que la mémoire : vous avez apporté une pierre à cette mémoire.

Vous avez fait mieux : votre héros (vous-même) a gagné la France où il s’est construit une seconde vie. Peut-être que l'exil n’est pas exclusivement négatif. Vous êtes devenu un cinéaste. Le seriez-vous devenu si vous étiez resté à Meknez ?

Puis vous avez gagné Israël, dernière étape de votre itiné­raire, où vous avez entrepris une troisième dimension.

Votre livre sera certainement consulté par ceux qui vou­dront se souvenir de ce que nous fûmes, ce que nous ne sommes plus, ce que nous sommes tout de même encore.

Je vous souhaite tout le succès que mérite votre courageuse entreprise.

Soyez-en remerciés

Akbert Memmi Paris, Août 2013

Le Comédien

LE NOUVEAU MELLAH de Meknès avait déjà abrité un théâtre juif et ce, dès les années vingt. J’ai d’ailleurs moi- même inséré dans un film de retour aux sources, des photos de la pièce Joseph et ses frères, créée par les anciens de l’Alliance Israélite. Ce théâtre amateur, comme la plupart des troupes de théâtre juif qui fonctionnaient alors au Maroc, s’inspirait presque exclusivement de thèmes bibliques.

Melpothalie, le nouveau théâtre créé par Maurice Ben- hamou vers 1951, se voulait, lui, délibérément français. Il monta des pièces classiques comme Ruy Blas, Andromaque, Le malade imaginaire ou Les fourberies de Scapin ainsi que des comédies modernes de Labiche, Feydeau et Courteline. Cette orientation reflétait l’esprit de ses mécènes, tous des anciens élèves de l’Alliance Israélite Universelle, qui dési­raient par-dessus tout s’assimiler à la culture française.

Évoquant aujourd’hui la Meknès de mon adolescence, je me flatte toujours de cette extraordinaire richesse culturelle et cultuelle qui y régnait et imprégnait l’ensemble de la com­munauté juive qui vivait alors, selon moi, son véritable âge d’or. Sans doute ai-je puisé dans ce foisonnement d’expé­riences la fierté de mes origines et ce patriotisme de clocher qui ne m’ont jamais quitté.

Meknès avait été la capitale administrative du Maroc sous le règne de Moulay Ismail. Ce sultan alaouite construi­sit ses édifices, ses jardins, ses portes monumentales, ses rem­parts, ses gigantesques murailles sur plus de 40 kilomètres et ses nombreuses mosquées qui lui valent son appellation de “ville aux cent minarets”. C’était certainement aussi la ville aux cent synagogues et on disait que c’est à Meknès que se trouvaient les rabbins les plus savants du Maroc. En effet, les mellahs – tant l’ancien que le nouveau – étaient de hauts lieux d’études talmudiques et les yechivot  y abondaient. On y côtoyait tous les jours d’éminents chefs spirituels, comme cet ancien élève de mon grand-père, rabbi Yehochoua Berdugo, qui plus tard présidera le tribunal rabbinique de Casablanca. Les commerçants étaient régulièrement harangués par les deux rabbins Baroukh Tolédano – le Petit et le Grand, comme on les appelait – qui les sommaient d’avancer l’heure de clôture de leurs échoppes le vendredi après-midi. Mon père, toujours le dernier à fermer boutique, était particulière­ment fustigé. Je voyais souvent rabbi Yossef Messas, d’autant que j’ai travaillé un temps comme tailleur chez son fils, Elie. Le rabbin Shalom Messas, ancien directeur du Talmud Tora, qui lui aussi présidera la Haute cour rabbinique de Casablanca, était un cousin de ma grand-mère. Son fils, David Messas, était avec moi aux scouts. Rabbi Aharon Hassine, qui professait à Meknès, puis à Mogador, avait écrit une élégie à la mort de mon grand-père.

Voici la traduction de l’hébreu qu’en a faite le Professeur Yossef Chetrit : "Ce poème élégiaque, je l’ai écrit en premier lors du premier anniversaire de la mort du sage parfait et érudit, qui a enseigné la Torah à un grand nombre de disciples, qui a montré la voie aux repentants, qui était un homme pieux, saint et vertueux, notre honorable maître et rabbin HAIM MORIGON, que sa mémoire soit bénie, qui est décédé après avoir souffert d’une grave maladie le mercredi 22 du mois de Heshvan 5684 [soit le 1er novembre 1923].

L’air de l’élégie est celui du poème: “Lorsque se sont émues mes entrailles…”. Acrostiche: ’ANI ’AHARON BEN HASIN.

Ce maître merveilleux était un descendant de rabbi David Hassine, grand poète du dix-huitième siècle sur lequel j'ai eu plus tard le privilège de réaliser une dramatique, inspiree deson livre Hommage à David. Longtemps, Meknès s'avère avoir été une véritable pépinière de dirigeants religieux pour Israël et le monde juif en général.

Par ailleurs, à quelques kilomètres de distance du niel­lah et cependant si loin, la ville nouvelle regorgeait de vita­lité culturelle. Ce que nous appelions “la ville nouvelle” etait le quartier européen de Meknès où vivaient plus de cinquante mille ressortissants français. Les musulmans en riaient pratiquement absents et seuls quelques rares Juifs y habitaient. Ceux-ci étaient, pour la plupart, des riches commerçants, des avocats ou des fonctionnaires qui n’en étaient pas moins actifs au mellah et certains, comme les berdugo ou les Mrejen, présidaient même à la bonne marche de la communauté. La plupart des Juifs n’avaient en général que peu de contact avec les Européens, en rai­son de la distance considérable qui séparait le quartier juif du reste de la ville.

La France avait établi à Meknès une base d’aviation, à l’ouest de la cité. Celle-ci était la deuxième en importance, outremer. Son école de pilotage avait d’ailleurs eu ses heures de gloire. Les pilotes et l’ensemble du personnel n’entendaient pas renoncer aux agréments de la vie en métropole. Les femmes s’habillaient à la dernière mode parisienne et le niveau de vie de ces gens, qui voulaient recréer sur place “un petit Paris”, était élevé. Naturelle­ment, la vie culturelle se devait d’être très riche et le gou­vernement français, par le biais de ses institutions, finançait sans lésiner. L’Alliance Française avait créé des cercles d’études, des chorales et un excellent ciné-club à qui je dois une grande partie de ma culture cinématographique. On y projetait des films italiens, français et américains. Souvent, le film était suivi d’un débat auquel j’aimais participer.

Le rocher d'origine

Haimm Shiran (Shkerane)&Fabienne Bergman

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