ארכיון יומי: 3 ביולי 2021


Memoires Marranes-Nathan Watchel- Resurgences marranes au Portugal

Memoires marranes

Resurgences

Un bien singulier pelerin

Que cet homme aux yeux traverses

D'une tristesse millenaire;

II soupirait: *Jerusalem!»

Heinrich Heine, Melodies hebraiques, Yehuda ben Halevy.

L'on admettait generalement, au debut du xxe siecle, que toute trace de crypto-judai'sme avait depuis longtemps disparu dans le monde iberique: il etait acquis que la persecution inquisitoriale, le temps et, pour la partie lusitanienne, l'abolition de la distinction entre vieux et nouveaux-chretiens avaient fait leur oeuvre, de sorte que toutes les formes d'heresie judai'sante etaient desormais extirpees, et les descendants des conversos en quelque sorte dissous dans fensemble de la population. Or, si la grande majorite de ces derniers s'est effectivement assimilee a la societe globale, quelques indices, certes rares, attestent au long du xixe siecle la persistance d'une presence marrane; ce que confirment au xxe siecle d'etonnants mouvements de retour au judai'sme, d'abord au Portugal, puis au Bresil, dont les acteurs se considerent comme descendants des nouveaux- chretiens d'autrefois. Ces reapparitions au grand jour de ce qui etait reste clandestin pendant tant de siecles se signalent comme autant de resurgences, dans le monde lusitanien, des longues continuites d'un marranisme souterrain.

En revanche, la continuite documentaire est pratiquement rompue en raison du tarissement, dans la deuxieme moitie du xviiie siecle, de notre principale source d'information, a savoir les dossiers inquisitoriaux concernant l'heresie judaisante. Quelle est donc la preuve d'un lien entre les resurgences du present et les conversos du passe ? De fait, en l'absence de traces ecrites, se pose inevitablement le probleme de l'authenticite de l'ascendance nouvelle-chretienne des «Juifs marranes» d'aujourd’hui. D'autant plus que le succes des multiples eglises evangelistes, surtout au Bresil, au cours du meme xxe siecle, rend le tableau encore plus complexe: certaines de ces congregations (telle l'Eglise adventiste du septieme jour) adoptent en effet des symboles et des rites d'inspiration juda'ique (etoile de David, menorah, observation du shabbat, etc.), si bien qu'elles peuvent assurer une transition vers l'adhesion au judaisme normatif de personnes issues de milieux tres differents. Complexite supplementaire: il n'est pas rare, comme nous le verrons, que d'authentiques descendants de nouveaux-chretiens, dans leur itineraire religieux, passent par une phase evangeliste avant leur retour final au judaisme. Des lors, ce qui fonde sinon une preuve toujours certaine, du moins une forte presomption de veracite, c'est une conjonction de divers indices (donnees genealogiques, contexte social et historique, coherence de la tradition orale, recurrence de coutumes specifiques, etc). Dans le cas des phenomenes portugais et bresiliens, tous ces indices convainquent que nous sommes bien en presence d'authentiques resurgences marranes.

Resurgences marranes au Portugal

Rappelons l'ouverture de l'ouvrage Os Cristaos-Novos em Portugal no seculo xx, que Samuel Schwarz publie en 1925 :

L'existence de Juifs clandestins, en plein xxe siecle, dans un pays democratique et republicain d'Europe parait, a premiere vue, invraisemblable […]. Pourtant, ils existent encore, au Portugal!

L'on ne reviendra pas ici sur les circonstances extraordinaires de la decouverte, en effet sensationnelle, des crypto-juifs de Belmonte par Samuel Schwarz, dont le livre fait certainement date. Mais il convient de le situer lui-meme dans son propre contexte, celui d'une maniere d'effervescence, en ce temps au Portugal, autour de la question marrane.

Au cours de la meme annee 1925 paraissent effectivement deux autres livres, de caracteres respectivement tres differents, mais qui eux aussi confirment la presence persistante de groupes crypto-juifs au Portugal: il s'agit de A Invasao dos Judeus de Mario Saa, d'une part, et du tome V de Memorias Arqueologico-Historicas do Distrito de Braganga. Os Judeus no Distrito de Braganga de Francisco Manuel Alves, d'autre part.

