Il était une fois le Maroc-David Bensoussan-2010- DRUMMOND HAY

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DRUMMOND HAY

Hay père et fils eurent une grande influence sur la diplomatie marocaine. À quoi peut-on attribuer leur succès?

Sir John Drummond Hay et son père Edward Drummond Hays furent des consuls britanniques maîtrisant parfaitement la langue arabe.

En 1830, les intérêts des Britanniques étaient mal protégés. La piraterie continuait encore et les traités n'étaient pas respectés. Ce fut le jeune Drummond Hay qui réussit à nouer des contacts avec le palais, faire comprendre les bénéfices réciproques de la collaboration jusqu'à devenir essentiel non seulement en ce qui a trait aux affaires britanniques, mais également en ce qui a trait au rapport de l'ensemble des puissances européennes avec le Maroc. On rapporta que durant les négociations qui suivirent la guerre d'Espagne en 1860, le Ministre des Affaires étrangères Khateeb se comporta plutôt comme le secrétaire de Hay qu'en tant que Ministre des Affaires étrangères d'un pays indépendant.

John Drummond Hay soulignait en 1845 les négligences de l'administration marocaine dans tous les domaines. Il connaissait intimement le pays et maîtrisait parfaitement la langue arabe. En 1865, il notait qu'à l'exception du sultan lui-même qui est honnête et faible de caractère, du chambellan Moussa Ben Ahmed et de deux autres, tout le reste était corrompu. En 1880, il arrivait à la conclusion suivante : « C'est une honte qu'il soit permis à ce maudit gouvernement de durer… Le sultan doit être forcé d'introduire des réformes.»

Drummond Hay intervint plus d'une fois pour alléger les souffrances des Juifs, et fut chaudement remercié par la communauté juive tangéroise lors de sa retraite. Il n'en était pas moins conscient de ce que la population musulmane souffrait également de grands abus : « Aucun défenseur humanitaire n'a élevé la voix en faveur de la population rurale mahométane qui est encore plus cruellement opprimée par les gouverneurs et les Cheikhs que leurs concitoyens juifs.» Dans un mémorandum adressé à l'Anglo-Jewish association de Londres en 1878, Drummond Hay souligna le changement radical de la condition des Juifs du littoral (dans lesquelles la présence consulaire était importante), car ils étaient moins soumis aux vexations d'antan. Drummond Hay était alors sur la défensive, car il devait composer avec le problème soulevé par le missionnaire britannique Ginsbourg, à la tête de la section marocaine de la London Society Promotting Christianity among the Jews, que la communauté juive de Mogador avait mis à l'index.

Certains pourraient voir dans la défense des Juifs au Maroc et dans l'Empire ottoman une sorte de contrepoids à l'influence de la Russie et de la France qui se voulaient les défenseurs respectifs des minorités orthodoxes et chrétiennes du Levant. Mais il n'en demeure pas moins que Drummond Hay avait à cœur le bien du Maroc et recherchait le bien du pays quand il proposait des réformes dans des domaines divers. De fait, une école de pensée existait, voyant dans l'expansion du commerce, dans l'abolitionnisme, dans l'utilitarisme et dans l'évangélisation, les piliers moraux de l'interventionnisme britannique dans le monde. Le vicomte Palmerston, Premier ministre de Grande-Bretagne, avait alors déclaré : « Notre devoir, notre vocation, n'est pas d'asservir, mais de libérer; et je peux ajouter sans fausse vanité et sans offenser qui que ce soit, que nous nous tenons au sommet de la civilisation tant sur les plans moraux que sociaux et politiques.»

Le tour de force de John Drummond Hay fut de parvenir à non seulement obtenir l'écoute du sultan qui appréciait sa sincérité, mais aussi de faire en sorte que le sultan soit persuadé que l'Angleterre était un pays allié. Son génie fut d'avoir une influence énorme sur les affaires marocaines sans même que l'Angleterre ne mette à sa disposition des budgets à ces fins, voire un personnel de soutien compétent. Alors que beaucoup de commerçants peu scrupuleux venaient faire fortune facile au Maroc, les Anglais eurent la réputation d'être « des personnes n'ayant qu'une seule parole.»

Dans sa correspondance avec la reine Victoria, le sultan déclara : « Conformément à notre évaluation, Drummond Hay jouit d'une fonction et d'un rang qui ne peuvent être ignorés. Nous avons apprécié son intellect remarquable, sa prestance et sa façon d'arbitrer entre Vous et Nous par sa conduite exemplaire et ses conseils avisés… Nous l'avons accueilli selon le protocole en vigueur et lui avons témoigné notre faveur, sollicitude et respect, car Nous le tenons en haute estime et comme le plus compétent des médiateurs qui cherchent le bien des deux pays.»

Cependant, les relations maroco-britanniques connurent des aléas

En effet, lorsque des aventuriers britanniques voulurent ouvrir un comptoir dans le Sous qui, à cette époque, cherchait à se libérer de la tutelle du sultan, Hassan Ie eut grand mal à faire la différence entre les actions de citoyens privés britanniques et celles du gouvernement britannique, d'autant plus qu'on lui demandait de payer une forte indemnité pour que ledit comptoir soit fermé. En outre, les successeurs de John Drummond Hay furent bien loin d'avoir les qualités humaines et le doigté de leur prédécesseur.

Les mémoires de Sir John Drummond Hay A memoir of Sir John Drummond Hay, furent éditées en 1896 par ses filles Alice Emily et Louisa Annette Edla.

PERCEPTIONS DU MAROC A L'ÈRE PRÉCOLONIALE

Comment était perçu le Maroc avant l'ère coloniale?

Le récit de l'officier de la marine M. Descoudray (Extrait d’un voyage inédit à Mogodore et à Maroc en 1824) est assez typique des descriptions faites par de nombreux voyageurs : « La trahison, l’empoisonnement. La strangulation entre frères, entre père et fils, sont les épisodes les plus courants de l'histoire de cette dynastie. La polygamie est, sur tous les trônes des états mahométans, la source de ces divisions; la multitude de frères et de prétendants au pouvoir, enfante nécessairement des guerres intestines, des démêlés domestiques entre tant d'héritiers; de là ces strangulations qui signalent l'avènement d'un nouveau sultan au trône de ses pères; il marche vers ce trône sur les cadavres de ses compétiteurs. Mais chez les Maures d'Afrique, cette affreuse conséquence de la polygamie cadre merveilleusement avec le caractère national : ces exécutions fratricides ne sont pas seulement une obligation, mais une volupté. Le soleil fait couler dans les veines des Africains un sang de lave; moins généreux que le lion de leur désert, la cruauté n'est pas chez eux l'effet des appétits charnels, mais celui du plaisir de détruire. Aussi les empereurs se réservaient-ils les exécutions à mort pour passe-temps. Sidi Mahomet se départit le premier de ce privilège, car enfin on a beau faire contre la civilisation dans les pays barbares, il y en pénètre toujours quelque chose. Le monarque ne fait plus l'office de bourreau, mais il n'évite pas le spectacle des exécutions; et les princes aiment encore mieux passer leurs loisirs auprès de l'échafaud que dans leurs maisons.» Les auteurs M.M. Baudoz et I. Osiris présentaient ainsi le Maroc en 1860 dans leur ouvrage Histoire de la guerre de l'Espagne avec le Maroc : « L'administration du Maroc est ce qu'elle est dans tous les pays musulmans, despotique, vicieuse et corrompue. La justice se vend, mais ne se rend pas. Les impôts sont institués non pour le bien du pays, mais pour enrichir le chérif.»

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