L’accord de compromis » et les pourparlers qui l’ont précédé

« L’accord de compromis » et les pourparlers qui l’ont précédé.יגאל בן נון 2
Après la campagne de presse contre le Maroc qui suivi le naufrage du Pisces, le nouveau roi Hassan II, qui succéda à son père Mohamed V, comprit que, pour garantir une aide financière de la France et obtenir une aide économique et militaire de l’administration Eisenhower, il devait présenter une image positive de son régime. Après le drame du naufrage, le pouvoir marocain comprit qu’il ne pouvait retenir artificiellement ses sujets juifs désirant quitter le pays et qu’il était impossible de mettre fin à l’émigration clandestine sans se mettre à dos l’opinion publique mondiale. Bien que les Israéliens eussent établi des relations étroites avec le dirigeant de l’opposition Mehdi Ben Barka concernant l’émigration, ils préférèrent en fin de compte négocier avec le jeune roi . Le but était d’accéder au cœur du pouvoir et ne pas se contenter des accointances avec l’opposition. Une fois le contact était établi avec le palais, Israël l’exploitera pour les besoins de l’émigration, mais aussi comme voie diplomatique pour défendre ses intérêts politiques dans le monde arabe.

En dépit d’une libéralisation ressentie à travers le pays pour l’octroie de passeports, les dirigeants de la communauté craignaient que cette amélioration soit éphémère. De leur côté, les Israéliens étaient convaincus que les passeports ne suffiraient pas pour faire évacuer un grand nombre de Juifs. Il fallait trouver un organisme qui planifie et réalise le départ collectif des Juifs, et en particulier ceux des villages de du Sud qui n’étaient pas en mesure de partir par leurs propres moyens. Malgré les hésitations, les diplomates israéliens comprirent qu’il fallait abandonner, à contrecœur, la méthode de départs clandestins, qui ne pouvaient faire sortir qu’un nombre négligeable de familles juives vers Israël. À ce stade, on commença à envisager l’idée d’engager des pourparlers avec les autorités marocaines pour accéder à un « accord de compromis ». On proposa d’engager un organisme humanitaire, non israélien, qui servirait de façade officielle au projet d’évacuation. L’HIAS – Hebrew Sheltering and Immigrant Aid Society – qui jouissait d’une image respectable et d’une expérience dans le domaine de l’émigration, convenait à cette mission. C’est ainsi qu’en mai 1961, commencèrent les premiers préparatifs pour contacter le ministre du Travail Abdelkader Benjelloun et le prince Moulay Ali Alaoui, tous deux proches du roi .
Malgré leur incertitude quant à la capacité du jeune roi Hassan II de se maintenir au pouvoir face à une opposition acharnée de la gauche pressée de gouverner, les Israéliens s’aperçurent qu’ils avaient devant eux un politicien avisé muni d’une grande lucidité politique. Dans l’entourage du roi, on repéra des personnalités juives ayant des rapports d’amitié avec le roi et ayant aussi des liens économiques avec le palais. Selon Efrayim Ronel, le chef de la Misgeret à Paris : « On avait bien entendu des intentions concrètes. Le roi ne négligeait évidemment pas l’avantage financier dont il pouvait bénéficier grâce à un accord avec nous. Son orientation pro-occidentale et l’image qu’il se faisait de l’influence de organismes juifs sur la scène internationale pesèrent sur ses décisions à notre égard » .
Au début mai 1961, Isser Harel décida de confier au chef de la Misgeret au Maroc, Alex Gatmon, la mission de contacter des intermédiaires juifs pour entamer des négociations avec les autorités. Jusqu’alors, cette tâche incombait à Jo Golan et Alexander Easterman du Congrès juif mondial, ou à des médiateurs comme André Chouraqui ou Marcel Franco de l’Alliance israélite universelle . En raison des résultats jugés décevants avec le palais, on décida de les contourner et d’entreprendre une nouvelle démarche qui comprendrai cette fois-ci l’option d’une indemnisation financière. La logique de cette option reposait sur l’hypothèse que le départ des Juifs du pays porterait atteinte à son économie et par conséquent le Maroc devait être indemnisé. Deux personnalité juives établirent ces liens entre Israël et les autorités marocaines : Sam Benazeraf et le Dr Isaac Cohen Olivar. Ce dernier, surnommé Zazak (diminutif d’Isaac ) est né à Tanger. Avocat, et homme d’affaires, il était spécialiste en lobbying économique. En 1951, Isaac Cohen avait déjà des relations étroites d’amitié avec le prince Moulay Hassan. Après la destitution du roi en août 1953, il fut arrêté par le résident général, le général Guillaume. Les relations de Cohen avec la famille royale entraînèrent sa mise à l’écart par la Résidence, qui l’accusa de soutenir le mouvement national marocain. Après l’indépendance, le prince nomma Cohen Olivar comme « conseiller personnel »  . Il convient de préciser que, contrairement aux informations publiées par Shmuel Segev , par Agnès Bensimon  et par Tad Szulc , Elie Torjman, proche du colonel Mohammed Oufkir, Robert Assaraf, assistant du ministre Réda Guédira et l’ancien ministre, Léon Benzaquen, ne jouèrent aucun rôle dans l’« accord de compromis » conclu avec les autorités marocaines .
L’ouverture de dossiers des Archives nationales d’Israël révéla de nouvelles données pour le moins surprenantes. Dès le mois d’octobre 1960, trois mois environ avant le naufrage du Pisces, des pourparlers fructueux étaient déjà entamés entre Israël et le prince Moulay Hassan, par l’intermédiaire de Cohen Olivar. Quelques jours plus tôt, les émissaires de la Misgeret demandèrent à un homme d’affaires, du nom de Becking, de contacter un autre homme d’affaires, Gomendio, pour lui demander s’il acceptait d’aider Israël dans le domaine de l’émigration, grâce à ses contacts avec le palais. Parallèlement, on lui demanda de soutenir l’émigration clandestine, en mettant ses bateaux à la disposition de la Misgeret pour lui fournir une façade légitime à ses activités en Méditerranée. Le propriétaire des bateaux accepta de contacter les proches du palais. Arrivés au Maroc, Gomendio présenta Becking à Cohen Olivar. Le 3 novembre, ce dernier annonça aux deux hommes d’affaires qu’il s’était entretenu avec Moulay Ali du problème de l’évacuation des Juifs et que la réponse du prince était qu’il était prêt à une transaction et demandait plus de précisions .

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