Comme son titre l'indique, le livre de Mario Saa est un violent pamphlet antisemite: l'auteur, chantre de l'ideologie «integraliste », accuse les Juifs, corrupteurs de fame nationale, d'etre la cause de tous les maux du Portugal, a commencer par l'assassinat du roi Carlos, le renversement de la monarchie et la proclamation de la republique: « En octobre 1910, l'oeuvre glorieuse des Freres se vit vengee […]. La multitude des heretiques nouveaux-chretiens, si souvent reprimee, se rassasiait maintenant dans une orgie de revanche a 1'encontre du clerge […].» Ce genre de propagande reprenant les cliches les plus banals, mais virulents (complot judeo-maqonnique, esprit juif de subversion, etc.), n'etait alors pas isole: peu auparavant, en 1923, avaient ete traduits en portugais les Protocoles des Sages de Sion. – Pourtant, paradoxalement, au milieu de ses vituperations et imputations delirantes, Mario Saa procure des informations d'un reel interet sur certains aspects de la persistance, a son epoque, de pratiques crypto-juives:

[…] du metissage religieux que les nouveaux-chretiens professaient en secret, il reste encore aujourd'hui des vestiges en des lieux oublies de nos provinces, principalement pres des frontieres, dans la Beira et le Tras-os-Montes […]. Dans la Beira, il y a des localites entierement peuplees de Juifs, comme le bourg de Belmonte […], ou l'on va a la synagogue, pratique la circoncision, labattage du betail selon les regies judai'ques, etc. En ce lieu, comme en d'autres dans le Tras- os-Montes […], toute la population est juive, vivant selon les coutumes de la synagogue, mais toujours prudemment, sans meme en soupconner 1'origine juive! […]. Il s'agit dans les deux cas de populations qui ont perdu leur tradition genealogique, mais sans avoir perdu leur tradition religieuse. En d'autres lieux, cependant, comme a Bragance, survit toute la tradition de l'origine, de meme que la tradition de croyance: la tradition y est complete.

Ces considerations tres fines, veritablement pertinentes, a propos de coutumes pratiquees selon des modalites differentes (tantot dans l'ignorance de leur origine, tantot en toute conscience), venant d'un auteur si violemment hostile a l'objet dont il traite, montrent qu'il a egalement effectue une enquete serieuse sur les lieux memes qu'il evoque dans ses diatribes.

Memoires Marranes-Nathan Watchel- Resurgences marranes au Portugal

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Un siècle de floraison culturelle-Joseph Toledano

meknes
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RABBI YEHOUDA BERDUGO (1690 1744)

Fils de rabbi Yossef. Enseignant de grand talent, il succeda a son parent maitre rabbi Moshe Toledano comme membre du tribunal ou il siegea a cotes de rabbi Yaacob Toledano et de rabbi Moshe Dahan. Malgre sa disparition prematuree, il a laisse une oeuvre considerable. Son livre le plus com Mayim amoukim, qui est comme son nom l'indique – les eaux profondes – commentaire tres approfondi de la Torah devait etre initialement publie avec le livre de son "ami dans l'ame", le celebre rabbi Haim Ben Attar, Or Hayaim mais ce dernier avait ete contraint de quitter precipitamment le Maroc sans avoir recupere le manuscrit. Bien qu'il n'ait ete imprime pour la premiere fois qu'en 1910, ce livre avait connu un succes prodigieux, plusieurs rabbins lui ayant consacre analyses et commentaires dont rabbi Abraham Lasry d'Alger, rabbi Moshe Elbaz de Sefrou, rabbi Yaacob et rabbi Yossef Berdugo de Meknes. Dans l'edition de 1975, rabbi Yaacob Zrihen de Tiberiade le comparait ( parait a… Maimonide !

RABBI MORDEKHAY BERDUGO (1715 -1762)

Surnomme Harav Hamarbitz ou Mordekhay Hatsadiq; son frere cadet, fut pendant vingt ans membre du tribunal rabbinique. Gendre et disciple de rabbi Moshe Berdugo; harav hamasbir Auteur d'un commentaire biblique connu Parachat Mordekhay imprime pour la premiere fois en 1948 et d'autres ouvrages non publies. Un des ses fils, rabbi Raphael sera la figure dominante du XlXeme siecle comme nous le verrons au chapitre suivant.

RABBI SHMOUEL DE AVILA (NE EN 1688)

Fils de rabbi Itshak, il fut le disciple de rabbi Yossef Bahtit et de rabbi Haim Ben Attar, le Vieux de Sale au cours de son sejour a Meknes. Ayant fait fortune dans le commerce international, il entra en conflit avec la communaute de Meknes qui exigeait de lui une grande contribution comme impots en fonction de sa fortune comme negotiant international, alors que lui se prevalait de sa qualite de talmid Hakham pour obtenir une dispense d'impot. Suite a ce differend, il s'installa a Sale puis a Rabat ou il fonda la plus illustre famille de rabbins de la ville. Dans son livre Keter Torah (Amsterdam, 1734), il defend notamment la cause des rabbins qui doivent etre exemptes d'impots quelle que soit leur fortune. Il a laisse deux autres livres Ozen Shmouel (Amsterdam, 1715), recueil de ses sermons et Meil Shmouel, commentaires, restes manuscrits.

RABBI MOSHE DAHAN

Fils de rabbi Yaacob, ne a Meknes dans une illustre famille de rabbins du Tafilalet.

A la mort de rabbi Moshe Berdugo en 1731, la communaute le fit revenir de Fes pour presider le tribunal: Un des notables de la ville; Aharon Benharrosh, lui fit don d'un terrain pour construire sa maison et sa synagogue et les autres notables se cotiserent pour en couvrir les frais. Ascete d'une grande piete, il fut considere avec son frere rabbi Mimoun comme "les deux colonnes sur lesquelless repose la Torah". Poete fecond, une des quinot, lamentations est entree dans la liturgie des synagogues de Meknes dans le rituel des prieres de la periode de ben hametsarim precedant le deuil de Ticha Beab. De meme son poeme en l'honneur du shabbat Meborakh shabbat chante les vendredis soirs. Sa mort en 1737 marqua fortement les esprits; coincidant avec une nouvelle attaque du mellah; interpretee comme la disparition d'un des remparts protecteurs de la communaute.

RABBI DAVID HASSINE (1727 -1792)

Plus grand poete en langue hebra'ique de l'histoire du Maroc, rabbi David Hassine a ete le chantre des heures de joie et des malheurs cette periode si troublee de l'histoire de la communaute ou malgre les exactions politiques la creation intellectuelle ne s'est pas tarie.

Ne l'annee de la disparition de Moulay Ismael et le debut des trente ans de guerres de succession, sa vie s'acheva en meme temps que celle du plus sanguinaire des sultans, Moulay Yazid, surnomme dans la litterature rabbinique Hamezid, le malfaiteur.

Ne dans une famille de lettres aisee, son pere rabbi Aharon, bijoutier; fut ruine dans le sac du mellah en 1728. II avait confie en garde a un certain Ha'im Toledano une cassette en argent, une ceinture et cinq poignards d'apparat, tous emportes par les pillards. Malgre cela, il assura a son fils une tres solide formation talmudique sous la direction du plus grand maitre de l'epoque, rabbi Mordekhay Berdugo, surnomme Hamartbitz, qui en signe d'appreciation pour son meilleur disciple lui donna sa fille en mariage. Passionne par les etudes, y compris de la Kabbale, parfait talmid hakham, rabbi David redigea l'epreuve de son premier livre, qu'il se proposait de completer plus tard, a l'age de 18 ans, Migdal David, qui ne devait jamais etre publie. Mais sa grande passion fut la poesie dans la tradition des grands maitres de l'ecole espagnole. Son hebreu biblique est enrichi d’emprunts a la litterature liturgique, a la langue rabbinique, a l'arameen et accessoirement a la Kabbale. II sut adapter la langue aux circonstances, ayant recours a des neologismes originaux et hardis et a d'astucieux jeux de mots. Vivant difficilement de son art poetique, il s'acquit une grande notoriete de son vivant au dela des frontieres de Meknes par ses visites dans toutes les villes du Maroc a la recherche de mecenes. A Gibraltar, il decouvrit avec emerveillement la musique classique europeenne, s'etonnant comment les musiciens peuvent en meme temps jouer de leurs instruments et lire les notes ! Des 1782, il chercha en vain a publier ses poemes qu'il avait regroupes en recueil. Mais ce n'est qu'en 1789 que le grand negociant anglais originaire de Meknes, Salomon Sebbag, qui avait pris sur lui de le faire imprimer avec le soutien d'autres donateurs – dont trois grands commercants de Mogador; Yehouda Guedalia, Meir Cohen Macnin et Itshak Attia – apporta le manuscrit a Amsterdam. Les difficulties d'impression furent si grandes que le livre ne devait paraitre qu'en 1807, quatorze ans apres la mort du poete. Le difficile travail de transcription avait ete fait grace au concours providentiel d'un correcteur originaire de Meknes; Moshe Dery (1775 -1842). Ce dernier a l'instar de nombre de ses compatriotes; avait fui Meknes en 1793 pour Londres et ensuite Amsterdam. Le recueil parut sous le titre de Tehila ledavid, Gloire a David, precede des prefaces -recommandations des plus grands rabbins de Meknes de son epoque, dont son beau -frere Raphael Berdugo, son gendre Binyamin Elkrief, de rabbi Moshe Maimran, et des rabbins de Fes et de Marrakech. Le livre connut une grande diffusion et devint rapidement introuvable au Maroc, recopie a la main pendant des generations, jusqu'a sa reedition a Casablanca par un de ses descendants, rabbi Abraham Hassine, en 1931. Une nouvelle edition critique a paru a Jerusalem en 1999, oeuvre des professeurs Ephraim Hazan de l'Universite de Jerusalem et Andre Elbaz de l'universite d'Ottawa, a laquelle nous empruntons la traduction en frangais des poemes. Nombre de ses poemes sont entres dans la liturgie des synagogues marocaines et dans les recueils de bakachot, dont l'hymne a Tiberiade Ohil yom yom estahe (Tous les jours, rempli d'espoir, je souhaite ardemment voir la ville) ou ete adoptes egalement par les commu- nautes sefarades d'Orient.

Par les themes choisis, il chante les aspirations collectives de la communaute; le cycle de sa vie quotidienne, le cycle de la vie juive de la naissance a la mort et les rejouissances des fetes liturgiques et familiales; ses epreuves quotidiennes et ses espoirs. Ses lecteurs s'identifiaient avec ses propres souffrances de la durete de l'exil en cette periode de persecutions et de famines

 

Dans mon exil, la poesie s'est tarie sur mes levres

Souviens toi mon Dieu de ma pauvrete et de mon

Denuement, carje n'ai plus rien.

Ma douleur a grandi, je n'en peux plus. Des jours sont venus, que je n'ai plus le gout de vivre

La malediction de chaquejour est encore plus terrible

Que celle du jour precedent…

Nous avons vu les tourments qui precedent l'ere messianique,

Mais le Messie ne s'est pas empresse de venir a nous.

Nous 1'avons attendu tous les jours Avec amour, avec passion.

 

La poignante complainte sur la persecution de Moulay Yazid est restee celebre :

En l'an 5500, la gloire de Meknes a ete aneantie;

Dieu fit surgir un demon qui y fit soudain irruption pour la devaster.

La horde des pillards est entree dans la ville;

Les propheties du prophete Elie

Sur la Terre d'Israel

Dieu les a toutes realisees (a Meknes)

Sans aucune exception

 Pourquoi cette grande colere contre nous ?

Des pillards en vagues successives

Nous denuderent comme on tond

Les chevres d'un an et les brebis….

Je pleurerai tous les jours

Les ecrits (detruits) de nos sages

Ils n'ont pas de prix

Ces ouvrages de commentaires et d'exegese…

Le malheur et l'affliction ont frappe (les Juifs du Maroc)

Si nombre d'entre eux ont abjure leurfoi

D'autres sont morts en martyrs

Pour sanctifier le Tout –Puissant

 

Mais parallelement l'espoir de la delivrance prochaine, du retour dans la terre des ancetres, dans Tiberiade reconstruite, est omnipresent:

 

Rassemble mes disperses, mes expulses Dieu Tout -Puissant

Accorde ta misericorde a Tes enfants

Qui demeurent dans les tenebres de l'Exil

En leur envoyant le Liberateur

Le Messie relevera bien haut l'etendard de Judah

Et deviendra notre souverain.

Les impies trembleront devant lui, reduits au silence

Alors nous briserons les chaines qui nous entravent

 

 Son plus proche disciple, rabbi Shelomo Halioua, dont l'oeuvre reste encore presque inedite, eut une carriere aussi aventureuse que son aine, voyageant de ville en ville a la recherche de genereux mecenes. II composa plusieurs elegies sur la famine et les persecutions de Moulay Yazid. II pleura la mort de son maitre.

 

Un siècle de floraison culturelle-Joseph Toledano

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